Fabrice di Falco est le pharaon Akhenaton

Le pharaon Akhenaton (Fabrice di Falco) accompagné de deux de ses six filles sur la scène de l'opéra de Nice.
Le chanteur lyrique martiniquais tient le premier rôle de cet opéra de Philip Glass, chorégraphié et mis en scène par Lucinda Childs. Les représentations prévues en novembre à l'opéra de Nice ont été remplacées par une vidéo accessible à tous gratuitement sur internet. 
Sa voix de contre-ténor et son physique ont probablement été décisifs pour le choix de Fabrice di Falco en tant que pharaon Akhenaton, le rôle principal de cet opéra en trois actes.
 

Je pense que quand on regarde le buste de Néfertiti et quand on lit les recherches des égyptologues, il est dit qu'Akhenaton et Nefertiti avaient fait des portraits similaires d'eux-mêmes.

Je pense qu'on est dans une période à l'opéra où le physique compte aussi avec la voix. J'étais pour le moment le contre-ténor avec un physique qui pouvait rappeler le parallélisme entre Akhenaton et Nefertiti. 

Et puis la voix, une voix très différente des autres versions puisque les autres contre-ténors ont livré une version beaucoup plus baroque qui leur est propre. Mais moi j'avais envie de livrer une version beaucoup plus lyrique et dramatique. 

 
En 25 ans de carrière, ce n'est pas la première fois que Fabrice di Falco joue le rôle d'un personnage important de l'histoire. Ce n'est pas la première fois non plus qu'il tient un premier rôle, cependant cette fois, la chose est symbolique. 
 

Je pense qu'ils m'ont choisi pour plusieurs raisons, mais en tout cas je suis content. Parce que j'ai lu en 1984 et récemment au Metropolitan Opera que les Afro-américains avaient trouvé dommage qu'on ne donne pas le rôle à un homme de couleur.

Et du coup, le fait qu'ils m'aient donné le rôle, ça me permet d'ouvrir la voie aux autres contre-ténors de couleur qui pourraient, j'espère, avoir la chance de continuer la route en ayant un rôle écrit pour eux. 

 

Quelle est l'histoire ?


Le pharaon Akhenaton en français ou Akhnaten en anglais, est le mari de Nefertiti et le père de Toutankamon. Il accède au trône après la mort de son père Aménophis III. 
Akhenaton (Fabrice di Falco) et Nefertiti (Julie Robard-Gendre) sur la scène de l'opéra de Nice.
Il a marqué l’Égypte ancienne en étant le premier pharaon à imposer le monothéisme. Il a fait du Dieu soleil, la seule et unique divinité de son royaume. Il a également fait le choix de la monogamie avec Nefertiti comme unique compagne. 
 

C'est une histoire extraordinaire surtout que l'on voit que dans le monde entier, il y a des musées qui ouvrent toute une partie de l'histoire de l'Égypte.

Vraiment j'ai trouvé intéressant de pouvoir se plonger dans l'univers égyptien en tant qu'interprète et puis en tant que Martiniquais pouvant comprendre le côté différent. Les Égyptiens par rapport aux autres sont différents et nous Martiniquais, nous sommes aussi différents par rapport aux autres.

J'ai trouvé intéressant de pouvoir mettre le côté enraciné dans sa terre, regardé par d'autres, être différent, mais en tout cas respectant sa culture. 

 

La Covid-19, des répétitions à l'unique représentation


L'année 2020 est particulière pour tous et le monde artistique n'est pas épargné. Fabrice di Falco a dû s'adapter en permanence pour ce rôle. Par rapport aux limites de déplacement, Lucinda Childs n'a pas eu d'autre choix que de superviser les répétitions en visioconférence depuis chez elle à New York. Une première dans l’histoire des spectacles lyriques en France.
 

