Climat : deux camps irréconciliables s’affrontent dans les coulisses de la COP 28

La COP28 est organisée à Dubai jusqu'au 12 décembre 2023.
Le sommet mondial sur le climat, à Dubaï, confirme que les actes ne sont absolument pas conformes aux discours pour juguler le réchauffement continu du climat. Preuve en est donnée une fois de plus à la COP 28 où une ligne de démarcation délimite deux camps opposés.

Une frontière étanche se dresse entre les pro-pétrole et les anti-fossiles. D’un côté, les pays et les entreprises ayant bâti leur prospérité ou voulant baser leur expansion sur l’exploitation des énergies fossiles. De l’autre, les experts, les organisations non gouvernementales, les citoyens et quelques pays qui militent pour l’arrêt de l’utilisation de ces types d’énergies.

Les deux camps s’entendent sur un point crucial : le climat se dégrade à cause de l’exploitation pétrole, du gaz et du charbon pour l’industrie, les transports, l’agriculture intensive. Les deux camps sont d’accord aussi pour dire qu’il faut développer les énergies renouvelables en provenance du vent, de la mer, des rivières et du soleil.

Le consensus reste limité aux constats


Et après ? Eh bien, là s’arrête le consensus ! Aucun calendrier ne sera défini à la COP 28 tenue dans une pétromonarchie, le comble du cynisme. Aucune échéance multilatérale ne sera élaborée, les intérêts économiques et géopolitiques étant trop divergents entre pays riches et pays pauvres.

Signe du décalage entre les paroles et les actes, la stratégie des compagnies pétrolières, publiques ou privées. Elles prévoient de produire deux fois plus que ce qu'impose l'accord de Paris, selon un spécialiste des hydrocarbures, Michael Lazarus, dans une interview au magazine L’Usine nouvelle.

Le directeur de l’ONG Stockholm Environment Institute, basée aux États-Unis, a publié un rapport le mois dernier. Il y alerte sur le déphasage entre les plans de production des compagnies pétrolières et les scénarios de réduction du réchauffement du climat.

Les compagnies pétrolières restent sourdes et muettes


La production totale de ces géants pourrait atteindre 110 millions de barils par jour en 2030, contre 103 millions de barils aujourd’hui. En 2050, cette production augmentera encore, à 120 millions de barils/jour. Une stratégie en contradiction frontale avec les prévisions de l'Agence internationale de l’énergie. Cet organe de l’ONU table sur une production maximale de pétrole d’ici 2030, avant qu’elle ne décline progressivement pour parvenir à une transition énergétique réelle en 2050.

Selon Michael Lazarus, réduire la production d’énergies fossiles puis l’arrêter est une responsabilité des États. Les compagnies pétrolières restent sourdes et muettes aux appels lancés à la raison. C’est ce que constate l’envoyé spécial du journal Le Monde. "Après des débuts marqués par plusieurs avancées, les négociations entre les parties bloquent sur l’enjeu majeur de l’avenir des combustibles fossiles, certains pays demeurant farouchement hostiles à toute mention du sujet", écrit-il dans l’édition du 7 décembre 2023.

Pour illustrer le fossé d’incompréhension entre les partisans du pro-pétrole et les anti-fossiles, Le Monde cite le ministre de la diplomatie climatique du Danemark, Dan Jorgensen : "L’âge de pierre n’a pas pris fin parce que le monde était à court de pierre", ironise-t-il. Il ajoute que "l’ère des combustibles fossiles ne doit pas prendre fin lorsque nous serons à court de fossiles". Une pierre dans le jardin des pays producteurs. Mais sauront-ils la saisir au bond ?