Ce que nous apprennent les échouages de mammifères marins

Depuis 2019, un site web permet la collecte et le stockage des données sur les échouages
Une étude sur les échouages de mammifères marins enregistrés en Nouvelle-Calédonie entre 1991 et 2022 a été publiée dans Pacific conservation biology. Ces évènements sont des sources importantes d'informations pour estimer la biodiversité, comprendre l'impact des activités anthropiques et adapter les mesures de conservation.

En trente ans, 322 animaux se sont échoués sur le littoral calédonien : 35% étaient des dugongs, 19% des cachalots, 18% des delphinidés (dauphins ou globicéphales) et 14% des cachalots pygmées et nains. "Ça nous apprend des tas de choses les échouages, confirme Claire Garrigue, chargée de recherche en biologie marine à l’IRD et spécialiste des cétacés. Sur le cachalot qui vit au large par exemple. Certaines espèces, on ne les connaît que par échouage autour de la Calédonie. Ça va nous donner une information sur le nombre d'espèces qui vivent à un endroit, dans quelles zones elles évoluent, et s'il y en a toute l'année."

La côte ouest particulièrement concernée 

Ainsi, des points chauds ont été identifiés sur la côte ouest de la Grande Terre (Bourail, Ouano, Nouméa) et dans la baie de Prony. Ainsi qu'à Ouvéa et l'Île des Pins, dans une moindre mesure.

Entre 1991 et 2022, 183 échouages ont été enregistrés.

Cette étude a été menée par dix-huit chercheurs, basés en Nouvelle-Calédonie, en Australie et dans l'Hexagone. À la CPS, on a analysé le contenu d'estomac de cachalots par exemple. "L'échouage peut nous donner des informations sur la biologie de l'espèce : ce qu'elle mange, les différentes tailles qu'elle peut avoir, sa génétique... En recherchant la cause des échouages, on en apprendra plus sur les menaces qui pèsent sur les mammifères marins."

En Calédonie, on a entre cinq à quinze échouages par an. Si une année on en a cinquante, on va s'interroger sur ce qu'il se passe.

Claire Garrigue, de l'IRD

28% des causes des échouages de dugongs sont d'origine humaine

Des informations précieuses concernant l'impact des activités humains ont été recueillies pour certaines espèces préoccupantes, telles que les vaches marines, pour lesquels 28% des causes d'échouages sont d'origine humaine. "C'est très ennuyeux, explique Claire Garrigue, parce que les dugongs calédoniens sont classés comme étant en danger d'extinction par l'UICN, du fait que le nombre d'animaux adultes est faible, qu'ils sont isolés géographiquement et génétiquement, ce qui les rend plus vulnérables aux maladies. S'ils sont en plus impactés par des causes anthropiques, qui augmentent les causes d'échouage, la population va diminuer encore plus." 

Les causes de décès n'ont pas été déterminées pour 84% des échouages, mais elles ont été identifiées dans la majorité des autopsies réalisées par des vétérinaires. "Si vous trouvez un animal échoué, appelez le 16, que l'on soit prévenus et qu'on puisse faire les prélèvements nécessaires. Car lorsque des vétérinaires sont intervenus à nos côtés, dans plus de 80% des cas, on a su de quoi les animaux étaient morts." 

Mesures de conservation adaptées

La surveillance à long terme des échouages aidera à mettre en place des mesures de conservation efficaces pour protéger les mammifères marins de certaines activités humaines pouvant le menacer, comme le trafic maritime, la pêche ou la pollution sonore. "Si par exemple on se rendait compte que sur une certaine zone, tous les dugongs qui s'échouent ont été victimes d'une collision avec un bateau, peut-être que les autorités seraient aménées à règlementer les vitesses de déplacement. Quand on trouve les causes d'échouages, on peut en informer les gestionnaires. A eux de voir quelles mesures de gestion ils peuvent appliquer selon les zones, les espèces et les périodes de l'année."

Si vous êtes témoin d’un échouage, vous pouvez appeler le Coss NC en composant le 16, et le signaler sur le site rescue.ird.nc.