Une mission d’exploration s’est tenue entre avril et mai autour des lacs de la Mamilihpan. Elle s’inscrivait dans le cadre d’un programme d’exploration de sites inconnus mis en place en 2017 financé par des fonds publics et privés. C’était la seconde exploration dans cette zone.
Une mission difficile dite engagée
Chargée de mission recherche et développement, Audrey Thonnel s’est occupé de l’organisation de la mission aux lacs de la Mamilihpan, elle nous apporte des informations.
« La Montagne Mamilhipan est un site sacré pour les Amérindiens. On y trouve les seules peintures rupestres connues de la Guyane. En 2018, nous avions déjà envoyé une mission d’exploration car on ne connaissait rien du tout de la biodiversité de ce site archéologique. Cela a donné lieu à un premier inventaire.
Le site se trouve à plus de 120 km au sud de Maripasoula, autant dire qu’il n’y a personne là-bas. Lors de la première mission sur l’inselberg de la Mamilihpan appelée aussi la Savane Roche Sousky on avait repéré plusieurs lacs en forêt. Nous avons alors prospecté sur un lac situé à côté de la rive du Maroni et cette année nous avons décidé d’envoyer une mission d’exploration sur une zone où se trouvent trois lacs. Il y en a quatre au total. Nous nous sommes concentrés sur les plus accessibles, les lacs Paco, Marionnette et Haut Koutou. L’hélicoptère s’est posé sur une roche à proximité de la Mamilihpan. L’équipe était composée de 8 experts qui devaient se débrouiller pour atteindre ces lacs. C’est ce que l’on appelle une mission engagée. Les experts doivent explorer le terrain en portant dans leurs bagages 10 jours de matériels, 10 jours de nourriture et cela hors layon, au cœur de la forêt.
Il n’y a aucune donnée sur ces lacs, aucune information n’était connue. Tout avait été estimé à vol d’oiseau. Il devait y avoir 4 km à faire pour parvenir aux lacs mais cela a été le double finalement. Avec les sacs de 25 kg ce n’est qu’une partie de l’équipe qui a pu atteindre les premiers lacs, l’autre étant restée près de la montagne pour compléter l’inventaire.
Pour ce type de mission on envoie des personnes aguerries capables de se repérer sur site avec des téléphones et émetteurs satellitaires pour à tout moment pouvoir aller les chercher.»
Une biodiversité riche avec un inventaire toujours en cours
Audrey Thonnel nous cite quelques-unes des espèces découvertes aussi bien pour la faune que pour la flore :
« Un certain nombre d’espèces de poissons ont été trouvées, une espèce de libellule nouvelle et sur le bord d’un lac une orchidée en fleur pas connue de Guyane ou tout au moins pas référencée, ni recensée ».
L’intérêt d’une telle mission ne se discute pas :
« On est les premiers sur ces sites et cela nous permet d’avoir un autre regard d’expertise qui peut nous amener à faire des études plus poussées notamment sur les poissons, la botanique et les libellules qui sont un indicateur de bon état des eaux. Le parc est dans le milieu amazonien, nous devons faire un état des lieux afin de savoir ce que l’on doit préserver ou valoriser. »
À l’heure actuelle comme il y a eu très peu de missions d’exploration de lacs, il n’y a pas encore vraiment de point de comparaison ajoute cette responsable du PAG :
« Nous sommes aux prémices d’inventaire. Nous envisageons d’aller explorer un lac sur le secteur de Camopi mais pour l’instant c’est un projet. Cela nous permettrait de comparer ce qu’il y a dans les lacs versant Maroni et ce qu’il y a versant Oyapock. Souvent les espèces ne sont pas les mêmes d’un côté à l’autre. Toutes les données sont mises dans une base de données appelée Géonature. Étant un établissement public nous diffusons toutes les données. Nous avons un atlas de biodiversité en ligne et chacun peut aller consulter ce site sur une espèce particulière et voir où se trouve la répartition de l’espèce. Sur le site du PAG nous faisons de la médiation scientifique avec des éléments généraux. Ces données remontent aussi vers une plateforme régionale puis nationale puis vers les supers bases de données mondiales utilisées par les chercheurs.
La Guyane est intégrée dans le couloir écologique du plateau des Guyanes, certes nous ne sommes pas sur le bassin-versant de l’Amazonie mais cela reste la forêt tropicale amazonienne.
Un serpent très rare a été découvert durant cette mission. L’équipe a pu voir presque toutes les espèces y compris des espèces chassables sur ce seul secteur. Cela montre qu’il n’y a pas d’impact humain et que cette zone est très bien préservée. »