La Communauté d’agglomération Grand Sud Caraïbe (CAGSC) a été reconnue coupable, ce vendredi 22 novembre 2024, par le tribunal correctionnel de Basse-Terre, de déversement de substances nuisibles dans la mer, depuis la station d’épuration du bourg de Capesterre-Belle-Eau.
La collectivité a été condamnée à une amende de 375.000 euros, avec sursis ; elle ne payera donc pas cette somme. Cette peine, symbolique, doit être affichée dans les locaux de cet Etablissement public de coopération intercommunale (EPCI), durant deux mois.
Il s’avère qu’aujourd’hui la station d’où les méfaits ont été constatés est la propriété du Syndicat mixte de gestion de l’eau et de l’assainissement de la Guadeloupe (SMGEAG), gestionnaire du site depuis son installation, en septembre 2021.
L’amende avec sursis est prononcée pour sanctionner la CAGSC, tout en prenant en compte la population guadeloupéenne, qui ne saurait être pénalisée pour les infractions commises par la CAGSC, par le paiement d’une forte amende.
Extrait de la décision pénale – 22/11/2024
Un préjudice environnemental
Du 1er février 2018 au 31 août 2021, la CAGSC s’est rendue coupable de pollution, dans l’océan Atlantique. La décision pénale fait notamment référence à des "jet, déversement ou écoulement de substance nuisible dans les eaux souterraines, superficielles ou de la mer ayant des effets nuisibles sur la santé, la flore ou la faune".
Le tribunal souligne que la station d’épuration du bourg de Capesterre-Belle-Eau a été laissée à l’abandon. L’exploitation de cette installation, non conforme et qui rejetait des eaux polluées, a conduit à une mise en demeure préfectorale, datée d’une 12 novembre 2018, jamais suivie d’effet.
La plainte émane de deux citoyens, Alain Niberon et Louis-Noël Vial, ainsi que de l’Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS).
Sur l’action civile, les deux premiers plaignants ont été déboutés quant à leur demande d’indemnisation pour préjudice moral.
En revanche, un renvoi a été ordonné sur les intérêts civils, en ce concerne la CAGSC et l’ASPAS, devant le tribunal correctionnel de Basse-Terre, au 10 avril 2025, à 9h00.
L’héritage de Lucette Michaux-Chervry
Ce dossier est une partie de l’héritage de l’ancienne présidente de la Communauté d’agglomération, qui revient désormais à Thierry Abelli ; les faits reprochés remontent à une période antérieure au mandat du nouveau président de l’EPCI.
C’est en effet Lucette Michaux-Chevry qui avait fait construire la station d’épuration de Capesterre, en 2013, pour un montant total de plus de 13 millions d’euros ; un équipement qui n’a jamais fonctionné. Celle que l’on surnommait la "Dame de fer" avait elle-même déjà fait l’objet d’une lourde condamnation, en décembre 2020, notamment pour des faits de "déversement de substance nuisible dans les eaux souterraines, superficielles ou de la mer".
Je n’ai eu connaissance de cette situation qu’au moment de ma convocation devant le tribunal, bien après le transfert de la compétence "eau et assainissement" opéré en 2021. De plus, les mises en demeure émises par la préfecture, à ce sujet, ne m’ont été communiquées qu’a posteriori, rendant toute action corrective immédiate impossible.
Thierry Abelli, président de la CAGSC
Pour autant, Thierry Abelli n’a pas fui les responsabilités qui lui incombent aujourd’hui.
Lors de l’audience, j’ai tenu à reconnaître la réalité des faits, tout en expliquant aux magistrats le contexte particulier dans lequel la CAGSC se trouve aujourd’hui. J’ai notamment mis en avant les graves contraintes budgétaires de notre collectivité, qui ne lui permettent pas de supporter une sanction financière lourde, et souligné que nous ne sommes désormais plus compétents pour la gestion de l’assainissement.
Thierry Abelli, président de la CAGSC
L’actuel président de la collectivité salue la décision du tribunal : le sursis, "constitue un soulagement pour nos finances déjà fragiles".
Cette décision nous rappelle néanmoins l’importance d’une gestion rigoureuse et d’un suivi scrupuleux des dossiers hérités du passé. J’en appelle à une mobilisation collective pour que de telles situations ne se reproduisent plus à l’avenir. Mon engagement demeure de travailler dans la transparence et la responsabilité au service des intérêts de notre territoire.
Thierry Abelli, président de la CAGSC
La décision de justice de ce vendredi peut être considérée comme un avertissement, à l’attention des dirigeants du SMGEAG : il y a désormais jurisprudence en la matière, dans un territoire où il y a beaucoup à redire sur l’assainissement des eaux usées.