La difficile application du régime indemnitaire dans certaines collectivités de Guyane

Mobilisation d'une partie du personnel à la mairie de Macouria sur l'application du régime indemnitaire
Dans la fonction publique d’état comme dans la fonction publique territoriale en sus de leurs rémunérations les agents publics peuvent aussi prétendre à l’octroi de primes et autres indemnités. En grève illimitée depuis le 6 janvier, une partie du personnel de la commune de Macouria revendique une plus juste répartition de l’Indemnité de fonction de sujétion et d’expertise (l’IFSE). Mais de quoi s’agit-il exactement ?

La mise en place du régime indemnitaire notamment le RIFSEEP applicable depuis une décennie dans les collectivités territoriales ne se fait pas sans remous. La répartition et les montants attribués aux agents les moins gradés étant souvent contestés. Après Cayenne, Saint-Laurent en a fait l’expérience fin 2024. Depuis ce 6 janvier, une partie du personnel de la Caisse des Ecoles et des agents du Service technique de Macouria est mobilisée pour une durée illimitée arguant de discriminations inadmissibles dans la répartition de l'IFSE.

Lire ici : Mairie de Macouria : les agents en grève, les rythmes scolaires perturbés

Un régime indemnitaire discrétionnaire qui s’applique selon des règles précises

Chaque collectivité territoriale et établissement public est amené à définir le régime indemnitaire le mieux adapté à ses propres objectifs de rétribution du travail réalisé, à ses ressources (tant humaines que financières), à son organisation et à sa culture interne.

Nous avons demandé à Charles Henri Delar directeur territorial hors classe à la retraite et consultant pour les collectivités locales quelles explications sur ce dispositif :

« Il existe depuis 2014, (décret du 20 mai 2014) un nouveau régime qui s’appelle le RIFSEEP, le régime indemnitaire dû aux fonctions de sujétions et d'expertise professionnelle. Il est applicable depuis le 1er juillet 2015. Toutes les collectivités territoriales y sont soumises. Il leur appartient de prendre une délibération pour l’application de ce dispositif. Il comprend deux volets : l’IFSE (Indemnité de fonction de sujétion et d’expertise) d’une part et le CIA (Complément indemnitaire annuel) d’autre part.

L’IFSE versé mensuellement, est accordé à l’ensemble des cadres d’emploi relevant des huit filières de la fonction publique. Dans la filière administrative cela va de l’administrateur territorial jusqu’à l’adjoint administratif. L’attribution de cette prime se fait en fonction d’un tableau pré établi et surtout est laissée à l’appréciation du maire qui affecte selon des critères prédéfinis. Cela n’est pas le même montant pour tous les agents. Des arrêtés d'attribution individuelle doivent être notifiés aux intéressés.

Quant au CIA, il doit représenter au maximum un pourcentage de l’IFSE (entre 10 et 15% selon le cadre d’emploi). Pour exemple, un administrateur territorial le grade le plus élevé le maximum annuel de l’IFSE est de 49 000 euros. L’IFSE pour le cadre d’emploi le moins élevé celui d’adjoint administratif est de 11 000 euros annuels. Il est versé en fonction de l’engagement professionnel et de la manière de servir.

Pour le CIA la délibération doit obligatoirement abonder en crédit budgétaire. Mais il n’est pas fait obligation à l’autorité territoriale d’appliquer le CIA, elle peut décider d’accorder cette prime ou pas. Si elle l’accorde, c’est pour tout le monde ou à personne. Le principe d’égalité s’applique ici. »

Le dialogue social impératif pour la mise en place du régime indemnitaire

Charles Henri Delar rappelle que l’application de ces primes doit impérativement faire l’objet d’une communication, d’un dialogue avec les instances sociales. Il faut une information suffisante auprès des agents avant que la délibération soit prise et appliquée. Il y a surtout l’obligation, avant que la délibération soit exécutoire, de soumettre le projet au comité social territorial qui est une instance consultative. Cette délibération doit être très explicative et détailler les pourcentages attribués selon les types de critères.

De fait, il est recommandé soit de faire participer les agents à la détermination "dirigée" des critères soit, uniquement, de le présenter aux agents en leur expliquant le motif d’une refonte et les objectifs recherchés par l’autorité territoriale. À cette occasion, l’autorité territoriale peut préciser clairement ce qu’elle attend de ses agents (la satisfaction des usagers, la qualité du service public rendu, …).

« On doit préalablement à la délibération recenser tous les postes, établir des critères objectifs sur la sujétion et l’expertise, veiller à ce que l’entretien professionnel soit réalisé par le chef de service. Ce dernier est essentiel pour l’attribution du CIA. Il y a beaucoup d’agents territoriaux qui se plaignent de n’être pas reçus en entretien. »