On a toujours cette chance d'avoir le metteur en scène avec vous qui travaille tous les jours avec vous et qui vous montre des exemples, qui échange énormément avec vous.  Mais à cause de la Covid-19, la grande Lucinda Childs, n'a pas pu venir des États-Unis.
Donc nous avons dû adapter la mise en scène afin que nous soyons sur le plateau. Nous la voyions sur grand écran et elle nous voyait sur son ordinateur.

Et ce fut très déroutant parce que nous devions grâce à internet et au support comprendre tout de suite sa mise en scène et tout de suite faire ce qu'elle veut. Bien sûr elle avait deux assistants extraordinaires qui se faisaient le relais de cette grande dame. 

Nous avons fait tout ce qu'il fallait pour réussir ce challenge. De réussir surtout ce qu'elle veut. La conceptualisation et la réussite de sa mise en scène afin de lui montrer que même loin, on a respecté son travail. 

Fabrice di Falco a dû s'adapter à la scène qui représente le soleil.
D'autres difficultés supplémentaires se sont ajoutées comme le port du masque, l'absence totale de public ou encore la scène qui représente le soleil bouge et s'incline sous les pieds des chanteurs. 
 

C'est la première fois que je chante toutes les répétitions avec un masque. Déjà, parler dans la vie normale avec un masque, c'est compliqué. Chanter pendant des heures et des heures avec le masque, c'est aussi compliqué. 

À cela se sont rajoutées des répétitions sans public et l'on savait qu'il n'y aurait pas de représentation publique. Nos métiers c'est aussi le partage et l'échange avec le public.

Quand on a fini un air, le public applaudit ou il vous hue quand il est content ou pas content. Mais là nous étions livrés à une salle vide et il fallait qu'on puisse s'imaginer qu'il y avait un public. 

Ce soleil incliné, il fallait comme mes consoeurs, marcher sur ce sol incliné, perdre complètement l'assise. Donc il a fallu travailler aussi cette mise en scène et en plus tout dans la lenteur puisque la méthode de Lucinda Childs est dans la lenteur.

 
Un mois de travail pour quatre représentations prévues le 1er, le 3, le 5 et le 7 novembre 2020. Cependant avec la recrudescence de cas de Covid-19 et les mesures de confinement, tout a été annulé. Finalement seule la représentation du 1er a eu lieu sur la scène de l'Opéra de Nice afin d'être filmée. Grâce à cette captation audiovisuelle, il est possible de voir gratuitement cet opéra depuis le 20 novembre 2020 sur la plateforme de vidéo YouTube.
©Opéra Nice Côte d'Azur
 

On s'est dit au moins on n’aura pas travaillé un mois pour rien. Au moins on va pouvoir laisser une trace de cette production. 

Je dirais que la covid-19 a été positive pour cette production dans le sens où au moins, on a pu faire une représentation, la seule, mais captée et diffusée qui fait que tous les Outre-mer et le monde entier peuvent regarder cette production.

Ce qui n'aurait pas été le cas s'il n'y avait pas eu la Covid, on aurait fait nos quatre représentations comme à l'opéra habituellement et si les gens n'étaient pas dans la salle, ils n'auraient pas vu ce spectacle. 

On est dans une période artistique, on est obligé de trouver des solutions pour que l'artistique puisse continuer. Au lieu de chanter devant un public, on a chanté devant des chaises vides, mais on savait que les caméras qui étaient installées représentaient même plus que le public niçois puisqu'elles représentaient un public international et même un public qui n'irait jamais à l'opéra, mais l'opéra vient chez lui. 


Bonne nouvelle, selon Fabrice di Falco, Bertrand Rossi, le Directeur Général de l'opéra de Nice se serait engagé sur la reprise de cet opéra avec le même casting pour septembre et octobre 2021, avec le public cette fois.
À voir en télévision
"Fabrice di Falco, l'oiseau rebelle", le documentaire inédit réalisé par Gilles Moisset est à découvrir dans Mémoire Vive ce mardi 24 novembre 2020 à 20h35 sur Martinique la 1ère.