Nous sommes en pleine saison de la production de "mei", le fruit de l'arbre à pain. Une nourriture aussi ancienne que les polynésiens et leurs ancêtres austronésiens. Un fruit à la chair farineuse qu'ils ont emporté avec eux dans la conquête du Pacifique.
"C'est un aliment bien connu à Wallis qui a fait partie de notre alimentation depuis toujours" penché sur le Sanualio pose les fruits à pain sur les braises. Il surveille leur cuisson. "Aujourd'hui" poursuit-il "il est préparé occasionnellement. Pourtant, c'est simple et rapide!"
Chaque jour il cuit des fruits à pain pour sa famille, pour ses amis. Il renoue -peut-être involontairement- avec une culture millénaire. Un lien qui attache les polynésiens au fruit à pain.
Ils avaient appris à le préparer pour le conserver pendant des mois -voire plus d'un an. Cuits à l'étouffée ou sous forme de pâte fermentée.
L'arbre les a sauvés plus d'une fois de la famine. Lors des grandes traversées ou après des cyclones.
Le fruit à pain est au coeur de cette révolte. Le capitaine Blight -qui avait commandé "le Résolution" lors d'une des expéditions de James Cook- est choisi par le président de la Royal Society de Londres pour aller chercher des arbres à pain. Direction, les îles de la Société. Les arbres à pain y poussent en abondance.
Derrière cette expédition, une idée simple. Les arbres à pain prolifèrent et s'épanouissent sous les tropiques. Et des tropiques du Pacifique aux tropiques des Caraïbes, l'adaptation devrait se faire aisément.
Le "Bounty", un petit navire de 215 tonneaux accoste dans la baie de Matavai à Tahiti le 26 octobre 1788. Les hommes sont fatigués. Le capitaine commence sa mission de collecte de fruits à pain quelques semaines après son arrivée. Il a à son bord un jardinier... Tout était prévu.
William Blight, dans son récit "Voyage à la mer du sud" raconte cette quête de fruits à pains. Il avance avec prudence de crainte d'essuyer un refus.
Rapidement il est soulagé "J'avais envoyé Nelson et son aide chercher des plantes et je ne fus pas peu satisfait d'apprendre de leur bouche qu'il serait facile de remplir l'objet de ma mission". Ce qui n'empêche pas ce jeune capitaine de 34 ans -mais qui a déjà l'expérience d'un précédent voyage- de répéter les consignes : "J'ai enjoint à tout l'équipage de ne pas faire connaître l'objet du voyage, de peur que cette connaissance n'augmentât le prix des arbres à pain ou ne fit naître quelque autre difficulté"
Tellement encombrante qu'il ne peut tirer les coups de canon habituels au moment de mettre le cap sur le large. "Tina (ndlr son ami chef coutumier) avait demandé que je le saluasse de quelques coups de canon en quittant le vaisseau; mais je ne pus accorder sa demande, de peur de déranger les plants."
On imagine en souriant le "tableau" insolite d'un bateau rempli jusqu'à ras-bord de plants fruits à pain... Et la tête des marins pourtant habitués à vivre dans un espace confiné...
Les mutins jettent les plants d'arbre à pain par-dessus bord... et cap retour sur les délices de Tahiti...
Il faudra une deuxième mission des années plus tard pour en rapporter dans les Caraïbes. L'arbre à pain fait partie aujourd'hui de la végétation des Antilles au même titre que les manguiers, les Bougainvilliers ou l'hibiscus.
Aujourd'hui à Wallis comme à Futuna le fruit à pain continue d'avoir une place importante dans l'alimentation. Selon les années cet arbre "miraculeux" produit jusqu'à trois fois. "Lorsque c'est la période une trop grande quantité se perd" constate Sanualio "Il y en a donc pour nous et pour les bêtes. Pendant cette période je ne vais quasiment plus acheter des sacs de granulés pour les cochons ni de riz pour nous".
Une production qui reste à un niveau familial, à Wallis et à Futuna. Pas de plantation, pas de transformation, pas de commercialisation comme à Tahiti.
L'exemple de Tahiti montre que les pistes de développement existent pour ce fruit millénaire de nos îles. Question de choix et d'organisation.
Chaque jour il cuit des fruits à pain pour sa famille, pour ses amis. Il renoue -peut-être involontairement- avec une culture millénaire. Un lien qui attache les polynésiens au fruit à pain.
Une nourriture ancestrale de base
Avec le taro et l'igname le fruit à pain constitue dès les temps les plus reculés la nourriture de base de ces grands navigateurs austronésiens, les ancêtres des Polynésiens partis il y a 7000 ans des côtes méridionales de la Chine. Contrairement aux deux légumineuses le fruit à pain -originaire de Malaisie- a probablement été embarqué lors de la longue migration d'ile en île dans le Pacifique.Ils avaient appris à le préparer pour le conserver pendant des mois -voire plus d'un an. Cuits à l'étouffée ou sous forme de pâte fermentée.
L'arbre les a sauvés plus d'une fois de la famine. Lors des grandes traversées ou après des cyclones.
