Discours d'Edouard Philippe : décryptage et réactions

C'est fort de quatre jours à la rencontre des Calédoniens et de leurs élus que le Premier ministre s'est exprimé devant le Congrès. Edouard Philippe entend suivre l'empreinte de Michel Rocard, comme le montre la méthode qu’il propose pour cheminer vers la sortie de l’Accord.
Consensus, respect, responsabilité: trois principes fondateurs des Accords de Matignon et de Nouméa qu’Edouard Philippe souhaite appliquer, à deux niveaux. Dans la méthode, pour préparer la consultation elle-même. Aux Calédoniens de faire une proposition pour la formulation de «la question». Même si, in fine, c’est bien au parlement national qu’il revient de l’entériner. Le Premier Ministre a rappelé que cette question était strictement encadrée par la loi organique. Elle sera binaire - on y répondra par oui ou par non - et portera sur la pleine souveraineté.

La date du référendum au Congrès

Aux Calédoniens, également, d'arrêter la date du scrutin d'autodétermination. En ouverture de séance, le président du Congrès s’est d'ailleurs engagé à réunir rapidement l’institution. «Après consultation des chefs de groupe, a dit Thierry Santa, je soumettrai très prochainement à l'assemblée une proposition de date pour la consultation. Cette initiative du Congrès constituera un message fort adressé à la population calédonienne sur notre capacité à rechercher et trouver localement des consensus sur les questions essentielles.»  

Marie-Claude Tjibaou pourrait faire partie de la «commission des sages».

Dans la «commission des sages»

Il a également proposé la mise en place d’une «commission des sages» pour veiller à la bonne tenue des débats durant la campagne. D’après nos informations, Elie Poigoune, président de le ligue des droits de l’Homme; Marie-Claude Tjibaou; Jean-Pierre Flotat, vice-président du Cese; Anne-Marie Mestre, présidente de l’association SOS Violences sexuelles; le père Rock Apikaoua ou encore Octave Togna, auraient été approchés pour former cette commission.

Elie Poigoune, président de la ligue des droits de l’Homme; Marie-Claude Tjibaou; Jean-Pierre Flotat, vice-président du Cese; Anne-Marie Mestre, présidente de l’association SOS Violences sexuelles; le père Rock Apikaoua ou encore Octave Togna, auraient été approchés


Construire le vivre-ensemble après

Edouard Philippe a, comme attendu, explicité la méthode qu’il proposait pour préparer l’après 2018, et poser les fondations du vivre-ensemble. Il souhaite instaurer un cercle du dialogue resserré à une dizaine de personnes, choisies par les groupes du Congrès, permettant ainsi à toutes les sensibilités d’être représentées. Les discussions balaieront quatre thèmes : le destin commun, le rééquilibrage, la place de la Nouvelle-Calédonie dans le monde et le socle des valeurs. 

Un cercle du dialogue resserré à une dizaine de personnes, choisies par les groupes du Congrès, permettant ainsi à toutes les sensibilités d’être représentées


Objectif : fin du premier semestre 2018

Pas de calendrier imposé par Matignon. Il faut laisser le temps au palabre, mais un souhait quand même : qu’un consensus soit trouvé sur des valeurs et des projets communs d’ici la fin du premier semestre 2018. Le prochain Comité des signataires, début mars à Paris, sera une première étape importante pour évaluer les avancées de ce dialogue.

«Ne pas oublier les urgences de la vie quotidienne»

Comme il l’avait déjà fait devant l’Assemblée nationale, le Premier ministre a rappelé que si elle est cruciale, la question institutionnelle n’est pas tout. La société calédonienne est traversée par des problématiques qui perdureront au-delà du référendum. A commencer par la question environnementale. Edouard Philippe souligne la nécessité, comme pour tous les territoires du Pacifique, de s’adapter au changement climatique. Il a réaffirmé l’aide de l’Etat dans le développement du parc de la mer de Corail.


Nouméa pilote pour la «police du quotidien»​

En ce qui concerne le développement économique, le Premier Ministre a annoncé que les contrats de développements engagés avec les collectivités seraient renforcés en 2018, et que l’Etat appuierait la nouvelle centrale électrique de Doniambo. Enfin, le chef du gouvernement a rappelé les efforts consentis pour renforcer les moyens en matière de sécurité, et ajouté que Nouméa ferait partie des villes retenues pour expérimenter la nouvelle police de sécurité du quotidien.


Le RSMA pour les jeunes du Grand Nouméa

Autre outil de prévention de la délinquance des mineurs, le Régiment du service militaire adapté. L'Etat dotera le RSMA en Nouvelle-Calédonie de 80 places supplémentaires, sans doute sur les installations militaires de Nandaï, à Bourail. Avec de nouvelles filières de formation qui cibleront en priorité les jeunes du Grand Nouméa.

Ci-dessous, le texte du discours

Bien accueilli par les politiques

# Pierre Frogier
Au chapitre des réactions politiques, les propos du Premier ministre ont été qualifiés de «discours de la méthode» par plusieurs élus, de différent bord. Le sénateur Pierre Frogier, président du Rassemblement - LR et membre de l'Intergroupe, déclare se reconnaître dans ces propos.

# Philippe Gomès
«Il nous a en quelque sorte pris la main pour cheminer sur une ligne de crête quelque peu escarpée. Mais si tout le monde a de la bonne volonté, je crois qu'on peut y arriver», a réagi pour sa part le député Philippe Gomès (Calédonie Ensemble - Intergroupe), qui retient les annonces pragmatiques d'Edouard Philippe.

# Rock Wamytan
Chef de groupe UC-FLNKS et Nationalistes, Rock Wamytan évoque Descartes et le poids de l'histoire.

# Louis Mapou
Porte-parole du groupe Uni, Louis Mapou retient l'appel à la responsabilité lancé par le Premier ministre aux politiques calédoniens. 

# Sonia Backès 
Pour le groupe Les Républicains calédoniens, explique Sonia Backès, le discours d'Edouard Philippe est de nature à rassurer, notamment en ce qui concerne l'organisation du référendum.