La visite ministérielle en Guadeloupe d’Eric Dupond-Moretti a débuté, hier (mardi 16 mai 2023) au tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre, où un temps d’échange a été organisé entre le garde des Sceaux et les professionnels de cette juridiction. A cette occasion, la création de quatre postes supplémentaires de magistrats, d’ici septembre 2023, a notamment été annoncée.
A LIRE AUSSI : Visite en Guadeloupe d’Eric Dupond-Moretti : première série d’annonces en réponse aux attentes des acteurs de la justice – 16/05/2023.
Par la suite, le ministre de la justice s’est rendu à l’antenne des Abymes du Service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP).
Le SPIP, un service mis à mal
Les locaux du SPIP avaient été l’objet d’une attaque criminelle d’une ampleur rare, dans la nuit du 26 au 27 novembre 2021, dans le contexte d’émeutes sociales et de lutte contre l’obligation vaccinale, en Guadeloupe ; on avait déploré, à l’époque, des tirs à armes lourdes sur les portes et les murs du bâtiment, un incendie volontaire avait bien failli engloutir tous les dossiers et les archives.
Fort heureusement, ces méfaits n’avaient fait aucune victime physique.
Pour autant, le garde des Sceaux a bien perçu, hier, le traumatisme moral que les personnels ont dû affronter ; ils se sont parfois sentis bien seuls, a expliqué une employée :
L’endroit par lequel vous êtes passé avait été criblé de balles. Tout était brulé, noir. Ça a été très violent à vivre, psychologiquement et, malheureusement, à ce moment-là, on n’avait pas forcément de psychologue pour nous soutenir. C’est vrai que ça n’a pas été une blessure physique, mais une blessure psychique assez difficile à vivre.
Membre du personnel du SPIP
Eric Dupond-Moretti a admis que cette détresse méritait la mise en place d’un accompagnement.
C’est un besoin aussi pour les agents de pouvoir exprimer le traumatisme qu’ils ont eu sur cette période. Je pense que Monsieur de garde des Sceaux a su, par ses mots, soutenir et accompagner les personnels. Je l’en remercie, sincèrement.
Nathalie Rambert directrice du SPIP de Guadeloupe
Le ministre a ensuite pu se rendre compte de l’avancée des travaux de rénovation et de sécurisation du site, toujours en cours.
Nous allons continuer la sécurisation de ces lieux, parce que je veux que tous ceux qui viennent ici travailler, le fasse en totale sécurité.
Eric Dupond-Moretti, ministre de la justice
Le fait est que, durant 8 mois, jusqu’en Juin 2022, les 16 conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation ont assuré leur délicate mission dans des conditions dégradées. On parle de contrôle judicaire, de suivi probatoire ou électronique, ou encore de l’exécution de travaux d’intérêt général (TIG).
Les aménagements de peines sont d’ailleurs plébiscités par le garde des Sceaux ; ceux-ci reposent, dans l’archipel, essentiellement sur deux associations agréées dont une, historique : "Kazabrok", dont Franck Phazian est le créateur.
Cette structure qui concrétise des chantiers d’insertion, assume une vingtaine de TIG par an, depuis près de deux décennies. Mais Franck Phazian déplore l'ampleur du phénomène de récidive.
On veut travailler sur la récidive, mais on a peu de moyens. J’entends, au niveau du SPIS ou des personnes avec qui on travaille : « on n’a pas assez de moyens de t’aider à nous aider, à éviter la récidive et aider notre population ». (...) Quelqu’un qui a des problèmes de justice est sans cesse dans une récidive parce que, économiquement, il ne s’en sort pas, il ne trouve pas sa place dans la société.
Franck Phazian, animateur social et responsable de Kazabrok
Nous avons évoqué la question des subventions et j’y suis bien sûr favorable, parce qu’il faut aider les associations. J’ai également suggéré à ce que les associations se rapprochent des chefs de juridiction, parce qu’on a, aujourd’hui, la possibilité de redistribuer des objets qui ont été saisis, placés sous scellés.
Eric Dupond-Moretti, ministre de la justice
Reste à voir si le ministre apportera davantage qu’une oreille attentive aux personnels et partenaires du SPIP ; ce, très prochainement, au regard de l’urgence exprimée, par les équipes.
Interrogé enfin, juste avant de partir, sur l’affaire Claude Jean-Pierre, du nom de ce retraité mort après un contrôle routier de gendarmerie, le 21 novembre 2020, le garde des Sceaux a rappelé qu’il ne commentait pas d’affaire en cours... "séparation des pouvoirs oblige".