"J’achète toujours ici parce que c’est moins cher." Laura fait ses courses deux fois par semaine à l’épicerie sociale et solidaire de Saint-Vincent de Paul, à la Vallée-du-tir. Aujourd’hui, elle repart avec du papier toilette.
L’association reçoit très peu de dons de produits d’hygiène. Elle les achète donc et les revend à prix coutant*. "Les produits d’hygiène représentent à peu près 300 000 francs d’achat, par mois. Ce qui est quand même important pour des structures comme les nôtres", indique Elisabeth Gau, la présidente de Saint-Vincent de Paul.
Des kits d'hygiène
Parmi les produits les plus prisés : les savonnettes, suivies du dentifrice et de la brosse à dent, même si ces produits d'hygiène bucco-dentaire sont "un petit peu moins" demandés que le savon, signale la présidente de l'association. "Il y a peut-être une éducation à faire..."
Autres articles recherchés : les couches pour bébé. Ici on peut trouver le paquet de soixante-dix-huit couches à 1 200 francs, soit 70 % moins cher qu’en grande surface.
Ces produits de première nécessité sont réservés aux bénéficiaires de l’aide médicale*. "On est en train de réfléchir à des petits kits d'hygiène et des kits pour les mamans, qu'on ferait sous forme de dons. Ou qu'on pourrait vendre à petits prix aussi, à l'épicerie."
A la recherche de coiffeurs
Des kits d’hygiène, la Croix-Rouge en distribue, notamment aux étudiants de Baco et Nouville. Ils contiennent un nécessaire de base, des protections périodiques ou de quoi se raser, ainsi que des préservatifs.
De son côté, l’association l’Accueil, qui prend en charge les personnes sans domicile fixe, ébauche un projet de bains douches avec la mairie de Nouméa. Et à Saint-Vincent de Paul, une laverie solidaire ouvrira dans le courant de cette année.
Pourquoi ne pas également proposer des soins capillaires et des coupes à petits prix au sein du futur café alternatif de l'association ? "Un coiffeur, mais quelle bonne idée !", s'enthousiasme Elisabeth Gau. Mais encore faut-il en trouver un...
On est dans un monde où il fait être plus solidaire.
Elisabeth Gau, présidente de Saint-Vincent de Paul
Le reportage radio de Julie Straboni
Des produits périodiques encore tabous
Par manque d'argent, certaines femmes se privent aussi de protections périodiques pendant leurs règles. Ces situations, qui ne sont pas propres à la Calédonie, mobilisent les associations locales de différentes manières.
Dans les épiceries sociales et solidaires de Saint-Vincent de Paul, les bénéficiaires des produits de première nécessité n’osent pas trop acheter des serviettes hygiéniques, encore moins des tampons.
L’association réfléchit à les sortir de leurs emballages pour permettre un passage en caisse plus discret. Car cette précarité menstruelle a des conséquences. "Il y a des statistiques qui montrent que les jeunes femmes sont absentes trois à quatre jours par mois dans les établissements scolaires. Et ça correspond à la période des menstruations", observe Elisabeth Gau. Il y a une "certaine honte", une "certaine retenue", remarque la présidente de Saint-Vincent de Paul.
On fait beaucoup de passages solidaires dans les tribus. En discutant avec les femmes, on se rend compte que beaucoup utilisent du papier journal en guise de protection.
Elisabeth Gau, présidente de Saint-Vincent de Paul
Fabrication de serviettes hygiéniques
A la Croix-Rouge, Dominique Bayol mène des ateliers de fabrication de serviettes hygiéniques, lavables et réutilisables, avec des tissus de récupération. Elle est la référente recyclerie et tri. "L'idée, c'est de transmettre au maximum" de femmes. "Quand on forme une jeune, aux ateliers ouverts, elle va en former plein autour". Sœurs, nièces, cousines... "Il n'y a pas besoin de former beaucoup de monde pour que ça se répande", souligne Dominique Bayol.
Dans le Pacifique, la Polynésie montre la voie : les établissements scolaires classés prioritaires sont en train d’être équipés de distributeurs de protections périodiques gratuites.
*Les épiceries sociales et solidaires de Saint-Vincent de Paul peuvent recevoir des dons. Ces dons tout le monde peut se les offrir. L'argent récolté permet ainsi d'acheter les produits de premières nécessité, vendus à prix coûtant aux bénéficiaires de l'aide médicale.