Bougainville: Rio Tinto dans la tourmente de l'ancienne mine de cuivre de Panguna

Le site de l'ancienne mine de cuivre de Panguna à Bougainville (Papouasie-Nouvelle-Guinée)
Le géant anglo-australien Rio Tinto est accusé de s'être soustrait à ses responsabilités dans le nettoyage des déchets toxiques du cuivre de la mine de Panguna, sur l'île papouasienne de Bougainville, dans une plainte déposée mardi en Australie.
Alors qu'il envisage de fermer sa grande usine d'aluminium dans le sud de la Nouvelle-Zélande et aprés avoir suscité l'émoi en Australie pour avoir détruit en mai un ancien site aborigène, le géant minier anglo-australien Rio Tinto est de nouveau dans la tourmente. 
 

Pollution au cuivre

L'action action en justice a été lancée par le Centre juridique pour les droits de l'Homme de Melbourne au nom de plus de 150 habitants de Bougainville, la plus au nord de l'archipel des îles Salomon à 1600 kilomètres au nord-ouest de la Nouvelle-Calédonie. Les plaignants affirment que l'ncienne mine de cuivre de Panguna, qui a été au coeur de la sanglante guerre civile à Bougainville dans les années 1980 et 1990, continue de polluer les cours d'eau voisins, plus de trois décennies après sa fermeture. "Nos fleuves sont empoisonnés par le cuivre, nos maisons sont envahies par la poussière émanant des monticules de résidus, nos enfants tombent malades à cause de la pollution", a dénoncé dans un communiqué Theonila Roka Matbob, membre du Parlement local. Panguna, qui fut un temps la plus grande mine de cuivre à ciel ouvert du monde, représenta à elle seule jusqu'à 40% des exportations papouasiennes. Elle a été en activité de 1972 à 1989.
 
Enfants de Bougainville archipel des Iles Salomon
 

Guerre civile autour du cuivre

Les dégâts environnementaux provoqués par l'activité minière et l'absence de retombées financières furent à l'origine de vives protestations au sein de la population. Les revendications concernant cette mine avaient provoqué les premiers accrochages entre armée et rebelles sécessionnistes. La guerre civile qui suivit fit 20.000 morts, et reste à ce titre le conflit le plus sanglant dans le Pacifique depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Un cessez-le-feu est intervenu en 1998 puis un accord qui a permis la tenue, en fin d'année dernière, d'un référendum au cours duquel 98% des électeurs de l'île du Pacifique se sont prononcés en faveur de l'indépendance. Bougainville jouit d'une autonomie depuis 2005 au sein de la Papouasie-Nouvelle-Guinée. 
 

Plainte contre Rio Tinto

En 2016, Rio Tinto avait cédé le contrôle de ses parts dans la mine de Panguna aux gouvernements de Papouasie et de Bougainville. La population avait alors accusé le groupe minier de chercher à échapper aux coûts du nettoyage du site. La plainte accuse le groupe minier de ne pas avoir géré les risques que représentent les déchets miniers qui sont, selon elle, à l'origine de problèmes de santé pour les plus de 12.000 personnes vivant en aval. Elle appelle le gouvernement australien à pousser Rio Tinto à entamer des négociations avec les habitants, et à lancer une enquête si celles-ci échaouent.
 

Prêt à discuter

Le géant anglo-australien s'est dit prêt à discuter avec les habitants de Bougainville au sujet de leur plainte. "Nous sommes au courant de la détérioration des infrastructures minières sur le site et dans les zones voisines et des allégations quant aux impacts négatifs sur les plans environnementaux et sociaux, y compris concernant les droits de l'Homme", a déclaré un porte-parole au Sydney Morning Herald. 

La pollution minière survenue à Bougainville n'est pas sans rappeler le scandale des boues rouges qui avaient pollué la baie de Basamuk à Madang en Papouasie-Nouvelle-Guinée (voir articles ci-dessous). Près de 7000 personnes avaient subi les conséquences de la pollution survenue en août 2019. 200 000 litres de résidus toxiques étaient remontées à la surface de la mer de Bismark. Ces déchets miniers provenaient des rejets d'une raffinerie hydro métallurgique (Ramu) appartenant à une filliale du groupe Metallurgical Corp of China. L'Union européenne, la France et la Nouvelle-Calédonie interdisent ces pratiques minières particulièrement polluantes. Les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) et le développement durable sont des enjeux primordiaux.