L'information a fait grand bruit, il y a quelques mois: l'Europe a établi une liste noire des paradis fiscaux. Et parmi les 30 pays les moins vertueux au monde, selon la Commission européenne, il y a cinq États du Pacifique : les Îles Cook, les Îles Marshall, Nauru, Niue et le Vanuatu.
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Il y a plusieurs types de paradis fiscaux, que l'on retrouve dans notre région: les Samoa, le Vanuatu, les Îles Cook et les Îles Marshall sont les quatre principaux centres financiers extraterritoriaux (offshore) du Pacifique. Ils offrent un niveau d'imposition faible tout en garantissant à leurs clients le secret bancaire.
Les États fédérés de Micronésie sont spécialisés dans les compagnies d'assurance captives, qui sont des filiales créées par de grandes entreprises pour garantir ses risques à moindre frais.
Nauru est aussi un petit paradis fiscal. Les Tuvalu et les Kiribati proposent des pavillons de complaisance.
En revanche, Niue, qui figure sur la liste noire européenne, n'est plus un paradis fiscal. Si les types de services proposés sont donc différents d'une île à l'autre, il y a, tout de même, un point commun entre ces paradis fiscaux de la région, souligne Anthony van Fossen : « La caractéristique du Pacifique, c'est que l'attention se porte sur l'Asie et sur la Chine, en particulier, ce qui n'est pas le cas des paradis fiscaux européens. Mais, même si dans l'ensemble, la grande majorité des clients sont asiatiques, certains pays entretiennent des relations de proximité avec d'autres nations. Il y a, par exemple, des liens très forts entre le Vanuatu et l'Australie, et les Îles Cook sont très liées aux États-Unis. Les Îles Marshall sont les plus mondialisées en terme de clientèle. C'est le seul paradis fiscal de la région à faire des affaires avec des clients européens.»
« Ça crée des emplois pour les populations locales »
Pour les pays de la région, permettre à de riches clients d'échapper en grande partie à l'impôt et aux obligations réglementaires de leurs pays d'origine a plusieurs avantages. Évidemment, le premier, c'est l'argent qui rentre dans les caisses. Dans les quatre principaux paradis fiscaux (Samoa, Vanuatu, Îles Cook et Îles Marshall), « cela représente 4 à 5% de l'économie du pays », selon Anthony van Fossen. Mais pour le chercheur, il y a un autre avantage essentiel : « Cela renforce les élites qui vivent dans les capitales de ces pays, parce que les services des paradis fiscaux sont concentrés dans les capitales. Ça crée des opportunités d'emploi dans les domaines de la justice, de la comptabilité et de la banque pour les locaux. Ce sont des emplois qui n'existeraient pas sans cela. Par exemple, aux Îles Cook, cela a créé des débouchés pour les Maoris indigènes diplômés en droit. Aux Samoa aussi, cela a aussi donné du travail aux avocats et comptables samoans. »
Le fait que l'argent circule renvoie aussi l'image d'un pays plus robuste financièrement : « Quand les Îles Marshall deviennent le troisième plus gros pavillon de complaisance au monde*, cela rend l'élite plus heureuse, parce que leur pays semble nettement plus important qu'il ne le serait sans ça », note Anthony van Fossen.
Dans ces paradis fiscaux, les liens entre argent et pouvoir sont évidents, estime le chercheur : « Ceux qui gèrent les paradis fiscaux ont tendance à devenir très important dans les hautes sphères du pouvoir, ils exercent une grande influence sur les politiques mises en place et sont difficiles à déloger. Ce n'est pas un hasard si la figure de proue du paradis fiscal vanuatais (Thomas Bayer, NDLR) est accusée d'avoir joué un rôle important dans le scandale des pots-de-vin versés à un certain nombre d'hommes politiques. Le fait que les paradis fiscaux soient souvent des petits pays, avec une faible population, ça permet à ces gens-là d'avoir plus facilement beaucoup de pouvoir. Ça n'arriverait pas dans des grands pays. »
Le principal inconvénient de ces paradis fiscaux, pour Anthony van Fossen, c'est que « ça a tendance à détourner les dirigeants politiques des problèmes de leur population, ils s'occupent plus de l'élite des services financiers. Ils portent moins d'attention à l'agriculture, à la construction de routes… à ce qui intéresse les électeurs.»
Niue n'est plus un paradis fiscal
Si la situation globale semble plutôt avantageuse pour les paradis fiscaux, un pays de la région a décidé d'arrêter d'offrir ce type de services : Niue. Située à l'est des Tonga, la petite île est en libre association avec la Nouvelle-Zélande. À un moment, ces activités représentaient une part considérable de l'économie : 12,8% des recettes en 2001-2002, selon Anthony van Fossen. Alors pourquoi Niue a-t-elle cessé d'être un paradis fiscal en 2007 ? Pour le chercheur, c'est « une combinaison de deux choses : l'action de banques internationales, qui étaient sous pression du mouvement de lutte contre le blanchiment d'argent, et l'action du gouvernement de Nouvelle-Zélande, qui a poussé les dirigeants de Niue à se débarrasser de ces activités ».