"Révoltés du Bounty et arbre à pain
L'arbre à pain rencontre l'histoire des grandes navigations à la fin du XVIIIè siècle. Avec l'expédition du "Bounty" commandée par le capitaine Blight. Le film hollywoodien "les révoltés du Bounty" rendra célèbre cette mutinerie à bord d'un vaisseau de "Sa Majesté". Le meneur est le second, Christian Fletcher incarné dans le fim par l'acteur Marlon Brando.Le fruit à pain est au coeur de cette révolte. Le capitaine Blight -qui avait commandé "le Résolution" lors d'une des expéditions de James Cook- est choisi par le président de la Royal Society de Londres pour aller chercher des arbres à pain. Direction, les îles de la Société. Les arbres à pain y poussent en abondance.
Derrière cette expédition, une idée simple. Les arbres à pain prolifèrent et s'épanouissent sous les tropiques. Et des tropiques du Pacifique aux tropiques des Caraïbes, l'adaptation devrait se faire aisément.
Du Pacifique à l'Atlantique
Dans les Caraïbes -colonisés dès le XVIè siècle- les Anglais ont des intérêts importants dans de grandes propriétés coloniales... La culture des épices et surtout celle de la canne à sucre. La production du sucre réclame une main d'oeuvre d'esclaves importante. Et il faut les nourrir -et si possible avec de la nourriture bon marché.... L'arbre à pain n'existe pas sous ces tropiques atlantiques. D'où l'idée d'aller chercher cette "manne Pacifique" et de la planter de l'autre côté du globe.Le "Bounty", un petit navire de 215 tonneaux accoste dans la baie de Matavai à Tahiti le 26 octobre 1788. Les hommes sont fatigués. Le capitaine commence sa mission de collecte de fruits à pain quelques semaines après son arrivée. Il a à son bord un jardinier... Tout était prévu.
William Blight, dans son récit "Voyage à la mer du sud" raconte cette quête de fruits à pains. Il avance avec prudence de crainte d'essuyer un refus.
Rapidement il est soulagé "J'avais envoyé Nelson et son aide chercher des plantes et je ne fus pas peu satisfait d'apprendre de leur bouche qu'il serait facile de remplir l'objet de ma mission". Ce qui n'empêche pas ce jeune capitaine de 34 ans -mais qui a déjà l'expérience d'un précédent voyage- de répéter les consignes : "J'ai enjoint à tout l'équipage de ne pas faire connaître l'objet du voyage, de peur que cette connaissance n'augmentât le prix des arbres à pain ou ne fit naître quelque autre difficulté"
1015 plants d'arbre à pain embarqués
Le "Bounty" restera cinq mois amarré à Tahiti. "Tous les plants furent embarqués" écrit le capitaine Blight. Et de préciser "ils remplissaient 774 pots, 39 cuves, et 24 boîtes. Le nombre de plants d'arbres à pain était de 1015. Outre une multitude d'autres plants". Le navire lève l'ancre le samedi 4 avril 1789 chargé de son encombrante cargaison...Tellement encombrante qu'il ne peut tirer les coups de canon habituels au moment de mettre le cap sur le large. "Tina (ndlr son ami chef coutumier) avait demandé que je le saluasse de quelques coups de canon en quittant le vaisseau; mais je ne pus accorder sa demande, de peur de déranger les plants."
On imagine en souriant le "tableau" insolite d'un bateau rempli jusqu'à ras-bord de plants fruits à pain... Et la tête des marins pourtant habitués à vivre dans un espace confiné...
La révolte des marins contre les fruits à pain
Pour les quarante-six hommes de l'équipage la place entre les pots est extrêmement réduite... Il faut ajouter que pendant ces cinq mois une partie d'entre eux avait noué des relations amoureuses avec des Tahitiennes. L'intransigeance de l'excellent marin qu'était le capitaine Blight fera le reste. Le "cocktail" se révèle explosif! et la mutinerie éclate . Le 28 avril, au large des Tonga, le capitaine Blight est mis dans une chaloupe avec dix-huit hommes d'équipage.Les mutins jettent les plants d'arbre à pain par-dessus bord... et cap retour sur les délices de Tahiti...
Il faudra une deuxième mission des années plus tard pour en rapporter dans les Caraïbes. L'arbre à pain fait partie aujourd'hui de la végétation des Antilles au même titre que les manguiers, les Bougainvilliers ou l'hibiscus.
Aujourd'hui à Wallis comme à Futuna le fruit à pain continue d'avoir une place importante dans l'alimentation. Selon les années cet arbre "miraculeux" produit jusqu'à trois fois. "Lorsque c'est la période une trop grande quantité se perd" constate Sanualio "Il y en a donc pour nous et pour les bêtes. Pendant cette période je ne vais quasiment plus acheter des sacs de granulés pour les cochons ni de riz pour nous".
Une production qui reste à un niveau familial, à Wallis et à Futuna. Pas de plantation, pas de transformation, pas de commercialisation comme à Tahiti.
L'exemple de Tahiti montre que les pistes de développement existent pour ce fruit millénaire de nos îles. Question de choix et d'organisation.