Violences urbaines : qui va payer le coût des dégradations ?

Parmi les cibles des fauteurs de trouble, des véhicules de particuliers...
Véhicules, commerces, poubelles... autant d'items dégradés ou détruits ces dernières nuits dans plusieurs villes de l'île. Ces dégâts ont un réel coût. Mais qui les prend en charge ? On fait le point.

Véhicules, poubelles et mobilier urbain, ces derniers jours ont nourri les feux allumés par des fauteurs de trouble dans plusieurs villes. Certains commerces ont été vandalisés et cambriolés. 

Regardez le reportage de Réunion La 1ère : 

Commerces dégradés, véhicules et poubelles incendiés... Qui paie les dégâts causés ces dernières nuits ? On fait le point

Mais qui va payer le coût de ces multiples dégradations ? James Huet, représentant du comité des assureurs Réunion-Mayotte, l'assure : "toutes les équipes sont en place au niveau des compagnies et mutuelles d'assurance pour répondre au mieux aux besoins de nos assurés". Depuis le début de la semaine, des expertises sont réalisées sur les véhicules ou encore les commerces endommagés.

Car les assureurs se trouvent en première ligne pour l'indemnisation des personnes impactées, en tout cas celles qui ont souscrit à un contrat leur offrant les garanties nécessaires. 

Pas d'assurance, pas d'indemnisation

C'est pourquoi ceux qui ne sont pas assurés n'auront aucune aide si leur véhicule a été incendié lors de ces dernières nuits. "Si vous avez un véhicule incendié et pour lequel vous n'avez pas d'assurance incendie, l'indemnisation ne pourra pas se faire, vous ne pouvez pas vous retourner contre votre assureur", explique James Huet. 

Une indemnisation en fonction des garanties souscrites 

Alors comment s'assurer d'être indemnisé en cas de dégâts sur sa voiture ? "L'indemnisation va se faire en fonction des garanties souscrites, donc il est important de vérifier les contrats", répond James Huet. Il faut d'abord s'assurer que le véhicule est assuré contre les risques et dommages, dont font partie les incendies, les vols et les bris de glace, explique le représentant du comité des assureurs Réunion-Mayotte. Dans le cas où le véhicule, garé dans le parking, a été dégradé, "c'est du vandalisme, qui est sous la garantie tous risques".

Déclarer les préjudices au plus tôt 

Quoi qu'il en soit, l'indemnisation va se faire en fonction d'une franchise prévue au contrat, et une partie pourra encore être à la charge du propriétaire du véhicule. 

L'assureur rappelle par ailleurs que l'assuré a cinq jours pour faire sa déclaration en cas de véhicule dégradé, "le plus tôt possible", en indiquant le préjudice subi. 

Vers une future hausse des primes d'assurance 

De quoi faire flamber le prix des assurances ? "C'est trop tôt encore pour le dire. On n'a pas encore fait l'évaluation des sinistres. On ne peut pas dire qu'il y aura une répercussion immédiate sur les primes d'assurance, mais les assureurs vont assimiler cette charge financière", répond James Huet. 

Des commerces impactés 

Il y a certes les voitures incendiées, mais il y a aussi de nombreux commerces qui ont subi des dégradations, voire des vols.

De l'avis de Philippe Jean-Pierre, économiste, "des émeutes, de l'instabilité, ce n'est jamais bon pour le développement d'une économie". Car "ces coûts, il va bien falloir que quelqu'un les paie", dit-il. 

Pas de mécanisme d'indemnisation par les pouvoirs publics

Dans le cas où les dommages ne sont pas prévus dans les contrats d'assurance, et donc non pris en charge par l'assureur, c'est le commerçant qui en a pour ses propres frais, explique-t-il.

Sauf si un mécanisme d'indemnisation tel un fonds de garanti est mis en place par les pouvoirs publics, comme cela a par exemple été le cas après les attentats il y a quelques années. Or, à ce jour, le gouvernement n'a pas fait d'annonce en ce sens. 

La préfecture met en place un "guichet unique" 

La préfecture, ce mardi, a néanmoins annoncé l'ouverture d'un "guichet unique pour soutenir les commerces impactés à La Réunion". Ces derniers sont invités à se rapprocher du conseiller à la sortie de crise Gérard Rivière (0262 90 89 26 / 0692 74 90 99 / codefi.ccsf974@dgfip.finances.gouv.fr). 

Reports de charges sociales et compréhension des banques

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire et la ministre déléguée chargée des Petites et moyennes entreprises Olivia Grégoire, ont annoncé plusieurs mesures de soutien à destination des commerces concernés par les pillages et dégradations lors des violences urbaines de ces derniers jours. 

Des reports de charges sociales et fiscales peuvent être demandés par les entreprises qui seraient mises en difficulté. Il a aussi été demandé aux banques de faire preuve de compréhension vis-à-vis des échéances bancaires, et aux assureurs de faire parvenir les indemnisations le plus rapidement possible, et de réduire au maximum le montant des franchises. 

Un soutien de la CCIR 

La Chambre de commerce et d'industrie de La Réunion (CCIR) a également mis en place un dispositif pour accompagner les entreprises victimes de dégradations pendant les violences urbaines. 

Les précisions de Pierrick Robert, président de la CCIR, sur Réunion La 1ère : 

ITV Pierrick Robert

Des dépenses pour les collectivités aussi 

Quid des biens publics, notamment les poubelles dont un bon nombre ont flambé sur les trottoirs et chaussées ? "Lorsque ces dégradations impactent la voie publique, ou des matériaux publics comme les poubelles ou les abribus, il faut très vite refaire des travaux, réhabiliter ces biens publics, et c'est la collectivité qui en a la responsabilité qui le prend en charge", précise Philippe Jean-Pierre. Des opérations qui peuvent très vite faire flamber les dépenses, impacter les budgets des collectivités, et se traduire par une augmentation de la fiscalité, fait remarquer Philippe Jean-Pierre. 

A la Cinor, communauté de communes dont fait partie Saint-Denis, qui a connu plusieurs nuit de violences, on chiffre les dégâts à 10 000 euros, rien que pour les poubelles brûlées. 

Le "coût indirect" des dégâts

L'économiste souligne pour finir le "coût indirect" que peuvent avoir de tels épisodes, sur l'image d'un pays, d'une région, d'une ville. 

"Il n'est jamais bon d'avoir régulièrement ces instabilités. C'est pour ça qu'on a envie de dire à tous ceux qui ont la tentation de casser qu'ils se mettent une balle dans le pied. Il n'y a rien de pire que de dégrader son propre environnement, car la stabilité est le meilleur des remèdes" 

Philippe Jean-Pierre, économiste