Congrès : feu vert pour la commercialisation du cerf de chasse

Le Congrès de Nouvelle-Calédonie a adopté une délibération ouvrant la voie à la commercialisation de viande de cerf de chasse.
Le Congrès de Nouvelle-Calédonie a adopté vendredi matin une délibération ouvrant la voie à la commercialisation de viande de cerf de chasse. Une évolution, principalement sanitaire, qui devrait permettre d'exploiter une ressource qui prolifère sur le Caillou.

Poser un cadre sanitaire pour la mise sur le marché du cerf de chasse, en travaillant sur un circuit court pour proposer un prix raisonnable au consommateur.

C'était l'objet de la délibération votée vendredi matin à l'unanimité par la commission permanente du Congrès.

C'est Françoise Suve, présidente du groupe Loyalistes, qui portait cette mesure. Pour elle, "c'est le moment d'organiser cette filière. Le cerf sauvage est une viande de grande qualité nutritionnelle, pauvre en lipides, pas grasse et riche en vitamines et en minéraux. C'est une viande non stressée donc qui respecte la condition animale", appuie-t-elle.

Le cerf sauvage est une viande de grande qualité nutritionnelle, pauvre en lipides, pas grasse et riche en vitamines et en minéraux.

Françoise Suve, présidente du groupe Loyalistes au Congrès

L'objet de cette délibération est de mettre sur pied un circuit de commercialisation hors Ocef, qui privilégie depuis des années le cerf d'élevage, même s'il n'est pas exclu que l'office l'intègre plus tard, moyennant des aménagements. Concrètement, après la mise à mort en action de chasse, le cerf sera éviscéré sur place et amené en peau à un centre de collecte mobile, puis transféré dans un centre de traitement où l'animal sera dépouillé et fera l'objet d'une inspection sanitaire.

20 000 carcasses par an

Un traitement sanitaire qui a un coût. Il a été estimé à 6 millions de francs par an sur l'inspection de 20 000 carcasses (entre 80 et 100 000 cerfs sont abattus chaque année sur l'ensemble du pays). Une proportion qui table sur le nombre de personnes qui commercialiseront cette viande, puisqu'une grande majorité est autoconsommée. Actuellement, le coût du mandat sanitaire sur les abattages en tuerie particulière se monte à 7 millions par an. Il sera donc doublé avec cette mesure.

Mais cet investissement pourrait bien être rapidement amorti.

1 000 F le kilo en boucherie ?

Cette filière d'avenir peut s'appuyer sur des savoir-faire locaux et pourrait contribuer à améliorer l'autosuffisance alimentaire et la lutte contre la vie chère.

"Le prix de la viande sera forcément moindre, puisqu'on passe par un circuit court et qu’un réduit le nombre d'opérateurs tout en étant encadré sanitairement. Et en même temps, on permet à n'importe quel chasseur d'entrer dans cette filière, ajoute la présidente du groupe Loyalistes. Logiquement, le prix devrait être bien moindre à la sortie. Aujourd'hui une carcasse de cerf d'élevage c'est en gros 10 000 F. Quand on applique la norme la plus forte, on obtient une viande dans les boucheries à 1 800 ou 2 000 F le kilo. Là, quand on a une bête de 30 kilos à 300 F le kilo, si vous ajoutez juste la collecte, le traitement et l'inspection sanitaire, ça arrive en boucherie aux alentours de 1 000 F le kilo."

Le travail des associations salué

Même s'il n'y a aucune garantie sur le prix avancé par Françoise Suvé, car la délibération porte bien sur l'encadrement sanitaire de cette filière et pas sur un éventuel encadrement économique.

Le travail des associations Dayu Biik à Hienghène et Tipwoto de Touho a été salué par Ines Kouathe, la rapporteure de la commission, et Maria Waka, du groupe UC FLNKS et nationalistes, qui les ont citées en exemple pour les autres communes, invitées à s'en inspirer en matière de lutte pour la préservation de l'environnement et pour la régulation des espèces envahissantes.

Pas pour l'export

Alors, bientôt du cerf de chasse sur les étals de Calédonie mais aussi chez nos voisins ? Vaimu'a Muliava se réjouit que ce travail puisse faire naître des perspectives à l'export. "À chaque fois que l'on va en Polynésie, il y a du trafic de saucisson de cerf, s'amuse-t-il. Ils sont très friands du saucisson de cerf de chez nous, on pourra peut-être le faire en toute transparence..."

Les réactions des professionnels recueillies par Charlotte Mannevy et Luigi Wahmereungo Palmieri :

Feu vert pour la commercialisation du cerf de chasse ©Charlotte Mannevy et Luigi Wahmereungo Palmieri / NC la 1ère

Un enthousiasme tempéré par Guillaume Pujol, le directeur de la Davar, qui rappelle que la viande de cerf ne pourra pas être transformée : "Cela nécessiterait un circuit long avec des agréments supérieurs à ce qui est présenté dans le texte. Le but aujourd'hui, c'est vraiment de faciliter la commercialisation de viande dans des circuits très courts, des ateliers de traitement aux bouchers."

Mais la porte est ouverte. La ressource est abondante, la demande réelle et chasseurs et consommateurs attendaient une mesure en ce sens depuis des années.