La réparation des séquelles des crimes coloniaux, un débat qui reste d’actualité en Martinique

Konwa pou réparasyon en Martinique.
Depuis lundi 8 mai 2023, la 23e édition du Konvwa pou réparasyon s’est ébranlé de Sainte-Anne pour rappeler que la réparation des crimes que furent la traite négrière et l’esclavage des Africains reste à l’ordre du jour.

Sommes-nous disposés à obtenir réparation des séquelles des crimes contre l’humanité subis par nos ancêtres, à savoir la traite négrière et  l’esclavage ? Sommes-nous prêts à batailler pour obtenir justice au nom de nos valeureux et malheureux aînés qui ont vécu la barbarie humaine justifée par l’appât du gain 

Chacun répondra, selon son échelle de valeurs, sa culture politique et son sens de l’histoire. Il reste que ce genre de débat se pose encore en Martinique, en Guadeloupe et en Guyane alors qu’il est clos chez nos voisins. L’émancipation incomplète de nos peuples l’explique largement.

Le sujet des réparations des conséquences des crimes commis durant la période esclavagiste est devenu un débat dépassionné dans les pays du Caricom, la Communauté des Caraïbes. Pourtant, l’Angleterre n’a pas voté de loi, comme la France, considérant crimes contre l’humanité la traite des peuples d’Afrique et leur mise en esclavage.

 

Début du Konwa Pou Réparasyion (convoi pour les réparations);

Le cadre juridique de la loi Taubira ignoré par les juges

La loi Taubira de 2001 donne un cadre juridique aux actions à entreprendre pour évoquer cette page douloureuse de l’histoire de France et, surtout, pour la dépasser. Pourtant, les multiples actions judiciaires entreprises par les militants du Mouvement international pour les réparations (MIR) présidé par Garcin Malsa ont toutes échoué à ce jour. Les magistrats ignorent volontairement cette loi.

Il est vrai que de larges fractions de notre opinion publique se montre indifférente ou hostile à débattre du sujet. Alors même que chacun admet que la justice doit passer, car le passé ne passe pas. Si nous étions massivement mobilisés pour cette cause, nous aurions déjà obtenu des excuses officielles de l’Etat français, à l’instar de ses homologues de Grande-Bretagne et des Pays-Bas.

Mieux, nous aurions pu obtenir des actes concrets visant à restaurer la dignité des peuples bafoués par ce manque de respect envers la mémoire de leurs ascendants. Le Caricom a emprunté cette voie depuis une bonne décennie, avec des résultats tangible.

Travail de conscientisation des enfants de Martinique.

Le Caricom a dix d’avance sur les territoires français

L’organisation a pris l’initiative, en septembre 2013, d’assigner en justice la France, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, l’Espagne, le Portugal, la Norvège, la Suède et le Danemark. Objectif : exiger réparation des préjudices causés par les conséquences de l’esclavage et de la colonisation.

Puis l’ONU a validé l’initiative du Caricom appelée "Plan d’action pour la justice réparatrice pour les victimes du génocide, de l'esclavage, de la traite des esclaves et de l'apartheid racial" adopté lors d’un sommet à Saint-Vincent en mars 2014. Il s’agit d’une série de demandes adressées aux anciens empires coloniaux - Grande-Bretagne, Pays-Bas et France en premier lieu.

Parmi les dix points contenus dans ce plan, citons le transfert de technologie, l’annulation de la dette extérieure des pays de l’archipel, ou encore des investissements massifs pour améliorer les sytèmes de santé et d’éducation. L’idée de la réparation des crimes coloniaux fait son chemin, plus autour de nous qu’en Martinique mais, nous le savons bien, la roue de l’histoire ne s’arrête jamais.