Transports : où en est la mobilité douce à Mayotte ?

Piste cyclable
La mobilité douce désigne l'ensemble des déplacements non motorisés comme la marche à pied, le roller, le vélo, ou encore la trottinette. Elle constitue une des réponses aux enjeux qui pèsent sur la planète, l'économie et la qualité de vie. Si dans plusieurs grandes villes métropolitaines, la mobilité douce fait partie du mode de vie des habitants, à Mayotte, des initiatives sont prises ici et là par certaines communes, mais elles sont encore loin d'apporter un réel changement marquant qui pèserait sur la protection de la planète.

Le premier moyen de locomotion en termes de mobilité douce est bien sûr la marche. Idéale pour les personnes résidant au cœur des villes, marcher constitue un excellent moyen de se dépenser et de garder une bonne forme physique. La marche permet en effet de faire travailler les articulations, les muscles, les tendons ainsi que le système cardiorespiratoire. Dans le 101ème département les habitants se servent plutôt de leurs pieds pour de court trajet ou dans le cadre d'une activité physique.

Oui à la marche mais dans un cadre sportif

Ils sont trente participants ce samedi pour la randonnée des deuxièmes samedis du mois à Hamouro.

De nombreuses petites associations ont vu le jour au fil des années à Mayotte. Des associations qui mettent en avant le sport par la marche. Pour n'en citer que deux, nous avons Amis Raid Rando Mayotte de la commune de Mamoudzou. D'après l'un des membres de la structure, au travers de leurs courses en nature et de leurs randonnées, ils font la promotion du sport, de la santé, de la culture et du loisir de Mayotte. La deuxième porte le nom de Maoré Rando, dont le fondateur est originaire de Bandrélé. "Une association incontournable dans la découverte de la biodiversité et qui propose des sorties pédestres à travers différents sentiers de Mayotte, à la découverte d'animaux, de plantes endémiques, dans une nature authentique et exceptionnelle".  La marche mobilise le corps de façon plus douce par rapport à d'autres sports plus intenses, cependant, elle demeure une activité physique complète dont les effets peuvent être visibles sur la forme physique lorsqu'elle est pratiquée quotidiennement. 

Le vélo

Vélos en location en Petite-Terre

À l’instar de la marche, 30 minutes à bicyclette participe aussi à une bonne santé cardiovasculaire. Elle simplifie les déplacements en faisant gagner du temps aux cyclistes qui évitent ainsi les embouteillages. À Mayotte, les embouteillages sont justement monstres, en particulier dans la commune de Mamouzou, notamment aux heures de pointe. Le vélo représente donc un réel alternatif. De plus en plus de salariés enfourchent les leurs pour faire la traversée de la barge le matin et ainsi arriver au travail à l'heure. 

Au mois de décembre 2021, la communauté d'agglomération de Dembéni-Mamoudzou (Cadema) avait lancé la prime à vélo dans le cadre de sa politique incitative à la mobilité douce. Concrètement, tous les habitants majeurs de la communauté des communes recevaient une prime allant jusqu'à 600 euros sous forme d'un bon pour l'acquisition d'un vélo classique ou électrique. Pour cela, les futurs cyclistes étaient invités à se rendre chez l'un des partenaires de l'opération: Akxion Cycles, Mob'helios, Tecma, Sima Sarl ou encore Intersport. Était prévu un bon par personne et deux bons par foyer. L'annonce avait incité de nombreux habitants à s'acheter un vélo.   

Le président de la communauté d'agglomération Dembéni-Mamoudzou de l'époque expliquait que "cette démarche s'inscrit dans un plan global" et qu'en 2022, le travail se poursuivrait en lien avec les communes et la construction de 3 km de voie verte le long des voies destinées au Caribus. 

Depuis 2021, la Cadema et la ville de Mamoudzou organisent par ailleurs la Fête du vélo. Il s'agit de se promener à bicyclette ou de s'initier à la pratique de ce moyen de locomotion. Le but étant toujours de pousser les habitants de la zone à privilégier le vélo pour se déplacer au lieu de la voiture. L'an dernier, en 2024, la Cadema a réceptionné 16 vélos avec assistance électrique louée par la société Mob'Hélios, située en Petite-Terre. Ils sont mis à la disposition des agents pour leur trajet domicile travail, afin d'impulser l'utilisation des "mobilités douces" à Mayotte. 

Mais en 2015, un moniteur d'auto-école au nom de Dhinouraini Elkader avait déjà eu l'idée de désengorger le centre-ville de Mamoudzou des embouteillages en proposant aux habitants une location de vélos électriques, les "e-vélos". Selon lui, " il faut d’urgence trouver une alternative aux véhicules et changer nos modes de déplacement. J’en ai déduit qu’en proposant des vélos en location, la population pouvait adhérer à un moyen de déplacement abordable. "

La Petite-Terre  au défi de la mobilité durable

"Avec une population de 30 000 habitants pour 11 km2, Petite-Terre est arrivée à saturation de son parc automobile. Il est donc plus que temps de sensibiliser la population à d'autres modes de déplacement comme le vélo, la marche", a déclaré Archadi Abassi, le président de Communauté de Communes de Petite-Terre à nos confrères du JDM. 

