Les résultats officiels des législatives ont été proclamés lundi 8 juillet à Nouméa (détail ici). Le taux de participation se monte à 71,35 % des électeurs inscrits. Nicolas Metzdorf reste député, mais pour la première circonscription, avec 52,41 % des suffrages exprimés. Emmanuel Tjibaou est élu dans la seconde circonscription avec 57,44 % des votes. Au-delà des chiffres, le docteur en géopolitique Pierre-Christophe Pantz était lundi soir l'invité du journal télévisé. Il a partagé son analyse du scrutin. Interview.
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NC la 1ère : Le second tour des législatives anticipées a vu une participation de 69 % dans la première circonscription et 73,06 % dans la deuxième. Quel impact pourrait avoir cette mobilisation sur les discussions concernant l'avenir de la Nouvelle-Calédonie ?
Pierre-Christophe Pantz : C'est un taux de participation record, quasiment jamais vu, lors de législatives. Ça oblige les candidats élus. Ça leur apporte une légitimité. Ça leur apporte aussi une responsabilité, de devoir trouver une issue à cette situation que l'on connaît depuis plusieurs semaines. Et puis force est de constater qu'il y a une représentation électorale du camp indépendantiste qui rebat les cartes, du point de vue du rapport de force. Ça appelle aussi des négociations, qui seront peut-être plus équilibrées après le dernier rapport de force qu'on avait eu, au troisième référendum.
Est-ce que le taux de participation reflète un changement dans les priorités politiques des électeurs calédoniens ?
P-C.P. : En tout cas, c'est une réponse. C'est un cri du cœur. C'est une révolte. C'est une volonté d'exprimer une voix après ce contexte très particulier, atypique, que l'on connaît depuis huit semaines. C'est une volonté, aussi, de dire qu'il y a un besoin d'être entendu. Qu'il y a un besoin de dialogue, d'échange. Et c'est peut-être un espoir, aussi, pour que les uns et les autres puissent se retrouver à la table des négociations prochainement.
Avez-vous plus de visibilité sur les reports de voix ?
P-C.P. : Concrètement, on a regardé ces reports de voix dans le détail, dans la première et la seconde circonscription. Il y a une très forte progression des candidats indépendantistes, dans la première et la seconde. Il y a eu une mobilisation des abstentionnistes du 1er tour. Et on a vu qu'il y a quand même une abstention résiduelle, dans les communes du Grand Nouméa notamment, où l'on voit que les reports de voix des partis intermédiaires - Eveil océanien, ou Calédonie ensemble - ne se sont pas forcément reversés vers les candidats non indépendantistes. Ce qui a été en leur défaveur, notamment dans la seconde circonscription.
Le Nouveau front populaire s'impose dorénavant comme la première force politique française. Cette nouvelle ère politique pourrait-elle faciliter, ou au contraire, compliquer les relations entre les représentants calédoniens et le gouvernement français ?
P-C.P. : Je pense que la donne électorale en Métropole est plus complexe qu'elle n'y paraît. On voit cette composition de trois blocs et au sein de ces blocs, différents partis qui ont un certain nombre de représentants. Effectivement, ça va complexifier, peut-être, la gestion du dossier calédonien. On ne sait pas, on n'a pas de visibilité sur [sa] gestion. Peut-être rappeler que la solution précisée dans la proposition du Nouveau front populaire, c'est qu'on puisse aboutir à un accord global. Ça veut dire qu'il faut d'abord qu'ici, localement, on puisse se mettre d'accord. Donc, avant de voir ce qui se passe au niveau de Paris, regardons ce qui se passe à notre niveau.
Est-ce qu'on doit s'attendre à une nouvelle approche, du NFP, sur le dossier calédonien ?
P-C.P. : Attendons de voir si c'est eux qui seront à la gestion du dossier calédonien. Mais bien évidemment que l'approche du Nouveau front populaire ne sera pas celle de la droite, du centre ou de l'extrême-droite. Il y aura peut-être un changement dans la méthode choisie, pour aboutir à cette discussion, à ces négociations. Ça sera peut-être ça la clé. Ne pas apporter une solution clé en main mais une méthode : comment remettre les uns et les autres autour de la table pour discuter.
Faut-il s'attendre à ce que les deux députés travaillent ensemble Paris ?
P-C.P. : C'est ce qu'ils ont semblé dire. Je garde espoir. Quand j'écoute le débat électoral de [dimanche] soir, on voit qu'ils aspirent à trouver une solution à cette situation : économique, sociale et puis évidemment, à moyen ou long terme, une solution politique.
Les deux séquences de son entretien avec Steeven Gnipate