Calédoniens ailleurs : Lucy Rebel, embarquée dans une course folle et éclatante

Calédoniens ailleurs : Lucy Rebel, embarquée dans une course folle et éclatante
Nombre de nos compatriotes font le choix de quitter la Nouvelle-Calédonie. Études, recherche d’emploi, envie d’ailleurs, les raisons sont multiples. Mais qui sont ces Calédoniens qui tentent l’aventure ailleurs ? Cette semaine, Lucy Rebel administratrice adjointe au Sénat.
 
Dès la fin de son lycée, Lucy s’est embarquée dans une course folle pour ses études supérieures. Une cadence infernale mais couronnée de succès. Si embrasser une carrière de professeure de français tente la jeune fille, la Calédonienne dévie bien rapidement. Excellente élève, ayant une grosse capacité de travail, la lycéenne en parcours scientifique décide de passer le concours de Sciences Po sur les conseils de sa mère. « J’avais l’impression d’étouffer en sciences et cette école offrait un éventail de matières. » Son établissement – le Grand Nouméa – ayant adhéré à la convention d’éducation prioritaire, la Dumbéenne intègre l’atelier de préparation. La métisse japonaise et kanak doit présenter un dossier de presse dans le cadre d’un oral qui se tient juste après le bac blanc. Retenue, bachelière mention Très bien en décembre 2012, Lucy s’envole pour Paris dans la foulée passer la seconde partie du concours. Après un deuxième oral, l’étudiante décroche son sésame pour la célèbre école de la rue Saint-Guillaume. Dès le mois suivant, la boursière se retrouve sur les bancs de Sciences Po. Un tourbillon jugé « comme brutal » mais « un changement salutaire » pour la jeune fille. Trois étudiantes Calédoniennes ayant été admises via ce dispositif cette année-là, la jeune femme reçoit avec ses camarades six mois de cours personnalisés.
 
Dans le cadre de son cursus à Sciences Po, Lucy a étudié à l'université de Californie. Elle pose ici au parc Yosemite en Californie et sur la pyramide du soleil lors d'un voyage au Mexique.

En septembre 2013, elle intègre la première année de Sciences Po. Débutent alors pour elle « ses trois années préférées ». « J’ai adoré car j’ai trouvé que c’était une respiration par rapport au bac S. Mais je me suis quand même mis une grosse pression. On a besoin de faire ses preuves. Venant de Dumbéa, j’avais l’impression d’avoir l’étiquette « lycée prioritaire » collée. » Un détour d’un an à l’université de Californie à San Diego dans le cadre de son cursus, voilà Lucy de retour à Paris. Mais sans idée sur son avenir. Elle choisit le master de politiques publiques « réputé comme le plus généraliste ». Un stage au Congrès de la Nouvelle-Calédonie la conforte dans sa décision. « Je voulais avoir une idée concrète de ce qu’est l’administration. Là j’étais au coeur du processus, j’avais une position d’observateur intéressante. » En 2016, Lucy entame son master non sans peine. « Les cours étaient lourds, calqués sur les concours notamment celui de l’ENA. » La Calédonienne effectue un stage de six mois à la délégation sénatoriale aux Outre-mer. « J’ai adoré car j’ai vu de A à Z comment était rédigé un rapport. J’ai fait des déplacements, des conférences. » Une expérience qui lui donne envie d’intégrer la filière « administration » en deuxième année, celle qui prépare aux concours. « Je me voyais bien travailler pour le service public. J’aimais l’idée de mise à disposition. Cette envie de professorat que j'ai eu, je l'ai transformé en autre chose. » 
 
Diplômée de Sciences Po, Lucy a intégré le 1er octobre le Sénat

Diplômée en 2018, elle passe dans la foulée le concours de l’Institut national des Études Territoriales (INET). Recalée - « je l’ai pris comme un coup d’essai et je gérais à la fois mon stage et mes études en plus de la préparation » - Lucy s’inscrit à la prépa aux concours administratifs toujours à Sciences Po en septembre 2018. Une formation qui « n’est pas une partie de plaisir » pour l’étudiante qui a alors rejoint la filière excellence de Cadres avenir. « Je n’avais pas l’impression d’évoluer par rapport au lycée. J’avais l’impression de faire les mêmes cours qu’en master. » La Calédonienne passe le concours d’administrateur adjoint du Sénat, l’ENA et tente à nouveau l’INET. Admise au Sénat et admissible à l’INET, elle décide de rejoindre l’institution du palais du Luxembourg. Là encore, tout s’enchaîne. Elle apprend sa réussite la dernière semaine de septembre pour une prise de poste le 1er octobre. « Juste avant je révisais les concours donc la transition n’a pas été évidente. » Surtout que la jeune femme a été admissible à l’ENA. Lucy a donc dû jongler entre son nouveau poste et la préparation à l’oral du concours. Alors que 2019 se termine, la jeune femme va enfin pouvoir souffler après six années particulièrement denses. « J’aimerais me poser et prendre du recul. J’ai enchaîné les étapes assez vite, étant partie trois semaines après le bac. » « Intégrer la fonction publique, c’est très fort symboliquement pour moi mais je n’ai pas encore l’impression que c’est un aboutissement, que je suis arrivée à la fin d’un cycle. Peut-être dans quelques semaines. »

par ambre@lefeivre.com