Décès de l’historien Jean-Pierre Sainton

Jean-Pierre Sainton
La Guadeloupe a perdu, la nuit dernière, l’un de ses intellectuels, un historien de renom, un professeur qui a marqué d’une pierre blanche l’Université des Antilles et beaucoup écrit sur l’histoire de la Guadeloupe, en particulier sur les évènements de Mai 1967 : Jean-Pierre Sainton s’en est allé, à l’âge de 68 ans.

Le Docteur en histoire, professeur d’université et militant nationaliste Jean-Pierre Sainton est décédé, la nuit dernière, du lundi 21 au mardi 22 août 2023, à l’âge de 68 ans.
Son combat aura été d’inscrire la Guadeloupe dans son histoire. Homme de production scientifique, prolixe, il aura dirigé, écrit ou coécrit de nombreux ouvrages sur l’histoire de l’archipel. Il a notamment dirigé un ouvrage de référence : "Histoire et civilisation de la Caraïbe (Guadeloupe, Martinique, Petites Antilles)" aux Editions Karthala. L’homme avait la Guadeloupe chevillée au corps.

Un homme engagé. Il a été marqué par l’arrestation de son père, militant indépendantiste lors des évènements de Mai 1967. Un épisode qu’il va d’ailleurs retranscrire dans "Mé 67. Mémoire d’un évènement".
Jean-Pierre Sainton a été un fervent militant, au sein de l’Union populaire pour la libération de la Guadeloupe (UPLG), mais aussi de l’Association générale des étudiants guadeloupéens (AGEG).

Après avoir débuté ses études supérieures en Guadeloupe, le DEUG en poche, c’est à Nanterre qu’il va poursuivre en licence. De retour en Guadeloupe, il va passer son doctorat et devenir enseignant chercheur, habilité à diriger les recherches.
L’enseignant aura formé plusieurs générations d’étudiants et contribué à la mise en place d’une vraie filière d’histoire au Camp Jacob, à Saint-Claude, l’un des sites de l’Université des Antilles. Il va militer pour la transformation de cette antenne en véritable faculté.

Jean-Pierre Sainton avait fait valoir ses droits à la retraite depuis quelques mois.

De multiples hommages, à l’annonce de son décès

Julien Merion, lui-même enseignant à l’Université, nous parle de son ami Jean-Pierre Sainton, professeur d’histoire à l’Université des Antilles et, plus précisément, à la faculté Roger Thoumson de Saint-Claude, mais aussi un homme engagé :

Jean-Pierre est professeur, mais il y a une chose que beaucoup de gens ignorent : il est président de l’association des historiens de la Caraïbe. Et, à ce titre-là, il participe à toute une série de travaux sur la région. Et, Jean-Pierre, de ce point de vue est un chercheur émérite.

Julien Merion, politologue, enseignant à l’UA

Jean-Pierre Sainton était un homme de projets, puisqu’il avait une vision pour la Guadeloupe. Militant de la première heure, il aura beaucoup écrit sur Mai 1967 dans l’archipel.

C’était un intellectuel avec lequel je partageais énormément de réflexions sur la Guadeloupe (...). Ce qui me perturbe le plus, qui m’attriste le plus, c’est que c’était quelqu’un de projets, il avait des choses qu’il préparait, que nous préparions ensemble... et, donc ça s’arrête d’un coup (...).

Harry Broussillon, sociologue et ancien maire de Petit-Bourg.

Jean-Pierre Sainton a aussi milité pour l’insertion de la Guadeloupe dans son environnement caribéen.

Ce qui est intéressant chez lui, c’est qu’il a su faire la part entre la démarche militante et la démarche scientifique de l’historien. Il a inscrit l’histoire de la Guadeloupe dans le marbre et dans celle de la Caraïbe (...).

Fred Réno, professeur de Science politique à l’Université des Antilles, directeur du Centre d’analyse géopolitique et internationale (CAGI)

Jean-Marie Hubert, Maire de Port-Louis salue la mémoire d’un "éminent historien et d’un patriote dont l’engagement a permis de faire avancer la cause guadeloupéenne".

Ary Chalus, président du Conseil régional de la Guadeloupe, a aussi exprimé sa tristesse :

Ses recherches en histoire sociale, culturelle et politique de la Caraïbe francophone, en histoire comparée de la Caraïbe, et en histoire contemporaine du politique constituent des contributions essentielles. L’exécutif régional rend hommage à cet homme vertical, artisan de notre culture et gardien de notre patrimoine historique, qui a formé des générations de Guadeloupéens en enseignant notre histoire profondément humaine.

Ary Chalus, président de la Région Guadeloupe

Guy Losbar, président du Conseil départemental de la Guadeloupe, regrette ce "Grand Guadeloupéen", notamment connu pour "son infatigable volonté de transmettre son savoir au plus grand nombre" :

Profondément passionné, grand pratiquant d’arts martiaux, il incarnait l’image de la force tranquille. Sa grande sagesse, sa bonhomie naturelle et son humanité n’excluaient pas un regard juste sur notre archipel, et sur ses pistes d’évolution. Nous perdons aujourd’hui un grand Homme profondément ancré dans l’histoire sociale et politique de son territoire, déterminé à agir pour faire rayonner la Guadeloupe par la prise de conscience de ses immenses potentialités.

Guy Losbar, président du Département de la Guadeloupe

Serge Letchimy, président de la Collectivité territoriale de Martinique, déplore "le départ d’un éclaireur de notre Histoire".

Jean-Pierre Sainton a laissé une empreinte indélébile dans le domaine de l'histoire contemporaine, particulièrement pour ce qui est de l’histoire de la région Caraïbe, en tant que professeur éminent à l’Université des Antilles. Son dévouement à explorer et à comparer l'histoire sociale, culturelle et politique de la Caraïbe, en mettant en lumière les nuances de la Martinique et de la Guadeloupe, a contribué de manière significative à la compréhension de notre héritage commun. Cette histoire est celle de ce que nous sommes et de nos potentialités. Ses recherches inspireront les générations futures à apprécier et à préserver la richesse de notre culture caribéenne.

Serge Letchimy président de la Collectivité territoriale de Martinique

Autre hommage, ce jour, après le décès de Jean-Pierre Sainton : celui du Mouvman Kiltirèl Akiyo :

Hommage à l'historien Jean-Pierre Sainton