Les proches de Jean-Claude Jophe sont anéantis, le regard assombri, encore sous le choc. S'ils acceptent de témoigner, ce dimanche 3 novembre, c'est pour que cela "ne se reproduise plus jamais".
Le samedi 26 octobre, Jean-Claude Jophe, 53 ans, est mort asphyxié, en plein black out, dans son appartement de la résidence des Lauriers, à Pointe-à-Pitre. La Guadeloupe connaît, dans cette nuit du vendredi 25 au samedi 26 octobre, une situation inédite : l'archipel est plongé dans le noir, frappé par une coupure généralisée d'électricité. En cause : l'arrêt des moteurs de la centrale thermique EDF PEI de la Pointe Jarry.
Une sévère crise d'asthme
Lorsqu'aux alentours de minuit, le vendredi 25 octobre, Jean-Claude Jophe, pénètre l'appartement du 3ème étage qu'il partage avec sa mère et sa fille, cela fait déjà plusieurs heures qu'il n'y a plus d'électricité dans sa résidence. Il lui est impossible de faire fonctionner le ventilateur, acheté il y a, à peine, quelques jours. Face à cette chaleur écrasante, il faut alors ouvrir les fenêtres "pour que l'air puisse passer", se coucher et patienter.
Seulement voilà, dans la soirée, des exactions sont commises non loin du domicile des Jophe. Au pied de l'immeuble, des individus mettent le feu à des poubelles et à des voitures stationnées sur le parking. L'épaisse fumée noire, qui se dégage de ces véhicules calcinés, se répand dans le logement.
Au petit matin, le samedi 26 octobre, Jean-Claude Jophe, qui est asthmatique depuis des années, se réveille en sursaut. L'homme est pris d'une sévère crise d'asthme, il a beaucoup de mal à respirer. Il appelle à la rescousse sa fille, Ymane, qui lui apporte ses médicaments, sa Ventoline notamment.
"Pourquoi il y a de la fumée dans la maison ?"
Pendant de longues minutes, la jeune femme, tente de joindre les secours. Elle compose le 112, le 18, le 15, en vain. Car, depuis le black out, l'état du réseau téléphonique, est lui aussi, largement dégradé.
"On ne pouvait pas joindre les secours, on a essayé de toutes les manières possibles" déplore aujourd'hui Christelle Jophe, la nièce de Jean-Claude.
Jean-Claude, lui, s'est écroulé. Sa fille, Ymane, lui fait un massage cardiaque. Trente minutes plus tard, elle parvient enfin, à joindre le Samu. Au bout du fil, l'opérateur l'accompagne dans ses gestes de premiers secours. "Les secours ont fini par arriver, ils ont pris le relais et ils ont continué à faire le massage cardiaque avec un défibrillateur", poursuit Christelle Jophe.
Moi je venais de Capesterre, je prends la route pour le CHU, on me dit non, non, c'est trop tard. Malgré la Ventoline, et le massage cardiaque, c'était trop tard.
Christelle Jophe, nièce de Jean-Claude Jophe
"Dès qu'ils sont entrés dans l'appartement, les secouristes ont demandé à Ymane, pourquoi il y avait autant de fumée. Mais il faisait noir, elle ne voyait rien, elle ne s'était même pas rendu compte qu'il y avait autant de fumée dans l'appartement", explique encore Christelle.
Jean-Claude Jophe, 53 ans, meurt asphyxié, chez lui, victime d'une crise d'asthme sévère. À l'arrivée des secours, il est déjà trop tard, son cœur a lâché.
Le "potomitan" de la famille
"C'était quelqu'un de très apprécié, toute la cité le connaît", glisse Fabienne Jophe, une des sœurs de Jean-Claude. Il était son "tonton JC" : "C'était mon chaperon, s'il ne sortait pas, je ne sortais pas", poursuit-elle.
Ce qui me dérange surtout, c'est que c'est lui qui s'occupait de sa fille, j'ai peur pour elle. Quand tu l'entends te dire, pourquoi papa m'a abandonné, c'est dur.
Fabienne Jophe, soeur de Jean-Claude
Un drame et des questions...
"Il est parti, il ne reviendra plus" murmure Marie, la sœur aînée de Jean-Claude.
Ses proches ne peuvent s'empêcher de se poser cette question : ce drame aurait-il pu être évité ?
"Il y a quand même un peu de colère, concède Fabienne Jophe, il faut que les gens sachent ce qu'ils font parce qu'impacter autant de personnes, ne pas réfléchir et penser aux conséquences de ses actes, ce n’est pas normal".
Pour l'heure, la famille de Jean-Claude Jophe ne souhaite pas déposer plainte.