Que de kilomètres dans les ailes de son Van's RV8 depuis que nous avons laissé Hugues Jurion il y a un mois, à Bornéo. Le pilote septuagénaire a fait des bonds jusqu'en Ontario. Une aventure volante ponctuée par les angoisses administratives, les rebondissements mécaniques et le mauvais temps.
Revenons début juillet. Son deuxième tour du monde amateur en solitaire a mené Hugues Jurion à Bornéo, dans la ville malaisienne de Kota Kinabalu.
Cap sur Taipei
Là, c'est l'attente d'autorisation pour atterrir sur Taiwan. Lorsque le sésame arrive enfin, le pilote de 77 ans met le cap sur Taipei. Une destination atteinte en huit heures trente de vol par le papy volant, avec ce commentaire : slalom entre les cumulonimbus, mais petit vent favorable.
La Corée en préparant la Russie
Très vite, Hugues Jurion réintègre le cockpit de son biplace et s'envole de Taïwan vers la Corée du Sud. Plus exactement Gimpo, proche de Séoul, par un ciel encombré «aussi bien de nuages que de trafic», «sous un temps maussade», avec un guidage vertical en panne. Pour rester dans le ton, le pilote signale que «les coûts de touché sont faramineux». Cette étape coréenne est consacrée à la préparation finale du vol vers la Russie.
«J'ai posé mes roues à Vladivostok»
Le 14 juillet, le tourdumondiste jubile : «J'ai posé mes roues à Vladivostok.» Décrocher l'autorisation de survoler la Russie représentait l'un des défis de cette folle aventure. «L'émotion est grande car c'était vraiment un challenge que d'être autorisé à entrer dans ce si grand pays avec un si petit avion», écrit Hugues Jurion sur son blog Facebook.
Traducteur Internet
Vladivostok est «une ville étonnante, à la fois moderne et pleine de souvenirs de la Deuxième guerre mondiale, mais joyeuse». Tout n'est pas simple, question de sécurité. Il faut par exemple toute la force de conviction de l'accompagnateur local pour faire entrer de l'essence automobile à l'aéroport. Guide russe avec lequel Hugues Jurion communique par... traducteur internet, imaginez les fous-rires.
Bons souvenirs de Khabarovsk
Quand le promeneur aérien repart, c'est pour rallier Khabarovsk, la plus grande ville de l'Extrême-Orient russe, avec ses plus de 600 000 habitants. Une étape mémorable, et pour de bonnes raisons. Dans la cité bordée par le fleuve Amour, Hugues Jurion est accueilli par les télés locales. Puis il est pris en charge, comme à Vladivostok, par l'association russe des pilotes propriétaires d'avion. La visite de leurs installations vaut le détour : elles se trouvent sur une ancienne base militaire, avec vestige de bunker camouflé aux énormes portes blindées.
Le goulag de Magadan
Cap sur Magadan, port de Sibérie orientale, à l'ouest du Kamtchatka. Hugues Jurion survole pour cela les eaux froides de la mer d'Okhotsk. «Si Khabarovsk fut sans doute ma plus belle escale en Russie, celle de Magadan fut moins attrayante, confie le Calédonien. Pour tout dire, cette ville est assez sinistre car elle porte encore les traces d'un des pires goulags de l'époque stalinienne.»
A Anadyr, le visa expire!
Suit Anadyr, la cité de Russie située le plus à l'Est. C'est dans cette petite ville donnant sur la mer de Béring que survient le hic. Le visa délivré par les autorités russes s'apprête à expirer. Mais la demande d'entrée aux Etats-Unis reste sans réponse. Une impasse, qui sera réglée in extremis. Le sieur pilote est autorisé à entrer en Alaska. En l'ocurrence à Nomé, autour de 3500 habitants, qui vivent sur «les rives brumeuses, froides et venteuses de la mer de Bering».
A Nomé, en Alaska
Alaska
L'étape suivante, Anchorage, n'apporte pas la détente espérée. De la ville la plus peuplée d'Alaska, le visiteur du Pacifique Sud retient quatre journées de brume, de bruine et de plafond bas : «J'ai passé une bonne partie de mon temps dans ma chambre [d'hôtel] à étudier les prévisions météo pour décider de l'étape suivante. Mais aussi mettre à jours mes bases de données nord-américaines, faire regonfler ma bouteille d’oxygène et faire quelques bricoles sur l'avion.»
«Les freins encore en panne» en Alberta
Hugues Jurion décide alors de ne pas pousser plus avant aux USA, mais de rallier le grand nord canadien. Les épisodes suivants de ce grand voyage l'ont mené à White Horse dans l'état du Yukon, « à la poursuite de Jack London, de Croc blanc, et des trappeurs». Puis à Edmonton, en Alberta - «et ,vous allez rire ! les freins sont encore tombés en panne en arrivant au parking...».
A Thunder Bay après un vol compliqué
Les dernières nouvelles données par le Calédonien parlaient d'une arrivée à Thunder Bay, en Ontario, après un vol compliqué: «J'ai frayé mon chemin entre les gros cumulus et les cumulonimbus d'un front froid pratiquement parallèle à la voie aérienne que je devais suivre, et dont j 'ai du parfois m’écarter de plus de 50 km avec l'accord des contrôleurs aériens. Rien de vraiment méchant, mais un peu pénible. Prévu pour 6h14mn, ce vol a finalement duré 7h30mn.»