Le problème, souligne Anthony van Fossen, c'est que Niue est redevenue dépendante de l'aide internationale. C'est pour être plus indépendante que l'île avait établi un paradis fiscal et depuis, elle n'a pas trouvé d'alternative et est revenue à la case départ.
Les États fédérés de Micronésie sont spécialisés dans les compagnies d'assurance captives, qui sont des filiales créées par de grandes entreprises pour garantir ses risques à moindre frais.
Nauru est aussi un petit paradis fiscal. Les Tuvalu et les Kiribati proposent des pavillons de complaisance.
En revanche, Niue, qui figure sur la liste noire européenne, n'est plus un paradis fiscal. Si les types de services proposés sont donc différents d'une île à l'autre, il y a, tout de même, un point commun entre ces paradis fiscaux de la région, souligne Anthony van Fossen : « La caractéristique du Pacifique, c'est que l'attention se porte sur l'Asie et sur la Chine, en particulier, ce qui n'est pas le cas des paradis fiscaux européens. Mais, même si dans l'ensemble, la grande majorité des clients sont asiatiques, certains pays entretiennent des relations de proximité avec d'autres nations. Il y a, par exemple, des liens très forts entre le Vanuatu et l'Australie, et les Îles Cook sont très liées aux États-Unis. Les Îles Marshall sont les plus mondialisées en terme de clientèle. C'est le seul paradis fiscal de la région à faire des affaires avec des clients européens.»
« Ça crée des emplois pour les populations locales »
Pour les pays de la région, permettre à de riches clients d'échapper en grande partie à l'impôt et aux obligations réglementaires de leurs pays d'origine a plusieurs avantages. Évidemment, le premier, c'est l'argent qui rentre dans les caisses. Dans les quatre principaux paradis fiscaux (Samoa, Vanuatu, Îles Cook et Îles Marshall), « cela représente 4 à 5% de l'économie du pays », selon Anthony van Fossen. Mais pour le chercheur, il y a un autre avantage essentiel : « Cela renforce les élites qui vivent dans les capitales de ces pays, parce que les services des paradis fiscaux sont concentrés dans les capitales. Ça crée des opportunités d'emploi dans les domaines de la justice, de la comptabilité et de la banque pour les locaux. Ce sont des emplois qui n'existeraient pas sans cela. Par exemple, aux Îles Cook, cela a créé des débouchés pour les Maoris indigènes diplômés en droit. Aux Samoa aussi, cela a aussi donné du travail aux avocats et comptables samoans. »
Le fait que l'argent circule renvoie aussi l'image d'un pays plus robuste financièrement : « Quand les Îles Marshall deviennent le troisième plus gros pavillon de complaisance au monde*, cela rend l'élite plus heureuse, parce que leur pays semble nettement plus important qu'il ne le serait sans ça », note Anthony van Fossen.
Dans ces paradis fiscaux, les liens entre argent et pouvoir sont évidents, estime le chercheur : « Ceux qui gèrent les paradis fiscaux ont tendance à devenir très important dans les hautes sphères du pouvoir, ils exercent une grande influence sur les politiques mises en place et sont difficiles à déloger. Ce n'est pas un hasard si la figure de proue du paradis fiscal vanuatais (Thomas Bayer, NDLR) est accusée d'avoir joué un rôle important dans le scandale des pots-de-vin versés à un certain nombre d'hommes politiques. Le fait que les paradis fiscaux soient souvent des petits pays, avec une faible population, ça permet à ces gens-là d'avoir plus facilement beaucoup de pouvoir. Ça n'arriverait pas dans des grands pays. »
Le principal inconvénient de ces paradis fiscaux, pour Anthony van Fossen, c'est que « ça a tendance à détourner les dirigeants politiques des problèmes de leur population, ils s'occupent plus de l'élite des services financiers. Ils portent moins d'attention à l'agriculture, à la construction de routes… à ce qui intéresse les électeurs.»
Niue n'est plus un paradis fiscal
Si la situation globale semble plutôt avantageuse pour les paradis fiscaux, un pays de la région a décidé d'arrêter d'offrir ce type de services : Niue. Située à l'est des Tonga, la petite île est en libre association avec la Nouvelle-Zélande. À un moment, ces activités représentaient une part considérable de l'économie : 12,8% des recettes en 2001-2002, selon Anthony van Fossen. Alors pourquoi Niue a-t-elle cessé d'être un paradis fiscal en 2007 ? Pour le chercheur, c'est « une combinaison de deux choses : l'action de banques internationales, qui étaient sous pression du mouvement de lutte contre le blanchiment d'argent, et l'action du gouvernement de Nouvelle-Zélande, qui a poussé les dirigeants de Niue à se débarrasser de ces activités ».
Le problème, souligne Anthony van Fossen, c'est que Niue est redevenue dépendante de l'aide internationale. C'est pour être plus indépendante que l'île avait établi un paradis fiscal et depuis, elle n'a pas trouvé d'alternative et est revenue à la case départ.