Les autorités dressent un premier bilan encourageant du dispositif « Harpie 2 »

Les services de l’Etat font état d’une diminution du nombre de chantiers illégaux.
Les services de l’Etat font état d’une diminution du nombre de chantiers illégaux, et mettent l’accent sur les avancées permises par le déploiement de la nouvelle phase de l’opération Harpie décidée à la fin 2017 par le président de la République.
Ce sont les chiffres qui retiennent tout d’abord l’attention lorsque la préfecture présente en juillet le bilan en cours d’année de la lutte contre l’orpaillage illégal sur le territoire guyanais. Ceux de ce jeudi (le 12 juillet) sont plutôt encourageants et ne souffrent pas pour le moment de contestation comme cela a pu être le cas en 2016. Les Forces Armées de Guyane (FAG) ont recensé, le 27 juin, 346 chantiers clandestins sur le territoire guyanais contre 629 à la fin de l’année 2017. Ce recul apparent de l’activité illégale correspond à un net accroissement des actions de lutte dirigées par les autorités. Le nombre de jours d’opérations en forêt est ainsi passé de 1544 au 1er juillet 2017 à 2403 cette année. Ces opérations ont été également plus efficaces puisque les saisies doublent quasiment en un an : plus de 13 millions d’euros depuis le début de l’année contre sept, environ, à la même date l’an dernier. Les autorités constatent également un recul du trafic sur les fleuves à proximité des barrages d’un nouveau type qui sont parfois utilisés désormais : des barges saisies et disposées sur les cours d’eau pour contrôler les passages. Elles seront bientôt au nombre de trois dans la région du Haut-Maroni. 
Face à ces chiffres encourageants, le commandant de la gendarmerie nationale en Guyane, Patrick Valentini, se montre confiant. Une fois des sites illégaux mis hors d’activité, cette dernière ne se déplace à quelques kilomètres pour créer de nouveaux chantiers. Ce n’est, en tout cas, plus la tendance constatée. 


Un dispositif inter-ministériel

Ces résultats, les services de l’Etat les mettent en relation avec la naissance d’Harpie 2, une nouvelle mouture, rafraichie par Emmanuel Macron, du dispositif de lutte permanente contre l’orpaillage illégal lancé par Nicolas Sarkozy en 2008. L’affaire est désormais répartie entre plusieurs ministères et concerne peu ou prou en Guyane l’ensemble des services liés aux autorités ou à la Justice. Autour du Préfet, les services de l’Etat représentés pour ce rendez-vous traditionnel se sont multipliés. En plus du parquet, la Gendarmerie Nationale et les Forces Armées de Guyane, on retrouvait également ce jeudi le Parc Amazonien de Guyane, l’ONF, les douanes et la Police Aux Frontières.
Plutôt satisfait par les résultats, le Préfet nuance de lui-même, et ne s’attarde pas trop sur le nombre de chantiers recensés :  

Ce qui est important, c’est la dynamique ministérielle. Tous les agents des services publics sont investis dans la lutte contre l’orpaillage illégal sur une stratégie définie à l’avance. Le nombre de puits est un indicateur mais ce n’est pas le seul.


Le représentant de l’Etat souligne ainsi l’augmentation de l’action des services qui a augmenté depuis le 1er janvier de 20% dans le territoire du Parc Amazonien de Guyane. De manière générale, Patrice Faure en appelle à la mobilisation de tous, aux élus et responsables de de prendre leurs responsabilités et s’investir.
 

Une nette augmentation du nombre de garimpeiros jugés

Le volet judiciaire de la lutte contre l’orpaillage illégal s’étoffe lui aussi. Le procureur de la République, Eric Vaillant, voit en Harpie 2 une nouvelle dynamique qui s’illustre notamment sur le terrain par des patrouilles plus fournies en « agents destructeurs » . Les gendarmes et officiers de police judiciaire sont accompagnés depuis l’an dernier d’adjoints OPJ, mais aussi des personnels du Parc Amazonien ou de la PAF.
Les procédures judiciaires ont augmenté tandis que les orpailleurs se sont trouvés confrontés à la Justice. Le nombre de déferrement a sensiblement augmenté depuis le début de l’année. Quand le nombre de personnes déférées ne dépassait pas dix en 2017, le parquet en a déjà compté 36 au cours du 1er semestre 2018. 25 d’entre elles ont été écrouées au centre pénitentiaire. Pour Eric Vaillant, il n’y a pas d’impunité :  

Les garimpeiros sont de véritables délinquants. Il faut qu’il soient jugés au tribunal de Cayenne. Le mouvement est initié.


Autre nouveauté significative judiciaire, la mise en place du livre de police en lien avec la Direction de l’Environnement de l’Aménagement et du Logement (DEAL) afin d’assurer un meilleur tracé de l’or issu de l’activité légale.
 

Des dispositifs expérimentaux

Après dix ans d’opération Harpie, la phase qui vient de débuter cherche toujours l’efficacité dans les relations avec nos voisins. Les autorités croient désormais en la mise en place d’une conseillère diplomatique auprès du Préfet pour établir un véritable axe de coopération transfrontalière et s’attaquer, pourquoi pas, aux bases arrières des orpailleurs situées outre Maroni et Oyapock.
L’opération donne l’occasion aussi à des expérimentations et pourquoi pas des succès. Les autorités projettent ainsi de recruter des jeunes Guyanais avec le concours du Service Militaire Adapté afin participer à la lutte en occupant des chantiers illégaux abandonnés. Ces « Power Rangers », pour reprendre la formulation utilisée, pourraient être formés avant la fin de l’année. 
Le rendez-vous de jeudi de présentation des chiffres de la lutte contre l’orpaillage illégal, le premier après le dixième anniversaire, a été aussi l’occasion d’évoquer l’après-Harpie. La commune de Saül a été citée en exemple forte des succès de ses projets menés pour occuper le terrain des orpailleurs. L’après-Harpie à Saül c’est un volet social renforcé auprès des habitants. Et une activité clandestine qui semble, désormais, lointaine.