Les points de captage d'eau ne sont pas répartis harmonieusement en Martinique, ce qui se comprend du fait du relief de l'île. Il y a beaucoup plus d'eau dans le Nord et le Centre que dans le sud de l'île. Selon l'Office de l'Eau (ODE). Cette concentration des prélèvements peut constituer un risque en situation de crise, comme une sécheresse par exemple.
Une problématique que connaissent les présidents des trois comités d'agglomération et particulièrement Bruno Nestor Azérot, président de Cap Nord, dont la ressource en eau est sollicitée en période de sécheresse.
Le président réfute l'idée selon laquelle le Nord "ne veut pas donner de l'eau !'
Nous ne pouvons pas donner ce que ce que nous n'avons pas!
Bruno Nestor Azérot, président de Cap Nord
La source Morestin au cœur des convoitises
Et en la matière, Cap Nord prétend gérer au mieux sa ressource en période de sécheresse.
Durant cette période de pénurie, l'EPCI du Nord achète 4 000 à 8 000 m³ d'eau potable par jour.
Difficile dans ces conditions de donner de l'eau au centre, d’autant que la source de Morestin au Morne Rouge, alimente déjà 70 % de Cap Nord.
Son débit de 4 700 m³ ne peut pas être augmenté pour alimenter le centre qui réclame 50 % de cette ressource, soit 2 000 m³ par jour.
"C'est la seule source du Nord susceptible techniquement d'alimenter la commune de Schoelcher et nous ne pouvons fournir que 10 % de la demande", précise Félix Ismain, le président de la commission eau et assainissement de Cap Nord.
La source Morestin ne peut pas alimenter Schoelcher en raison des besoins de Bellefontaine et de Case Pilote.
La Cacem sourde aux arguments de Cap Nord
Ce constat avait déjà été dressé lors des rencontres entre la CACEM et Cap Nord. Les techniciens et présidents s'étaient même rendus sur place, en février 2021 pour constater les capacités de la source Morestin.
Le 16 février 2022, le président de la Cacem saisit Cap Nord et demande la livraison de 2 000 m³ d'eau par jour pour le quartier Fond Bellemare.
Le 15 novembre 2023, les membres de la commission mixte subvention et finance de Cap Nord émettent un avis défavorable sur l'interconnexion Nord Caraïbe entre Cap Nord et la Cacem et sur la vente d'eau en gros à la Cacem.
Selon les données du procès-verbal du conseil communautaire de Cap Nord du 20 novembre 2023, la Cacem indique par la suite avoir réalisé des travaux à Schoelcher et est prête à recevoir l'eau de la source Morestin pour récupérer 240 m³ d'eau par jour...
Durant ce conseil communautaire, les élus rejettent à l'unanimité l'opération d'interconnexion Nord Caraïbe entre Cap Nord et la CACEM et la vente d'eau en gros.
La Cacem a accompli des travaux d'interconnexion mais nous n'avons pas de ressource pour cela.
Félix Ismain président de la commission eau et assainissement de Cap Nord
Un passage en force de la Cacem ?
Les travaux ont effectivement été réalisés, mais l'eau ne coule pas dans les tuyaux. Pourquoi alors avoir entrepris ces travaux d'envergure sachant qu'ils ne seraient pas utiles ?
Pourquoi ne pas avoir réhabilité les sources de captages de Schoelcher pour remédier au déficit en eau de la commune ?
Pourquoi n'avoir pas investi les fonds des travaux d'interconnexion dans la réparation du réseau d'eau qui, selon l'ODE, accuse 40 % de pertes ?
Des questions pour l'instant sans réponse, la Cacem n'a pas encore répondu à nos sollicitations.
À l'aube de la mise en place d'une autorité unique de l'eau, voulue par Serge Letchimy, les comités d'agglomération semblent naviguer en eaux bien troubles.