Les circuits courts sont propices au développement durable et aux opportunités économiques. Des agriculteurs convaincus approvisionnent donc directement les consommateurs. Ismaël Vouteau, exploitant dans les hauteurs de Capesterre-Belle-Eau, est de surcroît fier de sa méthode vertueuse de production
(Sujet vidéo réalisé par Jean-Marie Firpion)
Produire sans produits chimiques
C’est avec fierté qu’Ismaël Vouteau évoque son mode de production, sans produits phytosanitaires.Sur ses 7 hectares de terres, à la section « Mon repos » à Capesterre-Belle-Eau, cet exploitant agricole utilise des méthodes écologiques. Dès ses débuts dans le métier, il y a plus de 20 ans, sa démarche est en accord avec le principe de développement durable.
C’est ainsi que, quoiqu’il en coûte, en énergie, en patience, en moyens financiers et humains, il privilégie les cycles de la Lune, pour planter et la débrousailleuse, pour désherber.
Son exploitation s’apparente à un traditionnel jardin créole, version XXL. Ismaël pratique la rotation de cultures, c'est-à-dire qu’il varie les productions, sur ses parcelles, afin d’empêcher l’apparition d’insectes nuisibles. Ismaël Vouteau s’adapte aussi aux saisons : après la récolte des pitayas, il se tourne actuellement vers la culture des groseilles pays, à l’approche de la fin d’année. Ainsi se succèdent, d’une période à l’autre, patates douces, prunes café, fruits à pain, concombres, mangues, bananes, grenades, pommes lianes, pitayas, ananas, avocats, etc.
Un fonctionnement spéculatif, autour d’une grande diversité de produits, qui garantit une trésorerie, quelque-soit la période de l’année.
Nul besoin de forcer le moindre végétal à porter ses fruits ou légumes, hors saison, par l’usage de produits chimiques. Pour autant, Ismaël Vouteau n’est pas déclaré en tant qu’agriculteur bio. Il n’adhère pas à cette détermination. Il se dit « organique et naturel ».
Mutualiser les moyens et partager les expériences
Afin de supporter les coûts relatifs à ce mode de production durable, Ismaël et quelques confrères agriculteurs mutualisent leurs moyens. Ils sont douze à s’être regroupés en association, au sein du Bouquet du terroir Sud Guadeloupe (BTSG). Chacun participe aux travaux des autres, sachant qu’ils ont tous leur spécialité. C’est aussi ensemble qu’ils commercialisent leurs paniers de produits.Friands des expériences d’autrui, ce petit groupe d’exploitants n’hésite pas à accueillir ou à partir à la rencontre d’autres professionnels, hors de nos frontières, pour partager leurs savoirs mutuels. Ce, via une autre association : l’Agriculture paysanne écologique dans la Caraïbe (APECA), qui compte des adhérents de Cuba, Haïti, la République Dominicaine, Porto Rico et, bien sûr, de la Guadeloupe ; des agriculteurs de la Martinique, la Guyane et la Dominique seront bientôt des leurs également.
C’est ainsi qu’ils ont notamment amélioré leur façon de faire du compost, aux côtés d’agriculteurs Cubains.
Cette équipe soudée travaille, donc, dans le partage. Ses membres sont disposés à enseigner leurs techniques à tous ceux qui s’intéressent à la production saine.
S’émanciper des intermédiaires
Le confinement a eu un effet sur les habitudes d’approvisionnement des consommateurs : ces derniers ont davantage privilégié les circuits courts, durant cette période. C'est-à-dire qu’ils ont acheté leurs denrées alimentaires, soit dans les petits commerces, soit directement auprès des agriculteurs.C’est le client qui vient à la ferme ! Il ne doit pas y avoir de troisième main, dans notre circuit.
Une aubaine pour ces professionnels de la terre, dont certains ont organisé leur filière, pour mieux répondre à cette demande grandissante.
Ismaël Vouteau, lui, était déjà un adepte du circuit court.
C’est par l’intermédiaire du BTSG que ses produits frais de saison sont écoulés, au sein de paniers qui associent également les productions des autres membres de l’association, dont des spécialités issues de l’agro-transformation.
Rendez-vous est donné aux consommateurs, sur les exploitations, deux fois par mois.
Une affaire qui marche, puisque chaque professionnel parvient à tirer un salaire de cette formule.
Autre avantage : les circuits courts sont des leviers de développement durable. Ils mettent à mal la tendance qui conduit à la surconsommation et à l’importation de denrées, sources d’empreintes carbone. La qualité et la traçabilité des aliments sont aussi davantage garanties.
Or, en ces temps de pandémie et sur un territoire, tel que la Guadeloupe, menacé de risques naturels (ouragans, séismes, tsunamis…), l’autosuffisance alimentaire locale va de pair avec le renforcement de la résilience territoriale… Des enjeux clés totalement d’actualité.