Depuis un mois, l'Australie a un Premier ministre favorable à la légalisation du mariage homosexuel et pourtant, rien n'a changé. Un constat qui pousse Warren Entsch, député du parti libéral, à faire une proposition originale : faire voter le Parlement avant d'organiser un plébiscite.
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En août dernier, l'ancien Premier ministre, Tony Abbott, opposé à un changement de la loi sur le mariage, avait en quelque sorte repoussé le débat à plus tard en proposant de faire « voter les citoyens lors de la prochaine législature ». Plus question, donc, de laisser les parlementaires en débattre et en décider.
Même s'il ne partage pas les vues de son prédécesseur sur le mariage homosexuel, Malcolm Turnbull a fait savoir que le plan restait inchangé. Une déception pour Warren Entsch, qui avait déposé un projet de loi sur la légalisation du mariage gay avec une élue travailliste: « J'ai dit à Malcolm Turnbull que je pensais qu'il fallait que l'on fasse avancer cette question. En général, le résultat d'un plébiscite n'est pas contraignant. Je propose de faire en sorte qu'il soit contraignant et que ça devienne une loi. »
Ce qu'il propose, en fait, c'est d'organiser un vote au Parlement avant les prochaines élections, qui devraient avoir lieu dans un an. Mais aucune loi ne serait promulguée avant l'organisation d'un plébiscite après les élections. Si le oui l'emporte dans les deux cas, alors le mariage homosexuel sera légalisé.
Une proposition bizarre, estiment de nombreux hommes politiques, de tous partis. « L'idée qu'on vote maintenant au Parlement, puis que l'on dépense 158 millions de dollars de fonds public pour sonder la population pour savoir si on a bien voté ou non, ça semble étrange », réagit ainsi la numéro 2 du parti travailliste, Tanya Plibersek. Même Terri Butler, qui avait accompagné Warren Entsch dans sa précédente offensive, ne semble pas convaincue : « Ça semble très compliqué. Tout ce dont on a besoin, c'est que Malcolm Turnbull fasse preuve d'autorité et ait de l'influence au sein de son parti. Laissons les élus libéraux voter librement et ensuite on pourra faire passer le projet de loi qu'on a déjà déposé et qui a été débattu. On peut voter sur ce texte, on peut le faire cette semaine. »
Les critiques les plus sévères viennent toutefois du camp politique de Warren Entsch, du conservateur Eric Abetz : « On dirait un peu une embuscade tendue pour nous faire avancer. C'est une tentative d'annuler le vote écrasant de la coalition - les deux tiers des conservateurs veulent que l'on maintienne notre position sur le mariage, qui est le maintien de la vérité sur le mariage en tant qu'union entre un homme et une femme. La décision qu'on a prise au sein de la coalition, c'est que ce serait notre politique jusqu'aux prochaines élections. »
Plus étonnant, Rodney Croome, qui milite pour la légalisation du mariage homosexuel au sein d'Australian Marriage Equality, n'est pas favorable à la proposition de Warren Entsch. Il craint que le pré-plébiscite ne passe pas au Parlement : « On pense maintenant avoir une petite majorité au Sénat, et à l'Assemblée, il y a 68 personnes qui se sont publiquement déclarées en faveur du mariage gay. On a seulement besoin de huit voix de plus. »
Malgré le peu d'enthousiasme que suscite donc cette proposition, les Verts en profitent pour relancer le débat. Ils demandent à Malcolm Turnbull de laisser ses députés voter librement sur la question.