Ducos : manifestation contre un projet d'incinérateur de déchets dangereux

Ce projet avait déjà essuyé un premier refus dans le quartier de la Zac Panda, à Dumbéa-sur-mer.
Les habitants de la presqu’île de Ducos vent debout contre un projet d’incinérateur de déchets dangereux, sur l’ancien site du CHT Raoul-Follereau, à Numbo. Hier, sept associations se sont regroupées en collectif pour dénoncer des risques pour la santé et l’environnement. Elles demandent des comptes aux pouvoirs publics, qui ont donné leur feu vert au projet.

Pour nos décideurs, l’argument est limpide : avec cet incinérateur, plus besoin d’exporter 2 000 tonnes de déchets hospitaliers, industriels et de laboratoire chaque année. Médicaments, matériels souillés, déchets chimiques mais aussi cadavres d’animaux pourront être traités localement, c'est-à-dire « réduits en cendres ».

Mais pour les riverains de la presqu’ile de Ducos, qui respirent des fumées industrielles depuis des décennies, c’est le projet de trop. Ils ne veulent plus être des citoyens de seconde zone. "Pourquoi la zone de Ducos ? Parce que la province Sud avait dit qu'elle allait trouver un terrain pour pouvoir mettre cette installation qui est polluante. A savoir que sur la presqu'île de Ducos, on est régulièrement arrosés par les fumées de la SLN, par les fumées polluantes de la centrale d'Enercal, qui devait être refaite depuis 2007 et qui est toujours en situation précaire", martèle Alain Miloud, responsable de l’association des habitants de Logicoop  "Donc aujourd'hui on n'en veut pas parce que les quartiers de Tindu, Logicoop, Kaméré et Ducos vont être impactés par ces fumées polluantes."     

Un document de 2 000 pages

Pas de réunion publique dans le quartier pour annoncer l’implantation de cet incinérateur, une enquête publique sur deux semaines seulement, et pendant les vacances d’août dernier, pour consulter un document de plus de 2000 pages. Les habitants ont le sentiment d’avoir été mis devant le fait accompli. "Ils ont fait ça derrière notre dos. On est en colère. Ici on on se demande on est quoi, nous ?" s'interroge Mathéo Seleone, le président de l’association Vaka Tawa à N’Du.

Les habitants ont manifesté une première fois en mars 2022, contre le projet.

Il y a trois ans, la province avait refusé le même projet à la Zac Panda, de Dumbéa. Mais en novembre, elle donne finalement le précieux sésame à la société Promed pour exploiter son incénarateur à Numbo. Comme le confirme l'arrêté ICPE de novembre autorisant l’exploitation.

Sur la base des conclusions du commissaire enquêteur : cette fois, le terrain (sur lequel l’installation est prévue) respecte les 200 mètres de distance des habitations ou des établissements recevant du public.

"Concentrer des pollutions dans des cendres"

Pourtant, pour Martine Cornaille, présidente du collectif environnemental EPLP, tous les paramètres n’ont pas été pris en compte. "Il va se contenter non pas de détruire des déchets dangereux, mais de concentrer des pollutions dans des cendres, dans des mâchefers (un résidu de la combustion du charbon NDLR.) après les avoir brûlées et donc de produire des émanations gazeuses dans l'atmosphère. Lesquelles vont être susceptibles de provoquer des désordres sanitaires et environnementaux sur la population avoisinante." 

Selon elle, la question de l'étude d'impact se pose. "Elle est basée sur une modélisation par vents dominants et il n'y a absolument rien qui est dédié à l'observation de la situation par coup d'Ouest. Donc, on aimerait bien savoir ce que les gens qui sont exposés aux coups d'Ouest vont prendre dans les poumons."

Une rencontre entre les habitants et la province

Quel impact sur la santé des familles en précarité du centre d’accueil les Manguiers, tout proche ? Ce projet d’incinérateur est-il compatible avec le projet d’inscrire les vestiges du bagne du site Raoul-Follereau au patrimoine de l’Unesco ? Autant de questions que se posent les habitants. Une rencontre entre les riverains et la province Sud est prévue ce mardi.

A ce stade, la Maison bleue ne souhaite faire aucun commentaire.

Le reportage de Nadine Goapana et Sylvie Hmeun :

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