Le décompte macabre continue. Après un homme d'une trentaine d'années retrouvé mort dans le quartier de la Vigie vendredi, un autre de 16 ans a été retrouvé ce samedi et un dernier de 14 ans ce dimanche. Un enchaînement de faits dramatiques qui exaspère la population.
Ce week-end a été particulièrment traumatisant à Labattoir. Pendant trois jours, à la Vigie et au quartier Cétam, des affrontements particulièrment violents se sont produits. Et le bilan est lourd : deux cases incendiées, d'autres saccagées, des véhicules calcinés et surtout trois hommes dont deux mineurs tués.
Selon les premiers éléments de l'enquête concernant ces trois homicides, tous ont un point commun : les trois hommes ont perdu la vie en étant victimes de coups à l'arme blanche.
Vendredi soir, un homme a été tué à coups de machette. Un autre jeune homme de 16 ans est décédé samedi soir. Et un autre de 14 ans dont le corps a été retrouvé ce dimanche. On est dans une série vraiment dramatique.
Pour l'instant, les enquêteurs n'ont pas établi de liens avec tous ces faits. Mais pour les habitants des quartiers de Cétam et la Vigie, il n'y a aucun doute. Et le maire de Dzaoudzi-Labattoir Saïd Omar Oili, tout comme ces habitants, parle de guerre communautaire. Des règlements de compte entre personnes originaire de deux localités anjouannaises. Quoiqu'il en soit, celui-ci a appelé au calme, car sa population est excédée par ses violences.
L'enquête a été confiée à la section de rencherche de la gendarmerie de Pamandzi. Et selon Yann Le Bris, des moyens conséquents ont été déployés pour retrouver les auteurs des trois meurtres.
"Des moyens conséquents engagés pour l'enquête" Yann Le Bris, procureur de la République près le tribunal judiciaire de Mamoudzou
Mais ces faits violents ne rassurent pas les citoyens. Le collectif de Petite Terre a organisé un rassemblement ce matin au Four-à-Chaux à Labattoir pour faire connaître son mécontentement.
Et une délégation d'une trentaine de personnes s'est rendue à la Case Rocher à Dzaoudzi, lieu de résidence du préfet de Mayotte pour l'interpeller à ce sujet. Ils ont été stoppés place de France par une haie de gendarmes. Leur but était de voir le préfet lui-même pour qu'il réponde à leurs questions. Mais après deux heures d'attente, c'est Laurence Carval, la directrice de cabinet de Jean-François Colombet qui est allé à leur rencontre. malgré quelques huées, la discussion a pu se tenir.
Je ne peux pas vous laisser dire que nous laissons les délinquants dehors braver le couvre-feu. Je peux vous dire qu'hier il y avait une centaine de gendarmes dehors, dont une quarantaine en Petite Terre. Et il y en aura plus ce soir. Plus de monde, c'est plus de patrouilles.
Mais ces explications et promesses n'ont pas convaincu. Le collectif a fustigé l'immobilisme dont aurait fait preuve la préfecture pour ramener le calme et la sécurité à Labattoir. Et il a rappelé que trois de ses membres avaient été mis en détention provisoire car soupçonnés d'avoir tué un délinquant.
Cela fait trois jours que l'on voit votre action sur le terrain. Résultat : il n'y en a pas. Cela fait trois jours que vous n'avez rien fait et là vous nous dites que vous allez renforcer l'effectif des forces de l'ordre ? Peut-être que vous manquez de moyens. Si vous ne les avez pas, si vous n'êtes pas capables de nous protéger, dites à la population "Démerdez-vous !"
Ce sentiment d'abandon des Mahorais a également été relayé par les 4 parlementaires (les 2 députés Ramlati Ali et Mansour Kamardine et les 2 sénateurs Hassani Abdallah et Thani Mohamed Soilihi, le président du conseil départemental Soibahadine Ibrahim Ramadani et le président de l'association des maires de Mayotte et maire de Pamandzi en Petite Terre Madi Madi Souf. Dans leur communiqué, les élus reprochent au gouvernement d'oublier Mayotte.
Les reports successifs depuis plusieurs mois d’importantes visites ministérielles pour annoncer les mesures nécessaires et la montée en puissance des moyens de lutte contre l’insécurité et l’immigration clandestine attestent de l’indifférence d’une partie des autorités politiques et administratives nationales vis-à-vis des Français de Mayotte.
Le gouvernement doit assumer sa compétence sur toutes les parties du territoire national, y compris Mayotte. Il se doit d’agir sans délai et avec résolution en matière de lutte contre les bandes violentes armées qui accablent les populations du 101ème département.
Ils en veulent tout particulièrement au ministre des Outremer Sébastien Lecornu et au ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, qui n'ont jamais mis les pieds à Mayotte pour s'enquérir de la problématique de la sécurité. Et surtout d'avoir pris position pour le jeune Yuriy en région parisienne dont le sort pour l'instant est moins grave que les trois morts du week-end.
3 assassinats à l arme blanche perpétrés par des bandes barbares à #Mayotte ce seul week-end dont 2 adolescents de 15 et 14 ans. Qu'attendent @GDarmanin et @E_DupondM pour agir avec force et répondre à nos propositions répétées depuis des mois? #YURIY
— Mansour KAMARDINE - Officiel (@Kamardine_M) January 24, 2021
De nombreux Mahorais se sont également mobilisés sur les réesaux sociaux. Et certains déçus de voir que la cause de Mayotte ne mobilise pas au niveau national de conclure : "Silence, on tue !"