Redonner la parole au peuple : là est sûrement l’effet le plus tangible de la mobilisation suscitée par le Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro-caribéens. En dépit des critiques sur sa stratégie, ses méthodes ou le profil de son leader charismatique, l’association estime qu’il est temps de redonner la parole à ceux qui souffrent le plus de la cherté de la vie. Ne serait-ce que pour exprimer des frustrations et édicter des revendications.
Les militants du RPPRAC ont provoqué une mobilisation inédite en prenant de court les corps intermédiaires. Dans un premier temps, le préfet, les syndicats et les élus politiques ont été contournés ou ignorés. Les protagonistes habituels des luttes sociales ont perdu le monopole de l'initiative de l’action collective menée au nom de la population, ou avec sa participation.
Le RPPRAC a voulu combler un vide, l‘absence de réponses durables face à la colère des consommateurs, pourtant identifiée depuis longtemps. L’association a pointé du doigt l’absence de nos élus sur ce thème de société. Comme s’ils étaient accaparés par la gestion des collectivités et par leur réélection. Et que dire du fonctionnement technocratique des institutions, en décalage par rapport à la vie de la population ?
Notre élite remise en cause
Le RPPRAC s’en est pris également aux acteurs de la grande distribution. Notre économie étant tirée par l’hyperconsommation et la dépendance à l’importation, ces acteurs ont organisé leur activité comme si la Martinique est un pays riche. Cette stratégie montre ses limites. Alors qu’une fraction de la population dispose de revenus lui permettant de dépenser, d’investir et d’épargner à des niveaux supérieurs à la moyenne, le tiers des habitants du territoire vit au-dessous du seuil de pauvreté. Ce paradoxe est devenu insupportable.
Force est de constater que si les forces politiques et les syndicats avaient investi le terrain de la lutte contre la cherté de la vie de manière permanente avec des résultats tangibles, le RPPRAC n’aurait jamais vu le jour. Ce rassemblement qui se situe en marge de l’action syndicale et en dehors de l’action politique pose cependant des questions relevant du syndicalisme et du politique.
Une problématique ancienne
Un autre paradoxe de la crise actuelle qui permet de mettre en lumière à nouveau une problématique ancienne. Avec des formes d’action innovante, l’association espère obtenir des résultats plus concrets que ceux obtenus par nos aînés. Pourtant, le combat contre la cherté de la vie dure depuis plus d’un siècle.
Est-ce à dire que nous sommes en présence d’une révolution citoyenne ? Il reste qu’en période de crise aiguë, il est sain de redonner la parole au peuple. Et ceci tout en restant lucide quant au but ultime. À savoir que le coût intolérable de la vie quotidienne ne sera résorbé que par des réformes de nos structures économiques et politiques.
L’idée se fait jour peu à peu que le système actuel produit les inégalités et la colère généralisée parce qu’il a atteint ses limites. Pauvres ou riches, chacun a son mot à dire sur les solutions pérennes à envisager pour changer la vie dans la Martinique que nous voulons.