Un rapport de la Cour des comptes zoome sur les activités de l’office antistupéfiants (OFAST) et des forces de sécurité, affectées à la lutte contre les trafics de stupéfiants, sur les exercices 2018 à 2023.
Dans le volet consacré aux Antilles-Guyane, ce document, daté du 26 septembre 2024, montre que les menaces ne cessent de croître dans ces territoires, particulièrement exposés. Il est notamment fait mention des infrastructures portuaires françaises de Guadeloupe et de Martinique, dont la sécurisation est jugée insuffisante, qui "constituent des points de vulnérabilité majeurs", selon les observations faites ; d’autant que le volume des conteneurs qui y transitent a doublé ces dernières années.
Proches de pays producteurs de stupéfiants
Les Antilles-Guyane font office, aux yeux des trafiquants, de portes d’entrée sur l’Europe, zone d’écoulement de leurs marchandises illicites. Ces territoires français ont une situation géographique dont ils tirent avantage, proches des pays producteurs d’Amérique latine et des pays de transit, comme Sainte-Lucie, le Guyane, ou la République dominicaine. Ils sont aussi sur des routes historiques du transport maritime mondial.
Cette position malheureusement stratégique, pour les cartels, n’est pas sans conséquences pour ces territoires. La drogue ne fait pas qu’y passer ; une partie alimente le trafic local. Or, cette activité illégale va de pair avec la hausse de la criminalité et de la violence.
La zone Antilles-Guyane enregistre notamment un taux d’homicide sept fois plus important que celui de l’hexagone (7 pour 100.000 habitants, contre 1,1 en France continentale), en partie lié aux règlements de compte entre gangs rivaux.
Extrait du rapport.
Des trafiquants qui privilégient l’acheminement par la mer
La voie maritime, via des bateaux de pêche, des voiliers, des hors-bords et des conteneurs, est un pilier du transport de stupéfiants. La multiplication des saisies massives en témoigne.
En 2022, les saisies de cocaïne effectuées aux Antilles au sein des ports de plaisance, mouillages et marinas se sont élevées à près de 1,2 tonne. En 2023, l’antenne OFAST en zone Caraïbes, compétente pour la Guadeloupe, la Martinique et Saint-Martin, a saisi 11 tonnes de stupéfiants. En mars 2024, 1,8 tonne de cocaïne ont été saisies dans la partie française de Saint-Martin, dans un "bateau-cigarette", très prisé des trafiquants pour sa puissance.
Extrait du rapport.
La voie maritime est aussi la voie d’entrée principale de la cocaïne en France ; elle représente 55% des quantités saisies en 2023, principalement en provenance des Antilles-Guyane.
Tout de même, depuis près de 10 ans, le trafic aérien progresse. Il s’appuie sur des personnes aux situations précaires, qui jouent les "mules" en acheminant la drogue in ou ex corpore, contre quelques milliers d’euros.
Les filières surinamo-guyanaises jouent un rôle majeur l’organisation de ce type de trafic. En 2022, près de 17,1 % de la cocaïne interceptée impliquait ce mode opératoire : 1.318 passeurs ont été interpellés sur des vols en provenance de Guyane, permettant la saisie de trois tonnes de cocaïne. x
Extrait du rapport.
Face à ce mode opératoire, le dispositif "100 % contrôles physiques" dans les aéroports français des Antilles-Guyane semble avoir un effet dissuasif.
Les trafiquants innovent au fil des réponses des forces de sécurité
Qu’à cela ne tienne ! Les malfaiteurs s’adaptent et tentent d’autres méthodes pour faire voyager la drogue : des "go fast maritimes", du fret express, du fret postal.
En 2022, le fret représentait 36% des saisies de cocaïne effectuées par les services douaniers de Roissy Fret en provenance de Guyane.
Extrait du rapport.
Au regard de tous ces constats, il s’avère essentiel de renforcer les mesures de veille, d’interception et de répression dans la zone, qui s’avère très vaste, notamment par le biais d’une coopération entre les Etats.