Santé mentale des jeunes en péril : trois tentatives de suicide par jour à La Réunion

Santé mentale des jeunes en péril : trois tentatives de suicide par jour à La Réunion
La santé mentale des jeunes se détériore à La Réunion. Trois tentatives de suicide ont lieu chaque jour sur l’île, selon les derniers chiffres de l’Observatoire régional de la santé (ORS). Cette tendance est confirmée par Santé Publique France. D’après son baromètre, les 18-24 ans sont les plus touchés par les tentatives de suicide et les idées suicidaires.

La santé mentale des jeunes est en danger à La Réunion. Selon l’Observatoire régional de la santé (ORS), un décès tous les quatre jours est lié à une tentative de suicide. Santé Publique France confirme cette tendance inquiétante.

Dans le même temps, trois tentatives de suicide sont recensées quotidiennement. La situation est “grave”, alerte Caroline Nègre, psychologue clinicienne auprès des jeunes à Saint-Paul.

Les tentatives de suicide augmentent à La Réunion

Après les accidents de la route, le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les jeunes âgés de 15 à 29 ans, selon l’ORS Réunion.

De 2020 à 2022, 1 100 séjours hospitaliers liés à des tentatives de suicide sont comptabilisés sur l’île et 64 % des tentatives de suicides concernent les femmes. Face à cela, 79 % des décès liés au suicide concernent les hommes.

Les jeunes sont les plus concernés

“C’est très préoccupant. Les 18-25 ans sont les cas les plus alarmants, mais il y a aussi la période de l’adolescence. C’est dans cette tranche d’âge où il y a le plus de passages à l’acte”, précise Caroline Nègre, psychologue clinicienne auprès des jeunes à Saint-Paul.

À l’adolescence, les jeunes manquent de repères. Pour la plupart, ils rencontrent des difficultés à se projeter dans la vie adulte et ils ne se sentent pas à la hauteur des exigences émises par leur famille ou par l’école, selon la psychologue clinicienne.

Bien souvent, lors des consultations, les jeunes se plaignent du manque de sens. Ils ne savent pas où ils en sont dans leur vie. Ils sont perdus. Ils ont l’impression d’être inutiles. Ces situations peuvent être liées à des changements d’environnement, à des changements de classes ou d’écoles. Ces situations peuvent également être liées aux effets de la puberté. Les adolescents grandissent, et se trouvent dans une phase de transition entre l’enfance et la vie adulte. Donc, ils peuvent se trouver dans des phases de difficultés.

Caroline Nègre, psychologue clinicienne auprès des jeunes à Saint-Paul

Prendre soin de sa santé mentale

Il est nécessaire de prendre soin de sa santé mentale au quotidien, rappelle Caroline Nègre, qui met l’accent sur le fait que cela passe par des gestes simples comme “pratiquer un loisir qui nous plaît ou s’adonner à l’art et à la musique”. Cela passe notamment par le fait d’avoir des “relations saines et constructives” avec son entourage.

Tout ce qui va être de l’ordre de l’éducation et des loisirs, ça va être la clé de la prévention du bien-être social. C’est important que chacun trouve sa place, sa valeur, son sens. Peut-être qu’on arrive à des situations trop rigides, trop carrées et trop aiguillées. Il faut mettre en avant d’autres compétences que le scolaire. Il faut amener les jeunes à faire plus de sport, à se tourner vers la peinture et la musique ou le solfège. Il faut baisser les exigences, sortir de ce cadran de la réussite et de l’obligation. C’est un système trop lourd et trop rigide.

Caroline Nègre, psychologue clinicienne auprès des jeunes à Saint-Paul

Détecter les signes de santé mentale fragiles

Plusieurs signes peuvent alerter les parents ou l’entourage d’un jeune qui serait en situation de fragilité émotionnelle.

Ça peut être des appels à l’aide, comme l’expression d’idées suicidaires ou alors avoir des gestes autoagressifs comme des scarifications. Une personne peut se faire des blessures soi-même. Ça peut être aussi du repli sur soi, peu de communication voire une absence totale de communication et un renfermement transgressif. On peut aussi avoir des troubles alimentaires et des troubles du sommeil.

Caroline Nègre, psychologue clinicienne auprès des jeunes à Saint-Paul

L’angoisse et la dépression sont également des signes. “Tout dépend aussi de la personnalité de la personne, de son estime d’elle-même. S’ajoutent à cela des externalités, tels que des accidents de la vie, des discriminations. En fait, ce sont des problématiques sociales qui s’ajoutent à des problèmes personnels. Donc, ça donne des situations explosives”, détaille Caroline Nègre.

La communication et l’écoute, les clés pour s’en sortir

La santé physique et émotionnelle repose sur la communication. La communication et l’écoute sont les clés pour s’en sortir, selon la psychologue clinicienne.

Dans la famille et dans les relations quotidiennes, Caroline Nègre préconise d’être présent pour les jeunes en situation de fragilité, sans pour autant être intrusif.

On peut essayer de discuter, mais si on n’y arrive pas, on peut l’orienter vers un psychologue ou un médecin, ou alors vers des structures associatives ou spécialisées. Il y a toujours des solutions.

Caroline Nègre, psychologue clinicienne auprès des jeunes à Saint-Paul

Questionner pour éviter les tentatives de suicide

Il faut apporter son aide de façon progressive, insiste la psychologue clinicienne, qui met l’accent sur la nécessité de poser des questions “comment ça va à l’école ? Comment est-ce que tu te sens aujourd’hui ?”, demande-t-elle lors de ses consultations.

Si vous êtes confrontés à un cas de jeune en difficulté, il faut dire qu’on s’inquiète pour lui. Il faut lui montrer qu’il est important et qu’il doit prendre soin de sa santé avant tout. La rupture scolaire peut être un signe alarmant pour les parents.

Caroline Nègre, psychologue clinicienne auprès des jeunes à Saint-Paul

Le 31 14, numéro de prévention suicide

Le 31 14 est une ligne nationale de prévention du suicide. Ce numéro d'écoute, d'intervention et d'orientation est actif depuis La Réunion. En effet, le centre régional de prévention du suicide de l'établissement public de santé mentale de La Réunion gère les appels.

Le numéro vert est disponible tous les jours, 24 heures sur 24 et il est dédié aux personnes ayant des idées suicidaires.