Le Quotidien de La Réunion ne baisse pas les bras et reste plus que jamais mobilisé. Après avoir interpellé hier mercredi la ministre de la culture Rima Abdul Malak, les membres du CSE du journal ont reçu aujourd'hui à leur table, un entretien pour évoquer les perspectives et la date tant redoutée du 13 décembre 2023. Les employés ont notamment confirmé leur opération "Portes Ouvertes" et de solidarité ce samedi 2 décembre de 10h à 18h.
Regardez le reportage de Réunion La 1ère de Nina Santi et Florence Bouchou
Après le soutien confirmé de l'intersyndicale, le personnel du Quotidien a reçu celui très attendu d'Huguette Bello, la présidente de Région.
Dans un communiqué transmis ce jeudi après-midi aux rédactions, elle se dit solidaire du Quotidien mais aussi du JIR, deux journaux sur le fil du rasoir et qui accumulent d'énormes pertes financières.
"Évidemment, et pour plusieurs raisons, je ne suis pas insensible à cette situation. D’abord, parce que je suis attachée comme beaucoup de nos concitoyens à la liberté de la presse et de l’information à une époque où celle-ci est plus que jamais nécessaire. On ne peut pas se contenter des réseaux sociaux, qui ne sont pas à l’abride la diffusion de fausses informations. Bien entendu, je ne parle pas des médias en ligne qui contribuent au pluralisme de l’information“, affirme la présidente du Conseil Régional.
Une subvention régionale de 600 000 euros?
“Pour autant, vous connaissez ma position sur ce sujet. Je tiens à rappeler que des personnalités et des institutions font l’objet toutes les semaines depuis plusieurs années, de manière systématique de la part du directeur du JIR, d’attaques personnelles, qui sont indignes et qui trahissent les valeurs du journalisme formulées par la charte de Munich de 1971 “, insiste Huguette Bello. “Néanmoins, là encore, ne globalisons pas. Je distingue totalement les manœuvres grossières de cette personne du reste de la rédaction du JIR et de l’ensemble de ses salariés qui essaient de faire honnêtement leur travail malgré les pressions exercées à leur encontre. Ensuite, parce qu’en tant que Présidente de Région, il s’agit d’entreprises qui font partie du patrimoine Réunionnais. Le Quotidien existe depuis 1976. Il emploie 52 salariés de façon directe et presque 120 de manière indirecte. Le JIR, quant à lui, existe depuis 1951. À la tête de la collectivité régionale, responsable du développement économique, je ne peux donc que me sentir concernée et préoccupée par cette situation. Enfin, parce que je pense évidemment à tous les salariés, et à leurs familles, en cette période de fêtes de fin d’année, qui se retrouvent dans une grande incertitude et qui risquent de perdre leurs emplois“, explique la patronne de la Pyramide inversée.
” Le Quotidien, comme le JIR, doivent vivre “
“S’agissant plus particulièrement du Quotidien qui se trouve actuellement en procédure de liquidation, comme tout le monde, j’ai été déçue par l’absence de mobilisation des investisseurs locaux devant le tribunal de commerce. Vous connaissez mon attachement au patriotisme économique. Cependant, je ne désespère pas de la situation. Au regard de celle-ci, je veux dire aux Réunionnaises et Réunionnais que la Région est mobilisée pour relancer le Quotidien. Je ne peux pas entrer dans les détails. Mais tout ce que je peux vous dire, c’est que nous y travaillons. Nous ne restons pas les bras croisés à attendre que Le Quotidien soit liquidé. J’en appelle également à la responsabilité des acteurs économiques locaux qui doivent tous se sentir concernés. La situation n’est pas désespérée et le journal Le Quotidien peut encore être sauvée avec la mobilisation de tous les Réunionnais. J’en appelle aussi à l’action de l’État qui doit tenir compte des spécificités de la presse écrite en outre-mer et qui peut venir en aide aux journaux locaux.
Le temps viendra où il nous faudra, néanmoins, discuter de la pérennité du modèle économique de la presse écrite à La Réunion. Il est certain que les modèles actuels ne sont plus tenables. Les deux journaux doivent, à ce propos, redéfinir leurs modèles pour s’adapter à des modes de consommation de l’information qui évoluent dans un contexte concurrentiel. Ils doivent aussi s’interroger sur leurs modes de gestion interne.“
"Nous ne restons pas les bras croisés"
“Je sais que dans le cas du Quotidien, Madame Chane-Ki-Chune se sent tout à fait concernée et y travaille de façon responsable et pragmatique pour assurer la pérennité du titre et des emplois associés. Je ne suis pas certaine, en revanche, que l’on puisse en dire autant du directeur du JIR, pour le moment. Il faut le rappeler, il a été largement aidé par de l’argent public par le passé. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il n’a pas su faire preuve d’une gestion responsable et de la transparence qui s’impose. Les pouvoirs publics sont donc en droit de s’interroger. Je le dis et je le répète sans ambiguïté : le Quotidien, comme le JIR, doivent vivre. Notre démocratie serait affaiblie si l’un de ces deux organes de presse, et à fortiori les deux, venait à disparaître “ s'inquiète Huguette Bello.
Ce soutien de la collectivité Régionale devrait se matérialiser dès demain vendredi 1er décembre par une subvention régionale de 600 000 euros. L'octroi de cette aide sera examinée par les membres de la commission permanente de La Région. Elle sera soumise au préalable au contrôle de légalité. Si cette subvention exceptionnelle est validée par les conseillers régionaux, elle permettra au Quotidien de poursuivre pendant quelques mois son activité comme le rappelle la collectivité: "Un délai supplémentaire pour présenter un plan de reprise pérenne qui permettra de sauvegarder les emplois et préserver la pluralité de la presse sur le territoire (...) l’entreprise a formulé auprès de la collectivité régionale une demande d’aide à sa restructuration financière ».
De son côté Cyrille Melchior rappelle aussi son attachement aux deux titres de la presse écrite. Le président du Conseil Départemental, appelle ce jeudi soir les entreprises de l'île à se mobiliser pour la survie des deux quotidiens.
"Sur un petit territoire, comme La Réunion, la liberté et la pluralité de la presse sont précieuses et chacun, que l'on soit citoyen, élu, doit s’en faire le garant et permettre aux journalistes de travailler et de poursuivre leur métier. Il est essentiel de préserver cette spécificité ultramarine et de défendre l'équilibre médiatique construit depuis plusieurs années." insiste Cyrille Melchior.
"Je ne peux rester insensible à cette situation car derrière chaque page écrite, se trouvent des femmes et des hommes, des mères et des pères engagés à véhiculer l’information, des familles qui vivent de ce travail offert à la lecture de chacun, qui écrivent l’histoire quotidienne de notre île et de ses habitants."
"J’appelle les entrepreneurs réunionnais, eux aussi, à s’engager pour la survie du Jir et du Quotidien. Un modèle économique viable peut et doit être trouvé, il en va de l’équilibre du paysage médiatique local et de la bonne information de nos concitoyens."
"J’ai sensibilisé le Président de la République, la Ministre de la Culture et le Ministre délégué chargé des Outre-mer sur cette situation et ils m’ont assuré que l’Etat accompagnerait la sauvegarde de ces deux organes de presse, indispensables à notre démocratie." confie le patron du palais de la Source.
Le Quotidien de La Réunion a été placé en liquidation-cession le 4 octobre dernier, mais la seule offre de reprise proposée par Henri Nijdam, le patron du groupe de presse Média Capital, a été refusée et la date butoir devant le tribunal de commerce de Saint-Denis a été fixée au mercredi 13 décembre prochain.