En mars dernier, la Guadeloupe était victime de la sécheresse en raison d’un important déficit pluviométrique. Les agriculteurs et notamment ceux de la Grande Terre sont parmi les plus affectés.
Le 15 mars, le Conseil régional, en concertation avec le Département et les services de l’Etat, décide d’injecter l’eau du barrage dans le réseau d’irrigation agricole du conseil départemental. Or à cette date, la retenue n’est toujours pas officiellement mise en service. Et pour cause, il manque des données techniques. De fait, les ingénieurs vont profiter de ce lâcher d’eau pour vérifier le comportement de l’ouvrage et déceler la présence ou non d’éventuelles failles.
Le jour de l’ouverture des vannes, l’eau brute est conforme aux normes légales comme le montre le dernier prélèvement réalisé 13 jours plus tôt, soit le 2 mars. Le taux de chlordécone décelé est inférieur à 0,03 microgramme par litre, donc très largement sous le seuil légal de 0,1 microgramme par litre.
Le 23 mars, soit 9 jours plus tard, le conseil régional est destinataire des résultats d’une nouvelle analyse effectuée le 9 mars. Résultat qui montre un dépassement de près de 3 fois le seuil autorisée, soit 0,29 microgramme par litre. Décision est aussitôt prise de fermer la vanne du barrage et de refaire de nouveaux prélèvements pour comprendre l’origine de cette pollution.
Du 17 mars au 30 juin, Le Conseil Régional et le Département ont réalisé pas moins de 17 autres analyses au sortir de la ravine Zombi. Toutes ont montré des résultats très inférieurs au seuil légal.
De fait aujourd’hui, personne ne comprend ce que d’aucun qualifie comme une anomalie. D’autant que le terrain sur lequel a été construite la retenue d’eau a fait l’objet en février 2015 de 4 analyses de sol visant à vérifier la présence de polluants, pesticides et autre chlordécone. Les résultats de ces analyses démontraient l’absence de tout pesticide.
Alors question : combien de litres d’eau brute ont été injectés dans le réseau entre le 15 et le 23 mars ?
Le Conseil régional évalue l’apport de Moreau durant ces 2 jours à 25% de l’eau brute distribuée par Karukér’Ô, le gestionnaire de l’eau agricole pour le Conseil Départemental. Rapporté en litres, cela donnerait une estimation autour de 2000 m3.
Contactés, le Conseil Départemental et son délégataire se refusent à tout commentaire.
Aujourd’hui, où en est-on ?
La retenue d’eau de Moreau est fermée depuis le 23 mars dernier. Des travaux sont en cours afin de sécuriser la qualité de l’eau du barrage indique sans plus de détail le Conseil Régional.
Pour autant, deux spécialistes de l’eau que nous avons contacté estiment « que ce résultat du 9 mars est une aberration ». En clair, un résultat aussi élevé n’est possible qu’en cas de lessivage des sols, donc après de fortes pluies. Or, la Guadeloupe traversait une période de sécheresse qui a duré du 12 décembre 2022 au 25 mars 2023 comme nous l’a confirmé cet après-midi le service climatologie de Météo France.