Pollution Chlordécone : réparez !!
Tel est l’intitulé d’une pétition mise en ligne le 30 avril dernier, sur le site Internet change.org, par les associations écologistes antillaises "Matinik Doubout - Gaoulé kont Chlordécone", "Lyannaj pou dépolyé Matinik" et "Vivre - Guadeloupe". Le but de leurs membres est de porter la voix de la société civile, qui n'est pas assez prise en compte dans cette affaire.
Le 24 avril, le Parquet général a demandé la confirmation du non-lieu, dans la procédure en appel.
Les organisations à l’origine de la pétition, font partie des plaignants dans ce dossier judiciaire. Ils contestaient déjà, en janvier 2023, la clôture de l’information judiciaire, après 15 ans d’enquête.
L’appel du non-lieu sera examiné le 10 juin prochain.
Pour rappel, la molécule Chlordécone, utilisée pour combattre le charançon dans les bananeraies des Antilles, a empoisonné les populations et durablement pollué les terres, les eaux et la faune de Guadeloupe et de Martinique. Le pesticide avait été autorisé dans ces territoires jusqu’en 1993 par dérogation, alors qu’il avait interdit en France hexagonale trois ans plus tôt.
On ne connaît qu’une partie des conséquences sanitaires de la contamination : les îles des Antilles françaises présentent par exemple un taux d’incidence du cancer de la prostate parmi les plus élevés au monde.
En 10 jours, la pétition a récolté un peu plus de 600 signatures. Les demandes des associations s’adressent aux parlementaires, au Gouvernement et au président de la République.
C’est un moyen de faire pression, explique le président de l’association "Vivre - Guadeloupe".
Les pétitions comme celle-là sont un moyen de compter nos forces et de donner la possibilité à une plus grande part de la population martiniquaise et guadeloupéenne et même, plus largement, hexagonale, de montrer que la voix de la société civile existe et qu’elle n’est pas suffisamment prise en compte dans les décisions judiciaires, ni même dans les propositions de loi (...).
Jean-Marie Flower, vulgarisateur scientifique et président de l’association "Vivre - Guadeloupe".
Qui sont les victimes du Chordécone ? Elles sont bien plus nombreuses que celles qui sont reconnues et prises en charge par les instances, à l’heure actuelle, selon les associations à l’origine de la pétition.
On a besoin d’une définition beaucoup plus large de la notion de victime de Chlordécone. Les victimes ne sont pas seulement celles qui sont tombées malades. Ce sont aussi ceux qui ont perdu leur travail (aquaculteurs, pêcheurs...), ceux qui ont eu des pertes économiques tout simplement pour ne pas avoir pu s’adapter face à cette pollution, ce sont aussi les personnes qui ont eu, à un moment donné, une chlordéconémie positive (...).
Jean-Marie Flower, vulgarisateur scientifique et président de l’association "Vivre - Guadeloupe".
Les procédures judiciaires, dans le dossier du Chlordécone, se poursuivent.
Pour les signataires, l’usage de la pétition permet surtout de faire bouger les lignes.
Quand on lance une pétition, on ne sait jamais combien de signatures on va faire. Mais on sait aussi, par exemple, que la chlordéconémie, qui coûtait au départ 150€, elle a fini par devenir gratuite, notamment, parce qu’il y a eu, pas une, mains plusieurs pétitions lancées en France hexagonale, en Guadeloupe, en Martinique, pour montrer qu’il y avait une attente forte de la société civile, pour que les lignes bougent.
Jean-Marie Flower, vulgarisateur scientifique et président de l’association "Vivre - Guadeloupe"
À défaut d’obtenir justice, les victimes du Chlordécone ont eu une consolation qui, certes, va dans le bon sens : le 29 février dernier, l’Assemblée nationale a reconnu symboliquement la responsabilité de l’Etat dans l’empoisonnement des Antilles.