La commission d'enquête sur les crimes pédophiles en Australie permet-elle de faire changer les choses ?

Le cardinal Pell a déjà répondu aux enquêteurs de la commission royale sur les crimes pédophiles. Il sera de nouveau entendu au cours des prochaines semaines, sur demande des associations de victimes et de plusieurs responsables politiques.
En Australie, une commission royale d'enquête cherche à faire la lumière depuis deux ans sur des décennies de crimes pédophiles commis sur le territoire. Que peut-on attendre du travail de cette commission ? 
Depuis début 2013 et jusqu'à fin 2017, une commission royale d'enquête cherche à faire la lumière sur des décennies de crimes pédophiles survenus dans des orphelinats, écoles, églises, paroisses, associations sportives, et centres de détention pour mineurs. 
 
Son rôle n'est pas de traduire en justice des pédophiles, mais d'examiner la réaction des institutions face aux crimes pédophiles.
 
Que peut-on attendre du travail de cette commission d'enquête ? Au-delà des révélations sur l'ampleur des mauvais traitements subis par des milliers de jeunes Australiens, et sur le silence coupable de l'Église catholique, y aura-t-il des changements concrets ? 
 
La réponse est oui, veut croire Chris Goddard, professeur associé à l'université Monash, à Melbourne. Il est chercheur dans le domaine de la prévention de la maltraitance envers les enfants. Chris Goddard suit de près les travaux de la commission et a accompagné plusieurs victimes qui ont témoigné ces derniers mois. Les lois ne changeront pas avant la fin de l'enquête, mais des progrès se font déjà sentir, témoigne-t-il :
 
"Il y a eu un grand changement. Les institutions religieuses et privées commencent à prendre conscience qu'elles ne peuvent pas se contenter d'ignorer le problème. Et surtout, le changement principal, c'est que pour la première fois, les victimes sont entendues, on les écoute avec respect. J'ai notamment aidé Beth Henrich dans ses démarches auprès de la commission d'enquête, et elle m'a dit que c'était la première fois qu'on l'écoutait respectueusement."
 
Les victimes devraient obtenir des compensations
 
Si rien n'est encore arrêté, il est plus que probable que les victimes obtiendront des dédommagements. En Irlande, près de deux milliards d'euros ont ainsi été versés aux victimes à l'issue de neuf ans d'enquête sur les crimes pédophiles commis, pour la plupart, dans des établissements catholiques. La question commence à se poser en Australie, rapporte Chris Goddard :
 
"La commission d'enquête publie régulièrement des rapports. Dans l'un de ces papiers, il y a environ trois mois, elle a parlé des compensations en définissant le principe selon lequel les victimes devraient obtenir réparation - on doit leur fournir une aide psychologique ainsi qu'un dédommagement financier. Donc même si la loi n'a pas encore changé, les attentes à l'égard des institutions ont changé."
 
Chris Goddard attend aussi un autre changement essentiel : 
 
"Ce que j'aimerais vraiment, c'est que les personnes qui travaillent au sein des institutions, des organisations, soient obligées de signaler les cas de pédophilie. Ne pas le faire doit être considéré comme un crime."
 
Ces prochaines semaines, la commission royale d'enquête sera à Melbourne, où elle doit notamment entendre le cardinal Pell. Argentier du Vatican et ancien chef de l'Église catholique en Australie, il est accusé par plusieurs victimes d'avoir été au courant des crimes pédophiles commis par un prêtre à Ballarat et de l'avoir couvert en le mutant de paroisse en paroisse. Le cardinal Pell dément ces accusations et affirme avoir "toujours soutenu les enquêtes de police".