Affaire Broadband Pacific : le territoire condamné

La collectivité de Wallis et Futuna est condamnée par la justice à payer 296 millions de Francs pacifique (2,5 millions d’euros). Une somme énorme pour ce petit territoire français du Pacifique. Retour sur dix ans de procédure.
Le 18 mai 2009, le préfet de l’époque, Philippe Paolantoni, signe un arrêté, en tant que chef du Territoire. Il autorise la société Broadband Pacific à établir et à exploiter un réseau de communications électroniques sur l'archipel, pour une durée de cinq ans. Broadband demande alors à se connecter au réseau du Service des Postes et Télécommunications, mais le SPT ne répond pas.

La société saisit alors la justice, pour faire constater le manque à gagner. Après une longue procédure et plusieurs rebondissements judiciaires, le 5 novembre dernier, la cour administrative d’appel de Paris a donc décidé de condamner le Territoire à payer 296 millions de Francs à Broadband.   

Une faute commise par le préfet

Voilà pour le volet judiciaire. Mais il y a un aspect aussi très politique. Car à l’époque, le préfet Philippe Paolantoni a décidé seul, sans consulter le conseil du territoire ni même les élus. Et dans sa décision, la cour administrative d’appel de Paris, cible clairement la décision, « les décisions fautives de l’administrateur supérieur ».

Consulter l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris ici.

En clair, le Territoire doit payer pour une faute commise par le préfet... Comment réagissent les élus de l’AT ? Pour honorer cette facture, il faudrait, par exemple, renoncer tout investissement, couper dans les dépenses de fonctionnement.
 

"Une situation très injuste"

 
L’ex président de l’assemblée, David Vergé, a même évoqué en séance publique, le risque de "mise sous tutelle du Territoire par l’Etat" dans une "situation très injuste". Et par la voix de Mikaele Kulimoetoké, l’opposition estime que "ce n’est pas au Territoire de payer pour une faute qu’il n’a pas commise". 

Que dit l’Etat ? Officiellement, l’Administration supérieure, autrement dit la préfecture, ne s’exprime pas sur une procédure judiciaire toujours en cours. Mais nous nous sommes procuré un courrier écrit le 12 novembre dernier, par l’administrateur supérieur de Wallis et Futuna, Thierry Quéffelec adressé au président de l’Assemblée territoriale.

Jusqu’au 5 janvier pour un ultime recours

Lui aussi constate une « très lourde condamnation ». Le préfet suggère plutôt au Territoire de se pourvoir en cassation. Mais attention, ce recours n’est pas suspensif. Il faudrait alors obtenir un sursis à exécution et pour les élus de l’assemblée territoriale, cela reviendrait à reconnaître leur responsabilité. Pour eux, c’est à l’Etat de payer pour la faute de son représentant.
 
Le Territoire a donc jusqu’au 5 janvier pour déposer un ultime recours. Sinon, Broadband pourra réclamer les 296 millions de Francs pacifique. 

Serge Massau, journaliste politique outremer, était l'invité du journal radio d'Antoine Defives. Ils ont pu échanger sur ce dossier : 

Extrait du journal radio du 14 décembre 2019 à 12h30


Résumé de cette affaire dans ce reportage télévisé signé Serge Massau et Jean-François Puakavase : 
 
©wallisfutuna