Visite d'Elisabeth Borne et de ses ministres : les agriculteurs attendent des aides et du concret

Yanos Maillot, agriculteur dans les hauts de Saint-Louis
Flambée des prix des intrants et des matières premières, difficultés à l'export, concurrence des produits importés... Voilà quelques-uns des problèmes auxquels les agriculteurs attendent une réponse du gouvernement, à la veille de l'arrivée à La Réunion de la Première ministre Elisabeth Borne et de quatre autres ministres dont celui de l'Agriculture, Marc Fesneau.

La saison des bringelles touche à sa fin pour Yanos Maillot, cet agriculteur saint-louisien, dont l'exploitation se trouve sur les hauteurs de la ville à Bellevue. Mais son activité est de plus en plus contrainte par les hausses de prix à tout-va ces dernières années.

Regardez le reportage de Réunion La 1ère : 

Les agriculteurs attendent de pied ferme Elisabeth Borne et Marc Fesneau, ministre de l'Agriculture

Des augmentations qui par exemple, ne lui permettent plus de lutter correctement contre les petits insectes ravageurs qui attaquent ses pieds d'aubergine, empêchant le légume de se développer correctement. 

Hausses de prix des intrants et du matériel 

Car avec l'inflation, les rouleaux de bâches en plastique qui lui servent à protéger ses cultures ont vu leur prix flamber. Le rouleau de 600 mètres, à 150 euros environ auparavant, se monnaye désormais à 220 euros, raconte Yanos Maillot. Et ce n'est là qu'un exemple de ce qui a pu augmenter dernièrement. 

Pour les intrants, même souci : le prix de l'engrais qu'il utilise pour sa production d'ananas est passé de 1 500 euros à 2 800 euros la tonne, assure l'agriculteur, qui lorsqu'il a repris l'exploitation familiale en 2006 a tenté de diversifier la production. Aujourd'hui, celle-ci est partagée entre un peu de maraîchage, de l'ananas, et du fruit de la passion. 

Des problèmes économiques, environnementaux et sociaux 

Pourtant, cette diversification ne lui suffit plus pour s'en sortir face aux difficultés auxquelles il est confronté, lui comme les autres agriculteurs de l'île. Des problèmes d'ordre économique, environnemental, ou encore social, que détaille le président de la CGPER (Confédération générale des planteurs et éleveurs de La Réunion) Jean-Michel Moutama. 

"Envoyez des sous sur nos exploitations" 

Le souci des coûts de production qui augmentent avec les hausses de prix des intrants et matières premières est majeur. "Le coût de production est devenu plus élevé que le prix de vente", soupire Jean-Michel Moutama, appelant de tous ses voeux une aide de la part du gouvernement. 

"Nou profite de la venue de tout ce beau monde du gouvernement pou explique a zot la situation. S'il n'y a pas d'accompagnement direct qui arrive sur nos exploitations, c'est la fin de notre métier. Envoyez des sous sur nos exploitations pour qu'on puisse produire à des prix corrects pour la population réunionnaise. Là où tout le monde parle aujourd'hui de souveraineté alimentaire, il faut arrêter avec les beaux discours et passer au concret."

Jean-Michel Moutama, président de la CGPER

Des contraintes environnementales

Outre les flambées de prix, les normes environnementales imposées, qui se manifestent par exemple par l'interdiction d'utilisation de certains produits, font aussi grincer des dents. "C'est vrai qu'il faut diminuer l'utilisation des produits", reconnaît Jean-Michel Moutama. Mais le président de la CGPER constate aussi les limites de l'agriculture plus verte souhaitée par l'Europe et la France. 

Une "concurrence déloyale" des pays de la zone

"Aujourd'hui on est concurrencés par les pays de la zone. L'Europe, la France, ne peuvent pas nous imposer des contraintes énormes tout en laissant entrer des produits qui sont cultivés de n'importe quelle manière. Qui c'est qui va contrôler les agriculteurs qui viennent nous concurrencer sur notre marché ?", s'interroge-t-il, qualifiant ces importations de "concurrence déloyale". 

Un plan pour l'export de l'ananas réclamé 

Enfin, autre point qui mérite d'être abordé lors de cette visite ministérielle, celui de l'export, qui selon Jean-Michel Moutama connaît aussi des difficultés. L'export de l'ananas, en particulier, soulève ses inquiétudes. 

"S'il n'y pas un plan Ananas mis en place avec des fonds FEADER par exemple comme pour la canne, ou comme pour la banane aux Antilles, d'ici un an ou deux, il n'y aura plus d'ananas réunionnais exporté. Les marchés qu'on a pris plus de 30 ans à avoir seront pris par les pays tiers qui font aussi de l'ananas Victoria. On n'accepte pas ça"

Jean-Michel Moutama, président de la CGPER

La thématique agricole abordée par les ministres vendredi 

Ces questions devraient être entendues cette semaine par les membres du gouvernement, puisqu'Elisabeth Borne arrive à La Réunion ce jeudi avec, entre autres, le ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, Marc Fesneau

L'agriculture devrait d'ailleurs être un des principaux thèmes abordés lors de la visite, en particulier la journée de vendredi. Des échanges sont prévus à Sainte-Rose, surtout autour de la vanille locale, puis à Bras-Panon où les ministres sont attendus sur une usine agro-alimentaire et pour un déjeuner de travail avec les différentes filières agricoles.