Le 1er avril 2022, la Collectivité Territoriale de Guyane a annoncé le lancement prochain de "Retour en Guyane". Un dispositif pour favoriser le retour au péyi des jeunes diplômés et/ou professionnels issus du département. L’information a été largement relayée sur les réseaux sociaux. Et pour cause, le retour au péyi est une thématique qui revient souvent sur la table des ultra-marins.
Aux Antilles et en Guyane, de nombreux jeunes natifs partent également en métropole (respectivement 44 % et 37 % entre 21 et 29 ans) pour poursuivre leurs études mais aussi pour travailler.
Insee Première · Avril 2021 · n° 1853. Les natifs des Antilles, de Guyane et de Mayotte quittent souvent leur région natale, contrairement aux Réunionnais
Les taux de chômage et de pauvreté, deux à trois fois plus élevés en Outre-mer, expliqueraient en partie ces départs. Ainsi, 6 jeunes guyanais sur 10, qui vivent dans leur région natale, se disent prêts à quitter le département pour un emploi ou une formation. C’est plus qu’en Guadeloupe, qu’à la Réunion ou qu’à Mayotte (5 sur 10 chez eux). En conclusion du rapport, les auteurs de l’INSEE notent que ceux qui sont partis et revenus s’insèrent plus facilement sur le marché du travail. Ils sont plus diplômés que ceux qui sont restés "mais, à diplôme identique, les écarts d’accès à l’emploi s’atténuent".
Dans l'annonce du lancement du dispositif, la CTG évoque le retour des "forces vives". Thibault Lechat-Véga, 3e Vice-président de la Collectivité Territoriale de Guyane, en charge du projet, a répondu à nos questions sur cette initiative.
1En quoi consistera ce dispositif ?
"L’idée est de travailler de façon partenariale avec un ensemble d’acteurs du territoire pour favoriser le retour des forces vives de Guyane à travers l’accès à l’emploi, l’accession au logement, l’appui aux démarches administratives, etc."
2A qui s’adresse-t-il ?
"L’idée est de faire revenir, dans un premier temps, les compétences qui permettront de répondre aux besoins en main d’œuvre pour les secteurs et métiers en tension. Les publics cibles prioritaires sont donc : les jeunes diplômés et les professionnels expérimentés sur ces métiers-là et ceux qui justifient de leurs intérêts matériels et moraux en Guyane. L’idée, c’est vraiment d’accompagner les Guyanais qui ont envie de revenir participer via leurs compétences à la construction du péyi."
3Quelle forme prendra-t-il ?
"Au niveau de la CTG, nous allons commencer par une aide financière sous la forme d’une prise en charge d’une partie du billet d’avion du candidat au retour. Nous sommes en train d’en finaliser les contours pour un lancement dans quelques semaines. Ça va donc aller très vite. Ensuite, chacun des partenaires du dispositif 'Retour en Guyane' sera amené à faire des propositions pour faciliter l’aide au retour. Nous travaillons actuellement à des projets de conventionnement pour étoffer le dispositif."
4A quelle problématique répond le dispositif ?
"Nous vivons une situation paradoxale en Guyane où, alors qu’une partie de la population est maintenue en-dehors du marché du travail, nous importons des compétences. Collectivités comme privés ont besoin de toujours plus de personnels qualifiés et d’encadrants. En parallèle, de nombreux Guyanais formés et évoluant à l’extérieur formulent l’envie de rentrer. En tant que vice-président délégué aux relations avec les Guyanais de l’extérieur, je suis très régulièrement sollicité à ce sujet."
5Quand est-ce que le projet verra le jour ?
"Pour la partie CTG, l’étape 1, c’est-à-dire la mise en place d’une aide pour le billet retour fera l’objet d’une délibération soumise à la prochaine Assemblée plénière prévue pour la fin avril 2022. Je vous le disais, nous mettons les bouchées doubles, car il y a une véritable attente : le dispositif débutera d’ici à la fin du semestre avec l’aide de la CTG et viendra s’étoffer au fil des mois en fonction des partenaires qui auront rejoint le projet et de leurs contributions."
6Quel est l'objectif du dispositif ?
"D’une part, nous voulons accompagner les Guyanais de l’extérieur dans leur projet de retour au péyi, faire revenir nos cerveaux, mais aussi permettre aux familles guyanaises de voir revenir leurs enfants. D’autre part, nous voulons également accompagner les petites entreprises dans le recrutement de main d’œuvre qualifiée pour laquelle nous trouvons peu ou pas de ressources en local. Ce sera donc également une mesure favorable au développement économique du territoire."
7 En quoi le retour au péyi est-il important ?
"L’important, c’est d’avoir le choix : que celui qui réside en Guyane et veut évoluer en Guyane puisse le faire dans les meilleurs conditions ; que celui qui veut partir en mobilité le puisse également et que celui qui veut rentrer chez lui, sache qu’on est là aussi."
8Avez-vous déjà eu des retours de la part de personnes intéressées ?
"Plein ! Les publications sur les réseaux sociaux connaissent des records d’engagements, nous recevons des commentaires et messages privés sur Facebook, Instagram. De nombreuses personnes se sont inscrites à la Newsletter ou nous ont même contactés directement pour en savoir plus. Des partenaires également intéressés pour rejoindre le dispositif se sont fait connaître. C’est encourageant."
9Quelles seront les modalités d’inscription ?
"Une fois le projet voté en Assemblée Plénière nous pourrons lister plus précisément les critères d’éligibilité ainsi que les modalités pour candidater au dispositif. Nous réfléchissons également au lancement d’une plateforme dédiée afin de centraliser les informations autour du dispositif et d’accompagner les candidats au retour."
10Quel est le coût prévu pour le dispositif ?
"Nous avons voté lors de la dernière assemblée plénière, dédiée au budget 2022, une enveloppe globale qui comprend les ATE (aides territoriales aux étudiants) ainsi que l’aide au billet retour de 5,5 millions d’euros. C’est beaucoup, mais cela démontre l’ambition que nous portons."