Être jeune et non-binaire, un défi à Saint-Pierre et Miquelon ?

Dans le cadre de la journée internationale contre les LGBT-phobes du 17 mai, nous avons rencontré un jeune non-binaire. Un étudiant originaire de Saint-Pierre et Miquelon que nous appellerons Jordan.

La société évolue et de plus en plus de personnes parviennent ou souhaitent parvenir à s’affranchir du modèle hétéro normatif. Une expression souvent utilisée, mais ça veut dire quoi être en dehors du "modèle hétéro normatif" ? Qu'est-ce que cela implique pour la personne, dans sa vie, pour son ressenti, dans sa relation aux autres ?

Pour en savoir davantage, rien ne vaut un exemple concret. Rien ne vaut le récit d'une personne dont c'est la vie. C'est pourquoi nous avons contacté Jordan, qui réside actuellement en Métropole. Né en tant que fille, il raconte son histoire, et il n'y va pas par quatre chemins. Si la société et les moeurs évoluent, il explique tout de même que la non-binarité n’est pas vraiment connue et encore moins dans l’archipel. Pour lui, être non-binaire, c’est « soit se sentir ni homme ni femme, soit les deux à la fois ou bien un entre deux, c’est assez large en réalité ».

À lire aussi : L'association UNII veut briser les tabous autour de la diversité sexuelle à Saint-Pierre et Miquelon

En France, après des échanges avec des personnes de la communauté LGBT, l’étudiant se définit « gender fluid ». Il explique que ses amis l’ont « aidé à s’assumer ».

Un besoin de reconnaissance

 

Jordan souhaiterait « rencontrer des personnes non-binaires « out » sur l’archipel », c’est-à-dire des personnes comme lui mais qui s’assument au grand jour. L’étudiant estime « qu’il y a beaucoup de jeunes qui n’osent pas faire leur coming out ».

Le Saint-Pierrais aurait aimé que l’association UNII, qui participe à la visibilité des LGBT à Saint-Pierre et Miquelon, naisse avant son départ pour les études. Mais il se dit « heureux que les générations futures puissent s’appuyer sur la structure. »

Jordan évoque les problèmes liés aux constructions de genres dans la langue française. Il aimerait utiliser le pronom « iel » mais a conscience de la difficulté à l’employer donc il le remplace par le masculin « il ».

Pour lui, tout est lié à un manque de visibilité : « plus on témoigne, plus on donne la possibilité aux gens de nous comprendre. ». Jordan raconte qu’enfant, il souhaitait « devenir un garçon » mais « ce n’était pas exactement ce qu’il voulait ». Jordan se sentait membre de la communauté LGBT, mais « n’osait pas en parler » autour de lui.

Un contexte particulier dans l'archipel

 

Pour Jordan, les particularités de l’archipel, telles que la promiscuité, n’arrangent rien. Il explique qu’en France « si je me prends une insulte c’est par un inconnu que je ne reverrai jamais. À Saint-Pierre, c’est différent. »

À lire aussi : Être adolescentes et LGBT à Saint-Pierre-et-Miquelon : "le plus difficile ? Être soi-même"

La Métropole est un véritable refuge pour le Saint-Pierrais puisqu’il s’est retrouvé dans un groupe d’amis avec beaucoup de personnes « comme lui ». Il avoue se sentir « accepté » en France. Mais il a « extrêmement peur de ne pas être compris » dans l’archipel et dit craindre « les moqueries ». « J’ai vraiment l’impression que je ne ferai jamais mon « coming-out » complètement parce que je n’ai pas envie de subir tout ça. » À Saint-Pierre le jeune raconte avoir subi des railleries concernant son style. Il ne veut pas que cela se reproduise. « J’ai juste envie de vivre tranquille ».

Des personnalités prennent la parole

 

Dernièrement, plusieurs personnalités ont amené le sujet de la non-binarité au coeur de l'actualité afin de lever les tabous. Parmi elles, Demi Lovato s'est tout récemment déclarée non-binaire à l'issue "d’un très long travail de guérison et d’introspection". Une démarche dans laquelle l'avait notamment précédé Ellen Page, qui se fait désormais appeler Elliot Page, mais aussi le chanteur britannique Sam Smith ou encore Lachlan Watson, qui interprète un personnage transgenre dans la série Netflix Les aventures de Sabrina.