Australie : début de l'enquête sur le calvaire des détenus mineurs

Image de vidéosurveillance montrant un homme saisir le cou de Dylan Voller, dans un centre de détention du Territoire du Nord.
La commission royale d'enquête sur la détention des mineurs dans le Territoire du Nord s'est réunie pour la première fois, aujourd'hui, à Darwin. Son but : faire des recommandations que les responsables politiques locaux mettront en œuvre pour éviter de nouvelles bavures.
Le scandale a éclaté en juillet dernier : la chaîne ABC a diffusé un reportage montrant des gardes du centre de détention pour mineurs de Don Dale en train d'asperger des jeunes de gaz lacrymogènes, de les jeter à travers une pièce, de les déshabiller. On peut voir aussi un jeune détenu de 17 ans, Dylan Voller, attaché sur une chaise, la tête couverte par une cagoule. 
 
Des images datant de 2010 à 2015, qui ont « profondément choqué et horrifié » le Premier ministre, « comme tous les Australiens », a-t-il souligné. Le ministre des Services correctionnels du Territoire du Nord a été renvoyé quelques heures après la diffusion du reportage et Malcolm Turnbull a décidé de mettre en place une commission royale d'enquête « pour comprendre ce qu'il s'est passé et mettre au jour la culture qui a permis que cela se produise et reste caché pendant si longtemps ».
 
Cette commission a commencé officiellement ses travaux aujourd'hui, avec une première séance publique. Son rôle est de passer en revue le traitement des détenus mineurs, d'entendre les victimes et de faire des recommandations au gouvernement. La coprésidente de la commission, Margaret White, appelle la population, et notamment les communautés et associations aborigènes à témoigner, car 97% des mineurs emprisonnés sont aborigènes : « Si on veut que la deuxième partie de notre travail - faire des recommandations aux autorités - soit une réussite, il faut que chaque personne et chaque institution en mesure de nous aider le fasse. Tout le monde doit se soucier de trouver des moyens de réduire de manière significative les cas d'abus, pour que les enfants puissent avoir des vies épanouissantes au sein de leur communauté et pour que la société civile l'emporte dans le Territoire du Nord. »
 
 
Margaret White (à gauche) et Mick Gooda (droite) président la commission d'enquête. Ils entourent le ministre de la Justice, George Brandis.


La commission va se pencher sur les faits qui se sont déroulés ces dix dernières années. Mais les mauvais traitements sont déjà connus, de nombreux rapports ont été publiés sur le sujet - il y a eu, par exemple, deux rapports publics sur les tirs de gaz lacrymogènes dans le centre de Don Dale. Mick Gooda, qui préside cette commission avec Margaret White, en est conscient. Son objectif est de faire en sorte que les conseils qui seront donnés seront entendus, cette fois : « Cette commission d'enquête doit livrer des recommandations utiles, qui, une fois mises en œuvres à travers la loi, mais aussi à travers un changement de la culture institutionnelle, permettront d'assurer un avenir meilleur pour tous dans le Territoire du Nord. Nous avons commencé à consulter des membres de la communauté aborigène, leurs représentants, les autorités, les syndicats et des experts afin que nos recommandations soient réalisables, faisables, qu'elles puissent être mises en œuvre. »
 
Plusieurs associations aborigènes se posent des questions sur la marche à suivre pour témoigner, si des fonds sont débloqués pour permettre aux victimes et aux témoins de se rendre à Darwin, où les audiences se tiendront à partir du mois prochain. C'est pour avoir une réponse à ces interrogations que John Patterson, le PDG de l'Assistance médicale aborigène du Territoire du Nord a assisté à l'ouverture de la commission, aujourd'hui : « En ce qui concerne le processus mis en œuvre maintenant et jusqu'à la publication du rapport final par les commissaires, les principales organisations aborigènes espèrent vraiment obtenir des financements pour pouvoir y participer, c'est notre principale préoccupation à l'heure actuelle. On est inondé de demandes de familles, d'individus et de communautés qui veulent savoir quelle aide leur sera apportée. »
 
La commission d'enquête a promis de prendre en charge les frais de transport et de logement des témoins, mais elle reconnaît qu'elle ne sait pas combien de personnes devront se rendre à Darwin pour être entendues.
 
Les audiences doivent se tenir de la mi-octobre jusqu'à la fin de l'année. Le rapport final ne sera rendu public que le 31 mars 2017.