Brésil : un modèle économique précaire

A quelques mois de l'ouverture des Jeux Olympiques de Rio de Janeiro, le Brésil est plongé dans une profonde récession économique qui touche tous les secteurs. Le manque de confiance des investisseurs et des consommateurs compliquent les stratégies de sortie du marasme.
Chute des cours des matières premières
 
Comme ses pays voisins, le Suriname et le Venezuela, l'économie brésilienne souffre de la chute des cours des matières premières. Le Brésil dispose de ressources minières et agricoles variées et abondantes. L'exploitation du fer, du soja et du sucre a longtemps permis à la 6 ème puissance mondiale de réaliser des profits à l'exportation. Ces profits gigantesques ont dopé les importations jusqu'à submerger les exportations. Si bien que l'avantage initial s'est transformé en déséquilibre profond où convergent le surinvestissement global, le déficit abyssal des finances publiques et surendettement des ménages.
 
2015, l'année de tous les records
 
  • Le PIB de la première économie d'Amérique latine a chuté de 3,8%, du jamais vu au Brésil.
  • Le taux de chômage a grimpé à 12% et l'inflation annuelle a atteint 9,33% .
  • La dette publique représente 68% du Produit Intérieur Brut sur 2015 et pourrait grimper à 75% en 2016.
  • Enfin la croissance est négative à - 3,7 % , alors qu'en 2013 , elle était encore positive, à + 2,7%.
Le journal Folha de Sao Paulo rapporte qu' "on n’avait rien vu de similaire depuis le début des années 80, et avant cela, il faut remonter à 1930”. Cette récession s'annonce bien plus durable que les contractions de 2003 et 2009.
 
La dégradation de la situation budgétaire en 2016
 
Dilma Rousseff après sa réélection, a initié en 2015 des ajustements budgétaires. Mais ces derniers peinent à porter leurs fruits : l'inflation et le déficit public n'ont cessé de progresser.
Le contexte politique avec l'absence de majorité au congrès, a retardé l'application de mesures d'austérité. Depuis des mois le congrès rechigne à approuver de nouveaux impôts comme la taxe sur les opérations financières, bloquant le projet de révision de la fiscalité.
Dilma Rousseff a réagi. Pour ne pas creuser une dette publique jugée inquiétante par les économistes internationaux, la présidente a relancé les recettes exceptionnelles en vendant des actifs (centrales hydroélectriques, terrains et immeubles ). Elle est allée plus loin en coupant dans les dépenses de l'Etat y compris dans le secteur social.
Mais ce sursaut ne suffira pas à  contrecarrer le creusement du déficit budgétaire.
 
Faiblesse du modèle économique du parti travailliste
 
On sent déjà le renversement des tendances positives de la dernière décennie. La main d’œuvre non déclarée augmente, ainsi que le taux de chômage chez les jeunes.
On ne compte plus les journaux brésiliens qui critiquent la politique menée par le Parti des travaillistes (PT), le parti de la présidente Dilma Rousseff et de son prédécesseur Lula Da Silva. Le parti travailliste a tout misé sur les bénéfices des vents favorables internationaux, oubliant de consolider les grands piliers de son économie intérieure. L'industrie brésilienne souffre du manque d'infrastructures et de main d'œuvre qualifiée. Conséquence, les coûts augmentent plus rapidement que la productivité et la compétitivité des entreprises s'en trouve pénalisée.
Toujours au plan interne, la consommation des ménages, principal moteur de la croissance  souffre de la cherté du crédit et de la baisse du salaire réel en raison du niveau élevé de l'inflation.
C’est la preuve de la précarité du modèle du Parti travailliste.
 
L'Etat de Rio prend un décret d' "état de calamité"
 
Même si la situation est catastrophique, le décret sur « l’état de calamité » pris par Francisco Dornelles suscite la controverse.
Le gouverneur par intérim a justifié cette mesure inédite au Brésil par le risque de ne pas parvenir à financer les JO et les services publics.
Il a expliqué craindre un « effondrement imminent » de « la santé, de l’éducation, de la mobilité, de la sécurité publique et de la gestion environnementale ». Le gouvernement de l’Etat de Rio a prévu un déficit de 19 milliards de reais (près de 5 milliards d’euros) pour 2016. Les sites olympiques financés en partenariat public-privés par la mairie de Rio ne sont pas concernés par ces problèmes.
 
" L’Etat de Rio est le Venezuela du Brésil », commente Mauricio Santoro, professeur de sciencespolitiques à l’université de l’Etat de Rio. Les salaires de la police, des enseignants et des médecins, ainsi que les retraites, sont payés en retard.
 
Brasilia est venue à la rescousse du gouverneur de Rio en accordant une aide d'environ 750 millions d'euros. Une partie ira à la construction du métro. Cette aide doit encore être ratifiée par le Congrès.
Si ce décret est controversé c'est que depuis des années l'état de Eio exonéré  généreusement d'impôts des dizaines d'entreprises; ce joli cadeau s'élèverait à plusieurs milliard de réais, selon Marcus Bacellar, économiste à l’université fédérale de Rio.

 En attendant, l’état désastreux des finances de l’Etat de Rio pourrait compromettre le bon déroulement des futurs jeux olympiques. 

Des richesses minières et agricoles immenses