Depuis la procédure de retour liée à la possible "présence de corps étrangers métalliques" dans le sucre de la marque le Galion, les Martiniquais s'interrogent sur la provenance de ce sucre importé. Un choix fait par la seule sucrerie de l'île pour pallier le déficit de canne.
Deux sachets de sucre pour une même marque. L'un, estampillé d'une petite carte de Martinique, indique clairement qu'il s'agit de "sucre de canne de Martinique". Alors que sur l'autre est inscrit "sucre de canne".
Une différence que de nombreux Martiniquais semblent avoir découverte début mars lorsque la marque a annoncé une procédure de rappel sur certains produits.
Et plus de la possible "présence de corps étrangers métalliques" dans le sucre de la marque le Galion, c'est le recours à des "fournisseurs extérieurs de sucre" qui semble avoir surpris et fait réagir.
Pourtant, cela fait plusieurs années que la seule sucrerie de l'île a fait le choix d'importer, afin de pallier le manque de matière première : la canne à sucre.
Écoutez Philippe André, directeur de la sucrerie le Galion :
Philippe André (Galion/importation)
Le sujet de fond est l'insuffisance actuelle du tonnage de canne.
Le souci n'est pas notre capacité à fabriquer du sucre de canne, mais la quantité insuffisante de matière première.
Il nous faudrait un minimum de 60 000 tonnes de cannes dans un premier temps pour produire une quantité satisfaisante.
Sachant que l'année dernière, sur la campagne 2020, la quantité de cannes que nous avons reçues était d'environ 40 000 tonnes.
La canne à sucre, un secteur en crise
La Martinique compte 3 900 hectares de terres plantées en canne à sucre. Une matière première utilisée pour produire du sucre et du rhum. Selon les "données campagnes de la sucrerie du Galion", au fil des années, la quantité de cannes broyées a diminué et celle de sucre produit également.
En 2020, la production globale de canne à sucre était de 206 553 tonnes. 167 846 livrés en distillerie et 38 708 tonnes à la sucrerie qui ont permis de produire 1 194 tonnes de sucre.
Une quantité qui selon la direction, ne permet pas de satisfaire les besoins du marché. Ainsi, en 2020, l'usine aurait importé la moitié du sucre vendu sous sa marque. Un recours à l'importation qui remonte "au début des années 2010", mais qui ne serait pas systématique chaque année.
Concernant sa provenance exacte, le directeur reste évasif.
Ce sucre que nous faisons venir, c'est un sucre que nous sélectionnons sur des cahiers de charges qui sont extrêmement précis.
C'est du sucre qui vient de l'espace européen qui est fabriqué dans des normes extrêmement précises. C'est du sucre de canne qui vient d'Europe.
L'important, ce n'est pas le territoire en particulier d'où il vient, mais est-ce qu'il répond aux exigences que nous avons.
L'idée est que ce sucre-là ait une qualité, la plus proche possible de celle du sucre que nous fabriquons.
Selon les années et selon la quantité de cannes disponible, la proportion peut changer.
Si on prend l'année 2020, on va considérer qu'on est à peu près sur du 50-50.
Vous pouvez considérer que c'est arrivé pour la première fois en 2012, mais ce n'est pas systématiquement chaque année.
L'île compte 183 planteurs de canne à sucre. Sica Canne-Union, le principal regroupement de professionnels du secteur crie haut et fort ses difficultés. Victime de mauvaises herbes, la profession manque également de main-d'oeuvre pour l'entretien des cannes. Une situation qui expliquerait le manque de rendement.
Mais dans l'impasse et désireux de faire tourner son usine qui a été modernisée au fil du temps, le directeur n'hésite pas à lancer un appel aux vocations.
La difficulté actuelle c'est que nous n'avons pas assez de canne. Donc la question c'est comment faire en sorte qu'il y ait plus de cannes ?
D'ailleurs, c'est un appel que nous lançons à tous ceux et celles qui auraient du foncier qui ont envie de se lancer dans cette culture. Nous pouvons les aider y compris financièrement pour planter des surfaces en cannes pour que nous ayons la quantité de cannes dont nous avons besoin.
Faire du sucre de canne de bonne qualité, on sait faire. Notre souci aujourd'hui, c'est qu'on manque de matière première...
La sucrerie le Galion a un statut particulier puisqu'il s'agit une société d'économie mixte dont le capital est majoritairement détenu par la Collectivité Territoriale de Martinique (55,5%).