La Guadeloupe, territoire français où le taux de recours à l’IVG est le plus important

Certes, l’avortement est un droit en France depuis 47 ans. Mais cet acte médical n’est pas anodin. On peut donc s’émouvoir du fait que la Guadeloupe enregistre une hausse du nombre d’IVG pratiquées annuellement et soit le territoire français où son taux est le plus élevé.

C’est, ce mercredi 28 septembre, la journée mondiale du droit à l’avortement.

En France, c’est la loi Veil adoptée il y a 47 ans, qui légalise et encadre le recours à cet acte médical. Depuis, il y a eu de nombreuses évolutions, comme l’interruption volontaire de grossesses (IVG) médicamenteuse, le remboursement à 100% pour toutes les femmes, ou encore la loi de mars 2022 qui rallonge le délai de recours possible à l’avortement à 16 semaines d’aménorrhée (au lieu de 12 précédemment) soit 14 semaines de grossesse.

Record du nombre d’IVG en Guadeloupe

En France hexagonale, sur près de 800.000 naissances, entre 200 et 250.000 IVG ont été pratiquées.

En Outre-mer, les chiffres de l’an dernier montrent que le taux de recours à l’IVG est en légère augmentation.

C’est en Guadeloupe qu’il est le plus élevé, soit 47,2 actes réalisés pour 1000 femmes de 15 à 49 ans. Dans l’archipel, sur 7 à 8.000 accouchements annuels, entre 4.000 et 4.500 IVG sont dénombrés, selon le docteur Maurice Manouana, gynécologue-obstétricien au « Pôle parents-enfants » du Centre hospitalier universitaire (CHU).

Une hausse difficile à comprendre, quand on sait qu’il existe de multiples moyens de contraception :

C’est multifactoriel. C’est-à-dire que c’est une population jeune, avec des difficultés sociaux-économiques, une utilisation de la contraception d’urgence qui est faible. Ce n’est pas tellement un problème d’accès à la contraception.

Dr Maurice Manouana, gynécologue-obstétricien au « Pôle parents-enfants » du CHU de la Guadeloupe

Les personnes peuvent en effet être accompagnées par la médecine scolaire, ou en centre de Protection maternelle et infantile (PMI), par leur médecin traitant ou pas une sage-femme. Les professionnels aptes à intervenir et à conseiller sont nombreux et répartis sur le territoire.
Par ailleurs, la pilule d’urgence dite aussi « pilule du lendemain » est gratuite.

Le Docteur Manouana parle donc de problème « d’observance et de recours » :

Les gens, notamment les jeunes, peuvent abandonner la contraception. Et c’est ça qui fait qu’il y a un taux aussi élevé. Toutes les tranches d’âge sont concernées, y compris les jeunes, mais la tranche d’âge la plus concernée est entre 17 et 35 ans.

Dr Maurice Manouana, gynécologue-obstétricien au « Pôle parents-enfants » du CHU de la Guadeloupe

Des progrès restent à faire, donc, pour éviter d’en arriver là.
La communication sur les modes de contraception en fait partie.

Il faut que les personnes aient une pilule d’urgence dans leur armoire à pharmacie, du point de vue du Docteur Manouana ; celle-ci est gratuite, pour les mineurs, en France, qu’il s’agisse d’un garçon ou d’une fille qui se présenterait en officine.

Les risques liés au recours tardif à l’IVG

L’IVG peut être pratiquée en milieu hospitalier, mais aussi en médecine de ville, ou encore dans le cabinet d’une sage-femme.

Le délai pour y avoir recours a été rallongé, en début d’année, notamment parce que les autorités ont déploré le fait que de nombreuses femmes partaient à l’étranger, pour le faire.

Pourtant, encore aujourd'hui, il y a toujours des femmes qui se présentent hors délai.

Malgré le fait que l’on soit passé à 14 semaines de grossesse, il y a quand même des gens qui viennent à 15/16 semaines ! Or, à ce stade-là, c’est quand même une technique un peu plus compliquée à faire.

Dr Maurice Manouana, gynécologue-obstétricien au « Pôle parents-enfants » du CHU de la Guadeloupe

Même si les complications sont rares localement, parmi les risques des IVG tardives, il y a les éventuelles déchirures du col, les plaies internes (à l’utérus ou à d’autres organes), ou encore les difficultés pour les grossesses futures ; les risques peuvent se révéler à court terme, ou à postériori.

Les professionnels mettent en garde contre ces difficultés, pour rappeler que l’avortement, si c’est un droit, n’est décidément pas un geste anodin.

Pour aller plus loin :

Le Dr Maurice Manouana, gynécologue-obstétricien au « Pôle parents-enfants » du CHU de la Guadeloupe était l’invité de Florence Péroumal, dans le journal radio du 28 septembre 2022 :

Le Dr Maurice Manouana invité de Florence Péroumal, en radio

A LIRE AUSSI : Pourquoi le recours à l’avortement est deux fois plus fréquent Outre-mer que dans l’Hexagone ?