"Ce n'est pas évident à expliquer, pourtant c'est assez simple : la pansexualité c’est l’attirance spirituelle et romantique pour une personne, indépendamment de son sexe, de son orientation de genre ou amoureuse" explique tout d’abord la jeune femme.
À 25 ans, Matilda est comédienne professionnelle. D’origine haïtienne, elle est arrivée en Guyane il y a 17 ans. Passionnée par la scène, elle fait des études d’arts dramatiques. Depuis l’obtention de son diplôme, cette artiste se produit dans des représentations théâtrales un peu partout dans le monde : dans les Caraïbes ou encore dans l’Hexagone. Mais c’est en Guyane qu’elle réside.
"Je suis tombée amoureuse de Saint-Laurent du Maroni et depuis, je m’y suis installée. Quand je ne suis pas en tournée, je suis dans l’Ouest, je donne des cours de théâtre, de danse, d’éloquence, et de gestion de la colère, à tous les niveaux : collèges, lycées, écoles, et même auprès des adultes".
"Je me sens au clair avec moi-même"
C’est durant ces années lycées que Matilda se met au théâtre. Elle s’interroge également sur sa sexualité, sans pouvoir encore la définir. Elle se sent déjà différente des autres, aimant découvrir de nouvelles choses.
Au lycée, j’étais en terminal littéraire et on était vraiment la classe marginale, on avait une liberté d’esprit, une liberté de vivre que les autres n’aimaient pas trop, surtout que moi, je faisais du théâtre, j’avais vraiment la tchatche dans l’âme.
Matilda Pierre
Un jour lors d’un jeu entre amis, elle embrasse une fille pour la première fois et ressent un sentiment nouveau. "Je me suis dit : il y a quelque chose en toi qui est en train de se passer. Pour moi, c’était quelque chose de très positif parce que ça m’ouvrait vers autre chose. Du coup, je me suis autorisée à m’inscrire sur un site où j’ai pu rencontrer d’autres femmes".
À lire aussi : VIDÉO. Mois des fiertés 2024 : "on m’a lancé des bouteilles parce que je suis queer et non binaire"
Matilda se pense alors bisexuelle, mais elle ne se retrouve pas dans cette identité. En faisant des recherches, elle découvre la pansexualité. Elle peut enfin poser un mot sur son ressenti.
Moi, je suis attirée par l’âme, par l’identité de la personne, par un sourire, par ce que la personne provoque en moi. Femme, homme, trans, jeune, âgé, peu importe. Je me sens vraiment au clair avec moi-même, je me sens vraiment vivante depuis que je me dis que je suis pansexuelle.
Matilda Pierre
"Je déteste le concept du coming-out"
Le coming-out (raccourci de "coming out of the closet", en français "sortir du placard") désigne le moment de l’annonce volontaire de son orientation sexuelle ou de genre à son entourage. Un moment redouté par beaucoup de membres de la communauté LGBTQIA+. Pour d’autres, c’est une étape importante du processus d’acceptation.
Matilda n’a jamais ressenti le besoin de faire un coming-out, une partie de sa famille ayant constaté d’elle-même ses préférences amoureuses. Cela ne lui a pas posé de problème. "Moi, je déteste le concept du coming-out, du coup, je n’en ai jamais fait. Mon frère n’a jamais dit “maman, assieds-toi à table, il faut que je t’annonce que je suis hétérosexuel. J’estime que je n’ai pas à faire ça. Je n’ai pas choisi de venir au monde, je veux au moins choisir comment je vais vivre".
"Ensemble, nous pouvons accomplir quelque chose de significatif"
Matilda est un membre actif de l’association YanaColorz, située à Saint-Laurent du Maroni. Créée en 2019, la structure lutte contre les discriminations LGBTQIA+ et effectue un travail de sensibilisation et de prévention. Leur objectif est de créer une communauté de personnes aux expériences semblables, un endroit sûr contre les violences subies dans l’espace social.
"Ensemble, nous pouvons accomplir quelque chose de significatif, donner une voix commune à nos expériences" détaille Matilda.
Savoir qu’il existe un groupe qui m’accepte et comprend ma différence, c’est comme voir des étoiles filantes apparaître dans le ciel. À chaque étoile, je fais un vœu de bonheur.
Matilda Pierre
Son message à la jeunesse : "écoutez-vous un maximum, écoutez vos émotions, faites-vous confiance" insiste-t-elle, "c’est le plus important".
Pour aller plus loin, vous pouvez visionner la collection de portraits sur le mois des fiertés en cliquant ici.