À Saint-Pierre, ce ne sont pas les madeleines mais les petits pains de chez Carrère qui ravivent de doux souvenirs d'enfance et ce, pour plusieurs générations.
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Un petit pain généreux, sucré et collant dont la recette perdure. Aujourd'hui encore on retrouve ces petits pains dans plusieurs points de vente.
Alors qu'il existe depuis les années 50 et que la recette est passée par plusieurs établissements, il reste pour tous "le petit pain de chez Carrère".
Monique Carrère s'est éteinte en ce mois d'avril à l'âge de 88 ans. Avec son époux Pierre, dit Pierrot, disparu au début de l'année 2020, ils confectionnaient et vendaient cette viennoiserie, et d'autres pâtisseries dans le tambour de leur maison jusqu'en 1997.
La recette du succès
Tout débute avec Francine Briand, la mère de Monique Carrère. En 1953, alors veuve, il lui faut nourrir ses six enfants et donc trouver un gagne-pain. Elle s'approprie une recette dans le livre de son époux qui était boulanger. Lui ne faisait que du pain et dans les autres boulangeries aussi le choix à l'époque est assez restreint. Francine modifie les ingrédients et propose ce mets à la vente, au départ dans la maison de famille située rue Marcel Bonin et dans quelques magasins.
À l'époque, on les vendait à la douzaine.
Pascal Carrère, fils de Monique Carrère et petit-fils de Francine Briand
Tout le monde met la main à la pâte
À la fin des années 70, Monique, qui aide sa mère à préparer les petits pains régulièrement et apprend donc le métier, prend la suite.
"Mon job à moi, c'était de faire les pâtons" se souvient Pascal Carrère. Et quand il parle de l'affaire familiale c'est avec passion.
De nombreux souvenirs lui reviennent en mémoire. Les trois enfants de Monique et Pierrot participent : Jean-Pierre, Pascal et Brigitte.
Les spécialités gravées dans les mémoires resteront les petits pains de chez Carrère ainsi que son mille-feuille dont la crème pâtissière et le glaçage étaient posés à la dernière minute pour garantir la fraîcheur de la pâte feuilletée. À son actif également : les feuilletés, les tartelettes aux pommes et aux bleuets, les pains d'épices, les carrés aux dates, les brioches, sans oublier les gâteaux Reine Elisabeth à base de noix et de dattes. Et j'en oublie.
Pascal Carrère
Certains membres de la famille n'hésitent pas à prendre des congés aussi pour aider en période de fête quand l'activité s'intensifie.
Une affaire de passion
En 1998, Xavier Largerie achète la maison Carrère avec la recette de ces petits pains. Alors comptable, il souhaite réaliser une reconversion professionnelle et se lance ainsi dans la pâtisserie.
J'étais ébahi de voir comme elle travaillait. Elle était partout.
Xavier Largerie, ancien pâtissier
Monique Carrère garde un œil bienveillant sur l'affaire. "Madame Carrère disait que je les faisais mieux qu'elle. Je n'y crois pas mais c'était gentil", se remémore avec émoi Xavier Largerie. "C'était du travail de 15-16 heures par jour" ajoute-t-il.
La recette a été rachetée ensuite par l'établissement La Ruche. Aujourd'hui encore, malgré le changement de propriétaires, les petits pains y sont encore préparés puis distribués en magasins.
Et même s'ils sont passés entre plusieurs mains, ces petits pains restent pour beaucoup ceux de chez Carrère. C'est aussi le constat et la fierté de Pascal Carrère : "On a arrêté il y a 26 ans et les gens s'en rappellent encore."