La pratique du vélo est susceptible d’améliorer le cadre de vie par la réduction de la pollution due aux émissions de gaz à effet de serre et une baisse du bruit produits par les véhicules motorisés. "À l’heure actuelle l’utilisation systématique de la voiture représente 40% de la consommation en énergie primaire sur Petite-Terre alors qu’il s’agit pourtant d’un territoire aux courtes distances, propice à la généralisation des modes de transport doux ", précise la vice-présidente, interrogée par le Journal de Mayotte.

Vélo en réparation

Les membres de la Communauté de Petite-Terre sont conscients du fait qu'il faut inciter les gens à préférer le vélo à la voiture, en leur créant les bonnes conditions d’aménagement. 7km d'itinéraires piétons et cyclables sécurisés sont à mettre en place. 

Elaboré dans le cadre de l’appel à projets TENMOD de France Mobilités, opéré par l’ADEME, la stratégie de mobilité proposée dans le plan de mobilité repose sur 4 grandes orientations pour 25 actions visant à développer l’écomobilité dans le territoire : planification urbaine, mobilités actives et partagées, gestion du stationnement, apaisement des vitesses, modes d’organisation innovants, nouveaux services de mobilité, management de la mobilité, numérique, transports plus efficients… Et bien sûr, le déploiement de toutes ces solutions contribue à dynamiser la Petite Terre.

Pour sensibiliser petit à petit la population à opérer des changements dans leur mode de vie et de fonctionnement au quotidien, la communauté des communes, à, en 2024, organisés des journées de sensibilisation par des jeux. Les enfants sont la cible première de ce projet mais les adultes ne sont pas en reste. Ceux qui n'ont pas appris à faire du vélo durant leur enfance, auront par exemple des cours d'apprentissage.  Les Petits-Terriens sachant déjà en faire et n'ayant pas de vélo personnel, ont toujours la possibilité d'en louer un, à côté de la gare maritime de Dzaoudzi, chez Mob'helios. 

La trottinette

Fête de la trottinette sur le parking de Carrefour

Elle a fait aussi son apparition à Mayotte depuis quelque temps maintenant. Si au début, la trottinette était appréciée en particulier par les enfants et les adolescents pour effectuer des promenades, aujourd'hui on trouve un nombre incalculable de trottinettes conduit par des adultes. Ces derniers s'en servent par exemple pour se rendre sur leur lieu de travail. Et souvent, ils optent pour des trottinettes électriques, plus confortables à manier afin de ne pas arriver au travail en sueur. 

Comme pour les autres moyens de locomotion, des règles sont à suivre  afin de ne pas se mettre en danger sur la route. Des règles que tout le monde doit connaître, à commencer par les enfants. Durant plusieurs années d'affilée, le Lions Club Mayotte Lagon organisait la journée de la trottinette.

Objectif: divertir les enfants tout en les sensibilisant notamment au code de la route et donc à la sécurité routière. 

Le roller 

cours de roller à l'aéroport de Pamandzi

Pour voir des amateurs de roller, il faut se rendre sur le parking de l'aéroport de Pamandzi. Sur place, un passionné donne des cours de roller ouvert à tous, mais souvent, ses élèves sont des enfants. Le but est d'apprendre à faire du roller pour pouvoir par la suite profiter de promenades dans les rues de la Petite-Terre. Élément important à retenir, lorsqu'on est en roller, on est considéré comme un piéton et l'on doit donc rouler sur un trottoir. 

Mayotte fait aujourd'hui face à une forte croissance démographique qui se traduit notamment par une urbanisation rapide et le développement des villes moyennes. La mobilité douce est donc une solution qui fait partie des objectifs phares de l'action de l'Etat. L'accroissement du nombre de cyclistes, de rollers, trottinettes et autres, répond en effet à plusieurs enjeux de politiques publiques nationales : diminuer l’empreinte carbone du secteur des transports, promouvoir des modes de vie sains et augmenter le pouvoir d’achat des ménages.

Mais les contraintes qui freinent le développement de ce mode doux sont encore nombreuses. Il existe très peu d’infrastructures spécifiques (bandes ou pistes cyclables) et la circulation est perçue comme dangereuse. 

C’est dans cette optique que les services de l’État à Mayotte lancent un appel à projets "Aménagements Cyclables" de 400 000 euros, financé par les crédits du Plan France Relance. Il intervient en complément d’autres dispositifs comme le Fonds Mobilités Actives, doté de 350 millions d’euros sur 7 ans au niveau national pour financer des infrastructures cyclables structurantes, ou la Dotation de Soutien à l’Investissement public Local, mobilisable pour le même type de projets.

Cet appel à projet Mayotte est destiné à tous les maîtres d’ouvrage publics (Département de Mayotte, EPCI, communes…) qui souhaitent financer des projets d’itinéraires cyclables sécurisés ou de résorption de points de discontinuité répondant à un besoin avéré à l’échelle de leur territoire.