Coulées de boues volcaniques (Lahars), risques d'éruption, érosion, séismes, sargasses, brumes de sable : le Prêcheur, commune de l'extrême Nord de la Martinique, doit faire face à tous les effets, ou presque, du dérèglement climatique. Gros plan sur "l'exemple préchotin" de gestion des risques.
Coincé entre le volcan et la côte, le Prêcheur, commune de l'extrême nord-ouest de la Martinique, doit faire face à un cocktail de risques.
Les récents soubresauts de la Pelée ont rappelé aux préchotins, s'il en était besoin, que le volcan peut se manifester à tout moment et que leurs maisons, l'école...la commune toute entière, pourrait tout simplement disparaître.
Vivre avec un volcan actif
La rivière volcanique qui coule le long de la Pelée pour se jeter dans la mer du Prêcheur traverse donc la ville et lui impose deux risques supplémentaires : la submersion en cas de fortes pluies et les fameux lahars.
Ces coulées de boues volcaniques menacent depuis quelques années maintenant de détruire certains quartiers. À Coquette, à Poi, aux Abymes, ou encore dans le bourg, les habitants vivent avec une épée de Damocles au-dessus de la tête.
Ce matin-là, Man Nini et Lili, deux préchotines de générations différentes, discutent, comme à leur habitude, des actualités de la commune. Loin des "milans" les deux femmes racontent comment elles ont appris à vivre avec les risques.
Pour Man Nini, déjà d'un certain âge, il a fallu s'adapter. Le système d'alerte, mis en place par les autorités, est fait de capteurs placés dans le lit de la Rivière du Prêcheur. Reliés à une sirène, ils permettent, en cas d'événements (lahars ou torrents d'eau) d'avertir les habitants du danger imminent.
Cette sirène retentit à chaque coulée de boue, par exemple. Elle rythmait il y a peu de temps encore la vie de la commune. Après des mois d'alertes (depuis 2009), presque quotidiennes, Man Nini, comme les autres préchotins, a appris à vivre... la peur au ventre.
Pourtant, le risque de Lahars ou de submersion à cause de la rivière du Prêcheur n'est pas ce qui perturbe le plus la population.
Entre érosion et lahars, plus de 300 préchotins sont en danger
Chaque année en Martinique, la mer avance de plus de 80 cm en moyenne. Le Prêcheur fait, en la matière, tristement office d'exemple. Pour s'en rendre compte, il suffit de jeter un oeil sur le littoral.
Entre 1950 et 2015, la plage a perdu plus de 80 mètres. Par endroits le recul de la côte atteint même les 135 mètres.
Alex Pierre-Nicolas a grandi au Prêcheur avant de partir vivre en France hexagonale. Il y est resté 40 ans avant de revenir il y a 5 ans dans sa commune d'enfance. C'est avec une certaine amertume qu'il constate les effets du dérèglement climatique sur le visage de la ville qu'il a connu.
Le relogement dont parle Alex est en cours. Plus de 300 préchotins, soit une centaine de familles, devraient à terme être déplacés vers les terres pour plus de sécurité. Le maire de la commune, Marcelin Nadeau, a en effet entrepris un vaste programme de "recomposition spatiale".
Ce programme est aussi important que délicat à mettre en place. Les différentes consultations populaires nécessaires, ont mis en lumière différentes problématiques. Parmi elles, la désaffection du Bourg tant regrettée par Lili.
Un bord de mer qui se vide et aussi une problématique plus économique : le passage du statut de propriétaire à celui de locataire, pour les personnes relocalisées.
Résultat, un programme délicat à mettre en oeuvre. Il devrait se concrétiser dans les mois à venir. En attendant, certains préchotins ne restent pas les bras croisés.
Des initiatives citoyennes face à l'érosion
Jean-Philippe Tresdoi a toujours vécu au Prêcheur. Voir sa commune être ainsi chaque année un peu plus défigurée par la mer qui grignote la plage, lui a donné une idée.
Avec ses petits moyens Jean-Philippe participe donc lui aussi à la gestion des risques au Prêcheur. D'autres ont fait le choix de partir.
Ainsi, en 50 ans, la ville a perdu plus de 50% de sa population. Celle-ci est passé de 2 613 habitants en 1967 à 1 252 habitants en 2018. Le dernier recensement confirme la tendance.