Témoignage de la maman de Sandra Martial, tuée il y a 15 ans

Famille de Sandra Martial, assassinée le 19 février 2008 (archives).
Sandra Martial est tel un symbole : il y a 15 ans, cette jeune femme de retour au pays bardée de diplômes a été tuée par deux jeunes Guadeloupéens oisifs, chômeurs et drogués. Ces derniers, lourdement condamnés, ont été remis en liberté depuis. La mère de la victime, elle, a pris perpétuité en termes de souffrance et de tristesse.

Le mardi 26 février 2013, Alrick Radjouki et Rony Gadjadhar ont été condamnés, en appel, à 20 ans de réclusion criminelle, pour le meurtre de Sandra Martial ; une peine plus sévère que celle prononcée en première instance, puisqu’ils avaient écopé de 18 ans de prison en 2011.

Aujourd’hui trentenaires, ils sont tous les deux libres. Ils ont bénéficié de remises de peine, après avoir purgé la peine de sûreté de rigueur. Aux yeux de la justice, ils ont payé leur dette à la société.

Mais la mère de la victime, Liliane Laquitaine, ne parvient toujours à digérer leur crime, le fait que les meurtriers soient désormais libres, ni même l’absence de poursuites contre les témoins qui n’ont rien fait pour aider sa fille.

Un crime atroce

Le 19 février 2008, Sandra Martial est morte par asphyxie, étranglée et étouffée par les deux hommes qui voulaient la voler. Elle était leur voisine, une jeune femme prometteuse, rentrée au pays récemment après de brillantes études dans l’Hexagone et qui venait d’obtenir une promotion dans la banque où elle travaillait. Sandra Martial avait 27 ans.

Elle rentrait chez elle, après une longue journée de boulot, quand les deux assaillants l’ont attrapée par surprise et conduite dans un appartement de son immeuble de Fonds Sarail, à Baie-Mahault ; c’est là que sa vie a été atrocement écourtée.

Les accusés, qui étaient sous l’emprise de drogues, avaient ensuite chargé son corps dans le coffre de sa propre voiture et l’ont abandonné dans des fourrés. Corps retrouvé enveloppé dans un drap.

Le ressentiment d’une mère

Liliane Laquitaine conseillère municipale de Basse-Terre, n’est plus que l’ombre d’elle-même, depuis ce funeste 19 février 2008.

La plaie est toujours là, le traumatisme est là, la douleur est là... ça fait partie intégrante de mon quotidien. On ne vit plus de la même manière qu’avant. On vit avec l’absence de Sandra, on vit avec les visites au cimetière. C’était mon enfant et on a tué mon enfant.

Liliane Laquitaine, maman de Sandra Martial (interrogée par Ronan Ponnet)

Pour cette maman éplorée, "la justice ne rend pas justice" à sa fille, puisque les deux meurtriers bénéficient d’un système leur permettant de "poursuivre leur vie tranquillement", bien avant d’avoir purgé les 20 ans de prison prononcés aux Assises.

Alrick Radjouki et Rony Gadjadhar n’ont jamais demandé pardon, souligne Liliane Laquitaine, pleine de ressentiment.

A aucun moment nous n’avons pu observer, dans leur posture, dans leur regard, une honte quelconque ; bien au contraire.

Liliane Laquitaine, maman de Sandra Martial (interrogée par Ronan Ponnet)

Sandra Martial a hurlé quand elle a été attaquée. Ses cris ont été entendus par les voisins présents dans l’immeuble. Mais nul n’a ouvert sa porte, nul n’a tenté de la sauver, au contraire. Cette réalité est aussi source de rancœur, pour la mère de la jeune femme.

L’indifférence totale. Les hurlements ont résonné dans la cage d’escalier. Les faits se sont produits au rez-de-chaussée, à 3-4 mètres d’un appartement, la résidente de cet appartement, qui était présente au moment des faits, n’a jamais ouvert sa porte ; bien au contraire, elle s’est calfeutrée. Une deuxième résidente au 2ème étage a avoué, beaucoup plus tard, qu’elle avait entendu les cris. Mais personne n’est sorti, personne n’a bougé, personne n’a sauvé Sandra.

Liliane Laquitaine, maman de Sandra Martial (interrogée par Ronan Ponnet)

Liliane Laquitaine rend régulièrement visite à sa fille Sandra, au cimetière de Gourbeyre. Elle lui parle, de ses préoccupations, de sa vie et de celle de sa sœur. Sandra, à jamais, fait partie de sa vie.