Parmi les nombreuses tâches au programme de la future assemblée, la réévaluation des rapports qu'entretiennent les élus avec le représentant de l'Etat. Une nécessité, au moment où nous avons besoin de responsables politiques pleinement investis de leurs responsabilités.
Le préfet est-il le vrai chef politique de la Martinique ? Est-il placé sur un niveau hiérarchique plus élevé que celui de la Collectivité Territoriale de Martinique ? Un certain nombre d’événements portent à le croire, alors qu’il n’en est rien. La prééminence du représentant local de l’Etat sur les élus de la collectivité majeure n’a pas lieu d’être.
En dépit des croyances et de certaines pratiques à l’oeuvre, il n’est écrit nulle part que le pouvoir politique réel est localisé à la préfecture. Depuis bientôt quarante ans, une redistribution des pouvoirs a été effectuée entre l’Etat et les collectivités locales par la dynamique de la décentralisation, dans toute la France.
Une première loi, du 2 mars 1982, instaure une nouvelle répartition des pouvoirs et missions entre les communes, les départements, les régions et l’État. Au fil de ces quatre décennies, plusieurs dizaines de lois et de décrets ont permis aux collectivités de se substituer à l’État pour la plupart des prérogatives qu’il exerçait jusque-là.
La décentralisation date de 40 ans, mais…
Les tâches sont clairement réparties par les textes. Il revient au préfet d’exercer ou de coordonner dans le territoire les compétences régaliennes de l’Etat : la sécurité intérieure, la justice, la monnaie, la diplomatie. L’Etat est également en charge de la politique économique, de la santé et de l’éducation, notamment.
Ces responsabilités sont partagées avec les collectivités locales. Lesquelles ont à leur charge de toutes les autres compétences dont l’application touche à la vie quotidienne de la population. Par exemple, le transport collectif.
Le préfet Franck Robine, voici trois ans, était obligé de réunir employeurs et salariés pour mettre fin à une énième grève incompréhensible. Et cela, au nez et à la barbe des élus de l’agglomération du Centre, la CACEM, et de la CTM.
…les élus restent trop timides face au préfet
Deuxième exemple : le feuilleton ridicule de l’eau. Le préfet actuel a regretté, lors du carême de l’année dernière, l’échec collectif de ce service public. Les élus concernés n’ont pipé mot. Troisième cas, celui de la crise sanitaire, durant laquelle les suggestions émises par les maires et les dirigeants de la CTM ont été souvent ignorées, les technocrates ayant pris le pas sur nos élus.
Ces exemples illustrent la nécessité de rééquilibrer les responsabilités entre le préfet et les élus locaux. Personne n’empêchera à nos représentants de réclamer le respect de leurs prérogatives. S’ils continuent de rester timides, la nature politique ayant horreur du vide, l’Etat reprendra la main, à rebours de la dynamique de la responsabilité locale.