97e Congrès de l'Association des Maires de France (AMF) : Les maires d'outre-mer entendent faire reconnaître les particularités de leurs territoires, trop souvent oubliées dans les lois et autres dispositions taxées de "jacobinisme".
Par Sophie LAUTIER PARIS, 24 novembre 2014 (AFP) - Rythmes scolaires, réforme territoriale, pollution marine ou encore risque sismique: les maires d'outre-mer entendent faire reconnaître les particularités de leurs territoires, trop souvent oubliées dans les lois et autres dispositions taxées de "jacobinisme".
Les édiles ultramarins, qui ouvraient lundi le 97e Congrès de l'Association des Maires de France (AMF), vont rédiger une "motion spécifique" pour promouvoir une "approche différenciée" du gouvernement à leur égard. Ce texte sera remis mardi à la ministre des Outre-mer, George Pau-Langevin.
"Il faut que l'Etat se rende compte que derrière les plages et les cocotiers, il y a des hommes et des femmes qui vivent dans des conditions difficiles", a souligné Saïd Omar Oili, président de l'association des maires de Mayotte.
La question des rythmes scolaires a été souvent citée comme une réforme difficile à mettre en oeuvre, voire inapplicable.
"De Kourou a été lancée la sonde Rosetta et nous avons encore des enfants qui se lèvent à 4h30 pour prendre la pirogue et aller à l'école, parfois à 60 km de chez eux!", a dénoncé le président des maires de Guyane, David Riché.
"Je ne pense pas qu'une journée pleine le mercredi soit favorable à leur métabolisme", a ajouté M. Riché, maire de Roura, commune de 3.000 habitants sur une superficie "80 fois celle de Bordeaux".
Le représentant de Mayotte a renchéri: "On nous demande les rythmes scolaires mais nous avons la rotation scolaire c'est-à-dire que la même salle est utilisée pour deux classes différentes dans la même journée car nous sommes en déficit de 600 classes!".
"C'est méconnaître la réalité", a estimé Jacques Pélissard, le président de l'AMF de certaines règles venues de Paris. De même sur la réforme territoriale qui imposerait un chiffre plancher de 20.000 habitants pour les intercommunalités: "c'est une erreur", a-t-il ajouté, "et cela vaut aussi pour le financement des Sdis (services départementaux d'incendie et de secours)".
"C'est un jacobinisme qui n'est plus d'actualité. Il faut laisser une possibilité d'adaptation", a soutenu M. Pélissard, convaincu qu'il faut laisser les "élus de porter des solutions" adaptées à leur territoire, insulaire pour la quasi-majorité ou d'une superficie immense pour la Guyane.
- 'Exceptionnellement injuste' -
Comme leurs homologues de métropole, les maires ultramarins se sont émus de la diminution drastique des dotations de l'Etat.
Avec "la plus grande maternité d'Europe et ses 8.000 naissances par an" à Mamoudzou, une "immigration clandestine qui nous bouffe et nous empêche toute politique prospective", M. Omar Oili , maire de Dzaoudzi-Labattoir, s'est demandé "pourquoi va-t-on appliquer à ce territoire en retard la même baisse de dotation ?".
"Energie, assainissement, eau potable, mise aux normes sismiques des écoles: nous avons du pain sur la planche et au lieu de baisse de dotation, nous aurions plutôt besoin de ressources nouvelles", a fait valoir Jean-Claude Lombion, représentant de la Guadeloupe.
De son côté, M. Riché (Guyane) a dénoncé un "traitement exceptionnellement injuste" dans le calcul de la dotation superficiaire de son département. "Nous sommes à 3 euros l'hectare alors que les communes de montagne sont à 5 euros", a-t-il expliqué, demandant un alignement.
Les élus ont aussi exprimé leur souhait d'une meilleure collaboration avec les services de l'Etat comme par exemple pour l'invasion des algues sargasses aux Antilles. Si en Martinique, des jeunes du SMA (service militaire adapté) ont prêté main forte pour déblayer les plages de tonnes d'algues en décomposition, les élus guadeloupéens semblent avoir été plus seuls.
"Est-ce que face à ce problème qui touche l'économie et la santé des gens, les services de l'Etat peuvent nous aider, nous les petites communes qui n'avons pas les agents suffisants ?", a demandé le maire de Petit-Canal, 8.000 habitants. Tous les Antillais demandent un classement des littoraux touchés en "catastrophe naturelle" et une aide pour mieux comprendre scientifiquement ce phénomène.
Face à ce cahier de doléances, la ministre s'est employée à rassurer les élus tout en leur signifiant qu'ils allaient aussi "participer à l'effort de la Nation". Toutefois, Mme Pau-Langevin a affirmé que "l'arbitrage sur le Fonds de péréquation intercommunal (FPIC) est favorable à l'outre-mer pour que l'effort ne soit pas insurmontable".
AFP : SOPHIE LAUTIER