L'annonce officielle que Vale va céder ses parts dans l'usine du Sud en cours d'année prochaine, et réorienter d'ici là sa stratégie en Nouvelle-Calédonie, fait réagir du côté des acteurs syndicaux, politiques et de la société civile. Quelques exemples.
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«Une triste nouvelle» pour le Soenc nickel
Pour les syndicats, le départ annoncé du groupe brésilien est synonyme d'incertitudes sur l’avenir de l'usine et les emplois. «C'est une triste nouvelle. On a un grand groupe international qui va nous quitter, qui a toujours été à nos côtés pendant un peu plus de dix ans», formule Pierre Tuiteala, secrétaire général du Soenc Nickel. «Il va falloir qu'on apprenne à voler de nos propres ailes», ajoute-t-il en assurant par ailleurs : «On sera attentifs. En soutien de la construction de ce nouveau modèle [et] par contre […] vigilants sur l'impact social.»Sa réaction recueillie par Coralie Cochin :
Désengagement de Vale, Pierre Tuiteala
Accompagnement social : la province Sud «sera très exigeante»
La province Sud assure que son exécutif «contribuera, dans le cadre de ses compétences, à trouver un repreneur en capacité de continuer à exploiter le site dans de bonnes conditions sociales, environnementales et de sécurité».Un communiqué diffusé mercredi matin estime que «le principe de réalité économique prévaut quant à la nécessaire révision de la stratégie industrielle pour stopper les pertes de l'usine de Goro et enfin la rendre rentable». Mais il ajoute que «la province sera très exigeante sur les conditions de mise en œuvre des mesures d'accompagnement des salariés et des sous-traitants».
Et d'annoncer qu'une prochaine assemblée de province sera dédiée à cette problématique de l'usine du Sud. Y sera présenté le fruit de la réflexion lancée par l'administration «pour prendre part à cette transition sociale nécessaire à la pérennisation de cette activité économique indispensable à la province, autant qu'à la Nouvelle-Calédonie.» La province Sud fait partie de la SPMSC actionnaire à 5%.
Plus de dette pour la SPMSC ?
La province Sud fait partie de la SPMSC actionnaire à 5%, dans l'usine du Sud. La Société de participation minière du Sud calédonien affiche la même attitude. Et elle devrait bénéficier de ce désengagement annoncé. «Nous avons une dette vis-à-vis de Vale Canada, que nous avons réduite cette année», souligne son président Michel Lasnier. «Notre pacte prévoit que si jamais l'usine s'arrêtait ou s'il y avait un changement d'actionnaires, notre dette disparaîtra. Quelque part, c'est une bonne nouvelle pour les trois provinces de la Nouvelle-Calédonie qui sont les actionnaires de la SPMSC. Cela étant, il faut rester très vigilant sur le plan social et ce que va entraîner le changement de stratégie.»Ecoutez Michel Lasnier interrogé par Coralie Cochin :
Désengagement de Vale, Michel Lasnier
Le gouvernement «très vigilant» sur l'évolution de la situation»
Par communiqué, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie se dit «attentif à la volonté de Vale NC de faire évoluer rapidement son modèle pour se positionner sur le marché des batteries, porteur d’avenir, dans des conditions qui permettront à l’usine du Sud d’être rentable». Prévoyant que «ce changement de modèle ne sera pas sans conséquence sur les salariés, les sous-traitants de l'usine et les populations du Sud», il assure qu'il «sera très vigilant sur l'évolution de la situation afin que les intérêts de ces différentes catégories de la population calédonienne soient pleinement pris en compte». Gouvernement qui «étudiera la possibilité d'accompagner l'évolution de l'industriel vers ce modèle hybride métallurgique et minier».EPLP, «extrêmement surpris», craint un «chantage à l'emploi»
Le nouveau modèle économique présenté par Vale NC suscite une réaction forte d'Ensemble pour la planète. Pour EPLP, l’export de saprolites dès l’an prochain est non seulement condamnable moralement, mais il se heurte par ailleurs à un problème juridique. «Le code minier de la Nouvelle-Calédonie fait des massifs du Sud une réserve géographique», pointe Martine Cornaille, vice-présidente de l'association. «Le minerai que ce gisement contient est exclusivement dédié à cette usine du Sud.»Ses explications au téléphone de Coralie Cochin :
Désengagement de Vale, EPLP
Quelques réactions compilées par Erik Dufour avec Philippe Kuntzmann :
Pour l'Uni, Vale NC fait preuve d'«un optimisme démesuré»
Même refus de l'exportation pour le groupe Uni au Congrès, qui se réfère également au code minier. «La Nouvelle-calédonie paye déjà un lourd tribut lié à l'Histoire, aux impacts de la construction et à la non-atteinte des objectifs de production de cette unité industrielle», écrit son président Louis Mapou dans un communiqué. Il évoque les conditions «très avantageuses» de concession du gisement, «les nombreux incidents survenus» ainsi que des effets «durables sur le plan environnemental et sur la cohésion des communautés locales environnantes».«La Nouvelle-Calédonie ne peut donner un blanc-seing au PDG de Vale après les efforts et les faveurs accordées à cette multinationale», poursuit-il. Le groupe Uni demande notamment que la recherche d'un repreneur s'accompagne «d'un accroissement de la présence des intérêts calédoniens dans cette nouvelle entité». Et il estime que cette annonce à quelques mois du prochain référendum «déstabilise le pays».
Le sénateur Frogier invoque son concept de «différenciation provinciale»
Pierre Frogier, lui, réagit à la réaction ci-dessus. Dans un communiqué diffusé jeudi, le sénateur LR s’étonne «que le groupe Uni commente la décision de Vale NC et surtout pose ses conditions à sa réalisation». «L’usine du Nord, dont la province est propriétaire à 51% ne génère que de la dette pour la collectivité», estime-il, et «l’usine "off-shore" en Corée, transformant du minerai calédonien, ne génère de l’emploi que pour des travailleurs étrangers».Et Pierre Frogier de poursuivre : «Il n’est pas question que ce modèle s’impose aux autres opérateurs. La province Sud doit être libre de consolider son propre modèle industriel. C’est une illustration de la différenciation provinciale que je propose de mettre une œuvre au lendemain de l’Accord de Nouméa.»