Si trois autres condamnés sont venus, Desi Bouterse (comme un 5ème condamné) ne s'est pas présenté à la prison où il doit purger un peine de 20 ans de réclusion. En décembre dernier, l'ex dictateur du Surinam avait ainsi été jugé en appel pour le meurtre de 15 opposants en 1982.
Lors d'un meeting de ses partisans, sa femme, Ingrid, qui dénonce une condamnation politique, a confirmé qu'il ne viendrait pas et a affiché une certaine ignorance :
Je ne sais pas où il est. Comme je l'ai dit, il n'est pas présent en ce moment et je ne peux pas dire quand il sera de retour parce que je n'ai pas de contact avec lui.
Ingrid Bouterse
Selon ses proches, Desi Bouterse serait au Suriname
Si certains le disent au Venezuela, ses proches affirment cependant avec ironie qu'il se trouve au Suriname, comme Ramon Abrahams, Vice-président du Parti national démocratique (PND), le parti de Desi Bouterse :
Il se trouve entre l'océan Atlantique, les montagnes Tumuk Humak, le fleuve Courantyne et le fleuve Maroni…
L’épouse du fuyard confirme : « Tout le monde le connaît. On le trouve toujours à l'intérieur du pays. Contrairement aux membres du gouvernement, il connaît l'intérieur du pays comme sa poche. Je ne sais donc pas où il est, mais il reviendra un jour. Je ne sais pas quand et comment. C'est son style. »
Malgré la fuite de Desi Bouterse, sa condamnation témoigne d’une évolution
Même si Desi Bouterse n'est toujours pas sous les verrous, sa condamnation, au terme de 16 ans de procédure, a semblé prouver que les choses ont changé au Surinam. C’est en tout cas l’avis de Henk Kamperveen, fils d'Andre Kamperveen, l'une des victimes, au terme du procès et à l’annonce de la condamnation :
« Cela aurait dû arriver il y a longtemps. L'attente a été insupportable, le délai bien trop long pour qu'on puisse en parler. Bien qu'il n'y ait pas lieu de se réjouir, cette décision marque la fin d'un chapitre douloureux, qui nous procure un sentiment de satisfaction doux-amer. Le temps est venu pour nous d'aller de l'avant, de laisser le passé derrière nous et peut-être d'entamer enfin le processus de guérison. Cela a pris beaucoup trop de temps, mais nous trouvons du réconfort dans cette déclaration finale. Il ne s'agit pas d'une victoire pour les seules familles, mais pour le Surinam dans son ensemble, pour l'État de droit qui a été respecté et pour la mémoire de ceux qui ont été assassinés. C'est une victoire pour la justice et un pas vers le rétablissement de la confiance dans le système juridique de notre nation. »
Un sentiment partagé par Reed Brody, Commissaire de la Cour internationale de justice :
Ici, les juges, tout au long de ce processus, malgré tous les retards, toutes les interférences, ont montré qu'ils portaient très fièrement le manteau de l'indépendance judiciaire. Je pense que cela en dit long sur la démocratie surinamaise, sur l'État de droit. Cela montre que personne n'est au-dessus de la loi, quel que soit son pouvoir. Cela place le Suriname sur la carte de l'intégrité judiciaire et de l'État de droit.
Le juge n'avait cependant pas demandé l'emprisonnement immédiat de Desi Bouterse comme le souhaitaient les procureurs.
L’ex putschiste peut-il être gracié ?
L'ex chef de l'Etat pourrait encore, semble-t-il, demander une grâce présidentielle. Il était à la tête d'un pouvoir putschiste entre 1980 et 1987. Il a par la suite été élu président entre 2010 et 2020